AP-HP : bisbilles, business et bazar !

Publié par jfl-seronet le 15.02.2010
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AP-HP
C'est un peu logique. Plus c'est flou, moins il y a de concertation, plus c'est le bazar. C'est très exactement ce qui se passe actuellement avec les projets de réorganisation de l'AP-HP en Ile-de-France. En parallèle, on restructure des services notamment ceux qui prennent en charge les personnes séropositives et on y annonce des milliers de suppression de postes… tout cela dans la plus grande opacité et en pleine campagne des régionales. Un cocktail détonant.

Jusqu'à présent, seuls les initiés connaissaient le professeur Jean-Yves Fagon, un des hauts responsables de l’AP-HP (Assistance publique/Hôpitaux de Paris). Ce dernier connaît actuellement son quart d'heure wharolien puisqu'il occupe le poste clé de directeur de la politique médicale à l’AP-HP. C'est lui qui est en première ligne pour expliquer (et justifier) le plan de restructuration de l’AP-HP. Vu le contexte ambiant, c'est dire s'il est exposé. Et ce d'autant qu'il fait manifestement pare-feu pour protéger le directeur de l'AP-HP Benoît Leclercq des critiques qui sont nombreuses (médecins, syndicats professionnels, associations, collectifs de patients, etc.). Le 12 février, Jean-Yves Fagon accorde une interview à "Libération". Le directeur de la politique médicale à l'AP-HP y revient assez longuement sur les raisons de la réorganisation en cours. Pour faire simple, il trouve qu'il n'est pas possible de rénover les trente-sept sites de l’AP-HP, qu'il n'est pas possible de "garder sept universités de médecine" (en lien avec des hôpitaux) et laisse entendre que la réorganisation des services VIH qui est en cours serait la conséquence d'une évolution de la prise en charge. "Dans le cas du VIH, par exemple, on n’hospitalise quasiment plus", explique t-il. Sur la question des services VIH, il confirme d'ailleurs que l'AP-HP a un projet pour l’Hôtel-Dieu au centre de Paris. "Nous avons un très beau projet. Avec un gros service d’urgence, et un grand centre de prise en charge du VIH où seront regroupés les services qui le traitaient à Cochin, à Pompidou. C’est vrai qu’il n’y aura pas d’hospitalisation conventionnelle sur le VIH à l’Hôtel-Dieu. On a besoin d’une vingtaine de lits, eh bien, il faut que les équipes se mettent d’accord pour les implanter à Cochin ou à Pompidou…

Le problème, c'est que cette réorganisation se fait en l'absence de concertation. Chacun fait son business dans son coin… Un point de vue que le directeur de la politique médicale à l’AP-HP conteste. "Quand j’entends que l’on a décidé tout à la va-vite, c’est faux. On en discute depuis deux ans. Aujourd’hui, ce qui peut étonner, c’est qu’on décide", explique Jean-Yves Fagon. Pourtant, des médecins disent que les décisions prises le sont dans le plus grand flou et sans réelle concertation des équipes. Pourtant, c'est une évidence que les personnes suivies à l'hôpital Cochin ou à l'hôpital Pompidou par exemple n'ont pas été consultées puisque que ce sont les médecins qui font part des projets de déménagements au fil des consultations. Les collectifs de patients, les associations de lutte contre le sida n'ont pas été consultées sur les projets ni même informées sur leur nature. Collectifs et associations ont d'ailleurs demandé un moratoire sur les grandes manœuvres en cours pour reprendre à zéro les projets de restructuration des services VIH d'Ile-de-France et pouvoir ainsi mettre en avant leurs demandes concernant les conditions de transferts ou de suppression de services, mais surtout le maintien d'une prise en charge optimale, ce que les projets actuels sont loin de garantir.

