ARV en injectable : tout savoir !

Publié par Fred Lebreton le 26.11.2021
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ThérapeutiqueARV injectables

Le 22 novembre, Actions Traitements organisait son premier webinaire sur le thème « VIH & innovations thérapeutiques, vers une révolution ». L’occasion de présenter le nouveau traitement à longue durée d’action (long acting) qui arrive en décembre en France. Explications.

Ce webinaire était animé par deux membres du conseil d’administration d’Actions Traitements, la Dre Anne Simon et Yves Ferrarini. Il était proposé sous la forme d’une table ronde avec quatre experts-es de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH (PVVIH) en France : le Dr Romain Palich (infectiologue, Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris) ; Cynthia Lacoux (chargée de mission Secteur recherche communautaire à AIDES), la Dre Julie Langlois (pharmacienne, Hôpital Sud Seine et Marne) et Marc Frémondière (cadre infirmier, centre de santé Le 190). Alors ce nouveau traitement injectable à longue durée ? Seronet vous dit tout !

C’est quoi ?

C’est une bithérapie à base de deux molécules le cabotegravir (nom commercial Vocabria - laboratoire ViiV Healthcare) et la rilpivirine (nom commercial Rekambys - laboratoire Janssen).

C’est quand ?

Le traitement doit arriver, début décembre, dans toutes les pharmacies françaises.

C’est pour qui ?

Ce traitement est destiné à toutes les personnes vivant avec le VIH qui ont une infection contrôlée. Il est contre-indiqué chez les personnes dont la souche de VIH a connu des résistances et/ou des échecs thérapeutiques et chez les personnes sous traitement anti-coagulants. Il n’est pas recommandé chez les femmes enceintes (par manque de données pendant les essais). Un point de vigilance est souligné chez les personnes obèses ou en surpoids. Le traitement n’est pas contre-indiqué chez ces personnes, mais une surveillance est préconisée car les rares échecs survenus lors des essais se sont produits chez des personnes avec un IMC (indice de masse corporelle) élevé. Le Dr Romain Palich a insisté sur la nécessité d’en parler avec son infectiologue. Cette décision est avant tout basée sur l’histoire virologique et thérapeutique de la personne et chaque cas est particulier.

Comment ?

Marc Fremondière parle de « séquence » d’injections car à chaque rendez-vous, deux injections ont lieu. Une injection intra-musculaire dans chaque fesse (ne pas mélanger les produits dans la seringue et ne pas masser la peau, c'est ce qui provoque les nodules). Au début du traitement, deux séquences d’injections ont lieu à un mois d’intervalle, puis une séquence tous les deux mois. Les trois premières séquences doivent avoir lieu en milieu hospitalier puis la personne peut continuer en ville avec un-e infirmier-ère de son choix. Donc en résumé, trois rendez-vous hospitalier en quatre mois puis tous les deux mois en ville.

Si on manque un rendez-vous ?

Pas de panique. Une fenêtre de flexibilité de sept jours est possible en cas de rendez-vous manqué et un relai en comprimés oraux est possible en cas de longs voyages. En effet, cette bithérapie existe à la fois en produit injectable et en comprimés.

Quels effets indésirables ?

Des petites douleurs sont possibles au moment de l’injection (surtout avec le Rekambys - rilpivirine) avec parfois des réactions locales (nodules, petites boules sur le point d’injection) pendant deux à trois jours. L’anesthésie locale est contre-indiquée. Moins d’effets indésirables digestifs sont constatés comparativement à la prise de comprimés quotidiens.

Comment trouver un-e infirmier-ère ?

Vous pouvez demander conseil à votre infectiologue ou votre pharmacien-ne. Les laboratoires qui commercialisent ce nouveau traitement sont en train de travailler sur la mise en place d’un réseau de soignants-es en ville pour faciliter le parcours de soin des personnes qui souhaitent passer en traitement injectable.

Quel suivi ?

Pas de différence avec un suivi « classique » d’une infection à VIH. Un bilan sanguin tous les six mois pour vérifier la charge virale et les CD4 (entre autres). N’hésitez pas à demander un bilan intermédiaire tous les trois mois pour les IST si vous avez plusieurs partenaires.

Quel recul ?

L’efficacité de cette nouvelle bithérapie a été démontrée dans plusieurs études présentées dans les congrès internationaux consacrés à la recherche sur le VIH depuis plusieurs années. Notamment les études Latte-2, Flair (personnes n’ayant jamais pris de traitements anti-VIH) et Atlas (personnes ayant déjà pris des traitements anti-VIH).

Ce webinaire a été capté et sera prochainement mis en ligne sur la page You Tube de Actions Traitements.

Une enquête de AIDES
Lors de ce webinaire, Cynthia Lacoux (Secteur recherche communautaire à AIDES) a présenté les premiers résultats de l’enquête réalisée par l’association, dont l’objectif est de mieux comprendre ce que les personnes vivant avec le VIH pensent de cette nouvelle proposition thérapeutique, d’identifier les réticences et les craintes et de déterminer les bénéfices qu’elles attendent (enquête réalisée en complète indépendance de l’industrie pharmaceutique). Au total, 581 personnes ont répondu à ce questionnaire entre juillet et fin octobre 2021, plus un focus groupe de 14 personnes pendant les Universités des personnes séropositives (octobre 2021 en Hauts-de-France). Dans ces 581 personnes, nous trouvons une majorité d’hommes (79 %), 462 personnes nées en France (80 %), une moyenne d’âge de 52 ans et une année de découverte de l’infection à VIH avant 2005 pour 50 % des répondants-es. Par ailleurs, 48 % des personnes se disent très intéressées par ce nouveau traitement en injectable et 30 % sont assez intéressées. Au niveau de la confiance, 79 % des personnes se disent beaucoup et assez confiantes (respectivement 33 % et 47 %). La piqûre n'est pas un frein pour 65 % des répondants-es qui n’en ont pas du tout peur. Le frein principal identifié dans cette enquête est le déplacement à l’hôpital qui est contraignant pour 44 % des répondants-es. En conclusion, Cynthia Lacoux explique que cette enquête indique un besoin existant pour cette nouvelle forme thérapeutique, mais elle rappelle un élément important « sans adhésion des personnes il n'y a pas de révolution ».