Le VIH, un ennemi silencieux de la santé du cerveau ?

Publié par jfl-seronet le 15.01.2014
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Thérapeutiquetroubles neurocognitifscerveau

Diana Salazar est la coordinatrice d'une étude de recherche subventionnée par les Instituts de Recherche en Santé du Canada. Cette étude menée par des chercheurs de l’Université de McGill à Montréal-Québec, au Canada et en Australie, vise à comprendre les effets du VIH sur le cerveau, entre autres sur les capacités cognitives et mentales. Afin d'avoir plus d'information à ce sujet, nous sommes en train de créer avec l'aide de la communauté, plusieurs outils visant à soutenir les personnes vivant avec le VIH dans la gestion quotidienne de leur thérapie et de leur maladie. Diana Salazar les présente.

"Appelons-le Marc. C’est un homme dynamique et jeune d’esprit qui porte bien ses 59 ans. Il vit avec le VIH depuis maintenant vingt-cinq ans. Grâce à un traitement approprié, il est resté en santé. Cependant, il y a quelques années, Marc a commencé à éprouver des difficultés avec sa concentration et sa mémoire. Dernièrement, Marc a commencé à remarquer qu’il oublie des numéros de téléphone, ses rendez-vous médicaux, le nom de personnes qu’il vient de rencontrer ou parfois même ses médicaments de tous les jours. Il se demande si ces nouveaux comportements sont uniquement dus au vieillissement ou si le VIH pourrait aussi en être responsable. Mais surtout, il se demande s’il peut faire quelque chose pour améliorer sa situation.

Des gens comme Marc sont parmi les participants de l’étude "Pour un cerveau en santé". Cette étude a été développée par un groupe de chercheurs de l’université McGill (Montréal, Québec) et leurs collaborateurs d’autres régions du Canada et d’Australie. Ces investigateurs s’intéressent à mieux reconnaitre et comprendre les changements cognitifs et à trouver des moyens pour améliorer la santé du cerveau chez les personnes vivant avec le VIH.

Qu’est ce que la "cognition" et comment est-elle reliée à l’infection par le VIH ? La cognition est la capacité d’une personne à penser, comprendre, planifier ; elle regroupe des processus spécifiques tels que la mémoire, la concentration, la résolution de problèmes et la capacité à acquérir de nouvelles informations. Lorsque l’un de ces processus est affecté, il y a un déclin cognitif.

A long terme, l’infection par le VIH peut affecter les fonctions cognitives, résultant en des difficultés au niveau de la mémoire ou une diminution de la capacité à résoudre des problèmes. En effet, certaines recherches démontrent que malgré un bon contrôle de l’infection par le VIH, 30 à 50 % des personnes vivant avec le VIH peuvent éprouver plus de difficultés cognitives que des personnes du même âge n’ayant pas le VIH. Ces difficultés résultent-elles de lésions cérébrales provoquées par le VIH ? D’un vieillissement accéléré ? Des effets toxiques des médicaments ? Ou du stress de vivre avec une maladie chronique sérieuse ? La réponse pourrait bien être "toutes ces réponses".

L’équipe multidisciplinaire de "Pour un cerveau en santé" est composée de médecins spécialisés en VIH, psychiatres, neurologues, neuropsychologues et épidémiologistes qui croient qu’une moins bonne santé du cerveau en présence du VIH serait due à plusieurs facteurs. L’équipe cherche d’ailleurs à caractériser ces facteurs chez un échantillon de 900 personnes vivant avec le VIH suivies dans 4 cliniques différentes à travers le Canada (le Centre Universitaire de Santé McGill et la Clinique Médicale l’Actuel de Montréal, la clinique spécialisée en immunologie de Hamilton et l’Hôpital St-Paul de Vancouver).

L’équipe "Pour un cerveau en santé" se concentre aussi sur le développement d’outils qui pourraient être utilisés en clinique pour s’assurer que le temps et l’effort fournis par les participants à la recherche puissent bénéficier, dans un avenir assez proche, à la communauté de personnes vivant avec le VIH. La mesure de la cognition demeure cependant un obstacle majeur à surmonter pour une meilleure gestion de cette condition. Pour remplir ce besoin non comblé, les chercheurs ont développé un bref test informatisé (B-CAM, pour "Brief Cognitive Ability Measure") qui applique des méthodes statistiques de pointe pour évaluer la cognition au fil du temps. Une fois le test optimisé grâce à la présente étude, cet outil libre d’accès en ligne (autrement dit : gratuit !) pourra être utilisé en clinique pour mesurer les capacités cognitives en quelques minutes.

Un autre objectif de l’équipe de chercheurs est de développer des interventions qui visent à améliorer la cognition, particulièrement celles qui peuvent être facilement mises en pratique. Dans cette optique, des sous groupes participeront à des interventions spécifiques qui pourront mesurer l’impact cognitif d’un programme d’exercice physique structuré, d’un programme informatisé d’autogestion de la santé du cerveau et d’un entrainement cognitif par ordinateur.

De plus, dans une étude associée, nous voulons en savoir au sujet des difficultés que les personnes qui vivent avec le VIH éprouvent par rapport à la santé du cerveau; pour pouvoir développer des meilleurs questionnaires qui permettront de détecter ces difficultés. Toute personne vivant avec le VIH est invitée à participer. Nous voulons entendre votre expérience. Si vous voulez contribuer au développement de meilleurs moyens pour détecter les changements cognitifs en clinique, nous vous invitons à prendre 10 à 15 minutes pour compléter un sondage en ligne. (1)

Cette étude est soutenue par les Instituts de Recherche en Santé du Canada et le Réseau Canadien pour les essais VIH. Veuillez visiter notre site web pour plus d’informations.
Nous tenons à remercier les participants de "Pour un cerveau en santé" qui offrent leur temps à cet important projet qui aidera leur communauté.

(1) : Ce sondage est tout à fait anonyme. Les réponses que vous fournissez ne contiennent aucune information personnelle pouvant vous identifier. Si vous avez répondu au sondage en utilisant un identifiant quelconque pour vous permettre l’accès au sondage, rassurez-vous, cet identifiant ne sera pas enregistré avec vos réponses, il sera traité dans une base de données séparée et sera uniquement mis à jour pour indiquer si vous avez ou n’avez pas complété le sondage. Votre identifiant ne sera en aucun cas, pairé avec vos réponses au sondage.