AIDES sans frontière !

Publié par Mathieu Brancourt le 19.06.2017
5 320 lectures
Notez l'article : 
0
 
Initiativemilitantisme

A travers deux journées de discussions, ateliers et tables rondes, les militantes et militants de AIDES rassemblés à Nantes pour le Congrès national ont rebattu les cartes des combats à mener contre le VIH et les hépatites. Face à la nouvelle donne politique, nationale et internationale, l’association s’appuiera sur les réflexions apportées par toutes et tous et lancera la nouvelle mandature (pour deux ans) du président réélu, Aurélien Beaucamp. Retour s ur un week-end politique et démocratique.

Quelles frontières pour nos luttes, ici, maintenant et pour les personnes les plus exposées à l’épidémie ? C’est à cette question à la fois tactique et symbolique que les participant-e-s au congrès national de AIDES ont été invités à débattre. Samedi, ils se retrouvent en ateliers pour trouver et définir les pistes de chantiers à mener pour les deux années à venir. Temps fort démocratique, le congrès national est aussi un moment politique interne fort, où des personnalités publiques sont invitées à prendre la parole sur les défis à relever et l’action concrète qu’elles mènent sur leur territoire, qu’il soit national ou régional. Et ces défis sont nombreux.

Vendredi, l’association AIDES a ouvert son congrès par une plénière officielle, où des invité-e-s se sont succédés à la tribune. A Nantes, des élus locaux ont, comme le veut la tradition, fait le déplacement au Congrès. La ministre de la Santé, elle, n’a pas pu se rendre en Pays-de-Loire, mais a adressé un message aux militants. Dans une courte vidéo, elle a remercié "l’action précieuse de AIDES, faisant partie des acteurs qui revendiquent et alertent tout en cherchant à construire". Fraîchement nommée, Agnès Buzyn a rappelé les acquis importants du précédent quinquennat (traitement universel du VHC, PrEP), tout en déroulant un premier calendrier pour la politique de prévention de l’ère Macron : "Nous devons construire un plan d'actions publiques, en partenariat avec le président du Conseil national du sida et des hépatites virales, Patrick Yéni".

Cette femme, professeur de médecine, se déclarant très attachée à la prévention, explique qu’elle travaillera avec lui pour une "feuille de route à trois ans", d’ici à l’automne de cette année. Elle s’est félicitée de la prise en compte, toujours meilleure, des usagers dans le système de santé. Cette démocratie sanitaire est "fondamentale" selon elle, même si le combat n’est pas simple. Elle a brièvement évoqué les populations encore trop éloignées du soin et de santé, comme les personnes détenues. En creux, elle a souligné l’absence de dispositif d’accès au matériel d’injection propre, interdit dans les lieux de privation de liberté, là où la situation sanitaire est pourtant catastrophique. Le précédent gouvernement n’a pas réussi à mettre cela en place alors même que la loi le permet désormais. Agnès Buzyn conclut son message, évoquant sa fierté personnelle, mais aussi collective, que la France accueille la conférence de l’IAS (International Aids Society), en juillet prochain à Paris.

Autre intervention, très applaudie, celle de Johanna Rolland, maire de la ville Nantes, hôte du congrès. Dans un discours pugnace, elle a souligné les nombreux obstacles restants, mais aussi pointé certaines responsabilités comme celles des laboratoires et de certains pouvoirs publics dans le non-accès aux traitements dans les pays pauvres. Elle a aussi rappelé, au-delà des trithérapies pour tous, l’importance du combat contre la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH : "Nous devons garder collectivement une conscience aiguë du combat qui reste à mener. Oui, le sida est encore trop souvent sources de discrimination pour les personnes et suscite encore trop peur et rejet", a insisté Johanna Rolland, citant le rapport 2016 de AIDES sur les discriminations.

Durant les tables rondes, d’autres intervenant-e-s, qu’ils soient membres de l’association, soignants ou même partenaires ont discuté des nouvelles modalités d’action, de plaidoyer et d’alliances pour trouver de nouveaux leviers et solutions. Le samedi soir, le dernier tour d’élection du conseil d’administration s’est déroulé. A l’issue de cette élection, le président sortant, Aurélien Beaucamp, a été réélu pour un nouveau mandat de deux ans. Autour de lui, Catherine Aumond est réélue vice-présidente, Sébastien Mouveroux trésorier, et Samuel Galtié secrétaire général de l’association. En clôture, le directeur général de AIDES, Marc Dixneuf, est revenu sur le renouvellement politique sans précédent en France. Pour ne pas disparaître du paysage, en référence aux partis traditionnels, l’association doit, elle, rester en mouvement, se transformer, être en rupture, sans tomber dans la routine ni oublier d’où elle vient et pourquoi elle se bat. "AIDES a aujourd’hui une place qu’elle a conquis de haute lutte, et il va falloir la garder", souligne Marc Dixneuf. "Mais il faudra travailler avec d’autres partenaires, voisins européens et internationaux, pour tenir le rythme et faire face aux résistances. Face à cela, il faudra aussi faire pour nous, les communautés dont les militant-e-s font partie, pour continuer à avancer ensemble".

"AIDES n’a rien à craindre de ces collaborations", a ajouté Aurélien Beaucamp dans son discours de remerciements, défendant notre appartenance commune à "une autre communauté, encore plus grande, celle d’un destin et d’un objectif : un monde sans sida".