Dans le contexte des élections régionales, le dossier de la réforme de l'AP-HP est devenu particulièrement chaud. Candidat à sa propre succession, Jean-Paul Huchon, président PS de la région Ile-de-France, a demandé (10 février) un "moratoire" sur les suppressions de postes, tandis que la tête de liste UMP à Paris, Chantal Jouanno, s'est voulue rassurante. La ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, a indiqué qu'une décision de restructurations et de nouvelles suppressions de postes envisagées à l'AP-HP pourrait être prise en juin ou juillet, "mais encore rien n'est bouclé". Ce qui n'est pas vrai puisque la plupart des arbitrages semblent calés et font juste l'objet de réunions d'informations… avec les médecins. Il y aura bien des milliers de suppression de postes (de 3 000 à 4 000 d'ici 2012) car l'AP-HP n'a pas d'autres solutions pour être dans les clous des économies budgétaires que l'Etat lui impose. L'AP-HP veut retrouver l'équilibre budgétaire pour 2012 et elle prévoie pour ce faire un plan d'économies de 90 à 100 millions d'euros par an via des suppressions d'emplois. Jean-Paul Huchon estime que les suppressions de poste "vont se solder par une dégradation de l'offre de soins pour les Franciliens. Les exemples de l'Hôpital pédiatrique Trousseau et de l'Hôtel Dieu, deux établissements menacés de démantèlement, le montrent bien". Du côté de l'UMP, on affirme que "le plan stratégique auquel travaille actuellement l'AP-HP ne sera pas adopté avant juin prochain [ça tombe bien, c'est après les élections régionales] et il donnera lieu a une très large concertation associant personnels soignants, partenaires sociaux et associations de patients". "Aucune décision de suppression de poste n'a été prise. Aucun objectif de suppression de poste n'a été fixé au directeur de l'AP-HP. L'évolution des effectifs sera fonction du projet médical et des réorganisations qu'il impliquera", a déclaré la candidate UMP. C'est curieux, le directeur de l'AP-HP dit exactement le contraire. C'est lui-même qui a indiqué le nombre de postes concernés dans plusieurs interviews.

Pour la Ville de Paris, le dossier est éminemment sensible. Le Conseil de Paris a d'ailleurs créé un groupe de travail sur l'avenir des hôpitaux de Paris (8 février). "On crée un groupe de travail composé de conseillers de tous les groupes politiques pour discuter de la situation de l'AP-HP et les éléments de son plan stratégique pour 2010-2014", a expliqué Jean-Marie Le Guen, adjoint à la Santé et président du conseil d'administration de l'AP-HP à l'AFP. Ce groupe de travail auditionnera les organisations syndicales, la direction générale et les personnels de l'AP-HP, a-t-il précisé, en vue d'organiser en mai un débat au Conseil de Paris. C'est un peu dommage que l"élu ne mentionne pas les associations de personnes malades et les collectifs de patients, mais cet oubli sera certainement rattrapé. Parallèlement à cette initiative, plusieurs vœux [des engagement solennels du Conseil de Paris) ont été présentés et votés. En fait, chaque maire d'arrondissement monte au créneau pour son hôpital. Ainsi Dominique Bertinotti, maire socialiste du IVe arrondissement de Paris, a lancé une pétition et une mobilisation contre le "dépeçage" de l'Hôtel-Dieu qui est le plus ancien hôpital de la capitale. Le Conseil de Paris a demandé qu'il n'y ait pas de suppression de postes à l'AP-HP et le maintien de tous les services de l'hôpital Bichat (XVIIIe arrondissement).
Chaque jour, il y a une nouvelle annonce. Une chose est sûre, il faut s'attendre à ce que le paysage des services prenant en charge les personnes séropositives en Ile-de-France soit profondément et durablement chamboulé et cela sans que les personnes concernées aient leur mot à dire.

Commentaires

Portrait de sonia

jfl-seronet wrote:

. C'est un peu dommage que l"élu ne mentionne pas les associations de personnes malades et les collectifs de patients, mais cet oubli sera certainement rattrapé.  Une chose est sûre, il faut s'attendre à ce que le paysage des services prenant en charge les personnes séropositives en Ile-de-France soit profondément et durablement chamboulé et cela sans que les personnes concernées aient leur mot à dire.

 

A qui la faute?  qu'avons nous mal communiqué ? Les associations de patients comme Aides n'est elle pas présente au sein des delegations COREVIH? Les collectif des usagers ne sont ils pas des acteurs de terrain qui informent les patients  ?

Seulement, les champs de la Prevention et de l'Education thérapeutique qui par définition ne sont ni un acte ni un soin rémunérateur, qui va les financer? Faudra-t-il agiter la peur et la recrudescence de nouvelles contaminations pour que les pouvoirs publics s'en émeuvent ? Récemment, un député de l'UMP a proposé la mise à disposition de tests de depistage rapide en vente libre , sans s'inquieter de l'accompagnement, santé , estime de soi, prévention positive !!! je finis par penser qu'on nous prend encore pour des cons , à tous les coups....sauf qu'à présent, ce sont sûrement les laboratoires , producteurs et fournisseurs de medicaments qui vont faire le nouveau jeu de la prévention....

Portrait de HumblePenguin

Les associations se sont trop longtemps contentées des bribes de pouvoir que les gouvernements leur jetaient de temps en temps. Elles sous-estiment chroniquement la représentation des séropositifs par la droite actuelle fascinée par le fascisme. * Pour eux nous sommes des ennemis de l'état et de la nation, des créatures qui devraient au moins se taire, mais ça arrangerait tout le monde si l'on était morts! ça ressemble à la crise grecque, c'est les retraités et les malades qui vont payer la facture d'une gestion économique absurde.