Assurances, emprunt : le bilan de Santé Info Droits

Publié par jfl-seronet le 16.01.2016
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Droit et socialAerasempruntassurance bancaire

L’Observatoire du Ciss (Collectif interassociatif sur la santé) sur les droits des malades 2014 comporte une partie consacrée à l’accès à l’emprunt et aux assurances. C’est le quatrième sujet de sollicitations de la ligne Santé Info Droits du Ciss. En 2014, les questions relatives à l’emprunt et aux assurances sont en légère baisse par rapport à 2013, mais frôlent tout de même le seuil des 1 000 sollicitations.

Lorsqu’on regarde l’évolution des demandes concernant Santé Info Droits ces sept dernières années sur ce sujet, on passe de 714 demandes en 2007 à 994 demandes en 2014. Le pic était atteint en 2013 avec 1 046 demandes. Les "questions portant sur l’accès à l’emprunt et aux assurances s’inscrivent dans un environnement législatif singulier souvent peu protecteur envers les personnes malades ou l’ayant été", explique le rapport de Santé Info Droits. "La logique assurancielle reposant par définition sur l’évaluation du risque et donc sur la sélection, c’est donc bien de la discrimination — fût-elle légale — que sont confrontées les personnes" qui sollicitent la ligne.

La convention Aeras

Un processus conventionnel, la convention Aeras (s’assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé), a été mis en place en 1991 pour, selon l’expression de Santé Info Droits, "contenir un environnement juridique souvent perçu comme hostile" par les usagers. La convention Aeras a été signée par des représentants des banques, des assurances, des associations de personnes malades et l’Etat. Son objectif est de faciliter l’accès à l’assurance et aux prêts par le biais de multiples mécanismes. Comme le précise le rapport 2014 de Santé Info Droits, le champ d’application de cette convention concerne les assurances couvrant les prêts immobiliers, les prêts à usage professionnel et les prêts à la consommation — ce qui représente plus de 75 % des sollicitations relatives à cette thématique. Selon les chiffres du rapport :
- 70 % concernent les assurances et prêts immobiliers
- 1,6 % concerne les assurances et prêts à usage professionnel
- 5 % concernent les assurances et prêts à la consommation
- 15,1 % les assurances complémentaires prestations en espèce
- 8,3 % les assurances diverses (voyage, rapatriement, vie, perte d’autonomie).

Les motifs de sollicitations

Les sollicitations reçues en matière d’information sont environ trois fois sur quatre des demandes faites en amont du projet et sont le fait de personnes candidates à l’emprunt confrontées ou ayant été confrontées à la maladie et anticipant les difficultés de concrétisation de leur projet. Le quart restant des sollicitations porte précisément sur des "difficultés d’accès à l’emprunt et à l’assurance qui pouvaient être pressenties" par les personnes candidates recherchant des informations générales. Si on prend les données de 2014 : environ 75 % des sollicitations portaient sur une demande d’informations générales concernant l’accès à l’emprunt et à l’assurance et environ 25 % des demandes faisaient part de difficultés dans l’accès à l’emprunt et à l’assurance.

Sur quoi portent les difficultés ?

Selon les données du rapport 2014, le refus pour raisons médicales arrive dans un peu de plus de 58 % des cas. Suivent : un problème concernant l’existence et l’étendue de la garantie invalidité (12,6 %), un taux de surprime considéré comme excessif par l’assuré (8,6 %), un refus de la banque en raison du caractère partiel de la garantie proposée (4,6 %), un défaut de motivation de refus (4,6 %), un refus de garantie alternative (4 %), un ajournement (3,3 %), etc. Comme l’indique le rapport 2014, une majorité de ces appels concerne donc "des assurés confrontés à des refus assuranciels, des exclusions de garanties ou bien encore à des surprimes prohibitives". La difficulté est d’autant plus importante, avance le rapport 2014, que cela ne relève pas spécialement d’une mauvaise application de la convention Aeras puisque la dite-convention "n’instaure en aucune manière un droit à l’assurance". Autrement dit, ce n’est pas parce que la convention Aeras existe qu’elle ouvre dans tous les cas l’accès à l’emprunt ou à l’assurance. Dans son rapport 2014, Santé Info Droits explique qu’une "très grande proportion des sollicitations intervient au moment de la souscription du contrat". Reste qu’environ 10 % des questions "font apparaître des difficultés de mise en jeu de garantie une fois l’emprunt en cours et le contrat d’assurance en application". Ce qui pose problème se sont les fausses déclarations avérées ou supposées dans les questionnaires de santé remplis par les assurés à la souscription du contrat. La question est devenue si sensible que le rapport 2014 rappelle quelques principes concernant ces questionnaires.

Les questionnaires de santé

Ces principes sont annexés à la convention Aeras :

- Les établissements de doivent veiller à ce que le candidat à l’assurance, lorsqu’il est présent dans les locaux de l’agence bancaire, prenne seul connaissance des dispositions et questions figurant dans le questionnaire de santé
- Il doit être proposé à l’assuré de le remplir seul soit sur place soit à son domicile ;
- Toutefois, à sa demande, le client peut être assisté par son interlocuteur pour remplir le questionnaire ;
- Les questions posées doivent être précises et porter sur les événements relatifs à l’état de santé.

Le problème, note Santé Info Droits, c’est que certaines questions sont imprécises voire insécurisantes. Par exemple l’absence de limites dans le temps de certaines questions posées est susceptible d’entraîner des difficultés. Comme l’explique le rapport 2014, les signataires de la convention Aeras ont harmonisé la formulation des questions intégrées dans les questionnaires de santé de 1er niveau. Les représentants des assurances ont accepté de limiter dans le temps les questions posées. Ainsi les questionnaires de santé de 1er niveau ne doivent, en théorie, plus porter sur un historique médical allant au-delà de quinze ans en ce qui concerne les prises en charge au titre d’une ALD et de dix ans pour les arrêts de travail et les prescriptions de traitements médicaux.

D’autres évolutions ont récemment eu lieu : le droit à l’oubli. Elles permettent notamment aux personnes atteintes d’un cancer il y a plus de quinze ans de ne plus avoir à déclarer cet événement. Il est "prévu que les questionnaires de santé devront très clairement mentionner que les personnes concernées pourront ne pas indiquer ces informations anciennes et qu’en tout état de cause, les assureurs ne pourraient tenir compte des éléments en lien avec cet événement qui aurait éventuellement été porté à leur connaissance".

Aeras : les questionnaires de santé
Il existe deux types de questionnaires de santé, explique le site de la convention Aeras : le questionnaire simplifié (ou 1er niveau) et le questionnaire détaillé par pathologie.
- Le questionnaire simplifié comprend une série limitée de questions simples (entre dix et quinze questions). Il correspond au niveau 1 d’assurance. Vous pouvez le remplir seul, sans difficulté.
- Le questionnaire par pathologie est plus détaillé. Il correspond à l’examen des demandes de niveaux 2 et 3.

Le rôle de votre médecin : il peut vous aider à remplir un questionnaire de santé simplifié. Mais il n’appartient qu’à vous de le signer et de prendre ainsi la responsabilité des réponses apportées. Si l’assureur vous demande de remplir un questionnaire détaillé, dans la mesure où il est plus technique, le médecin en charge des soins pour la pathologie concernée peut y  répondre. Dans ce cas, le questionnaire vous sera remis en main propre et vous devrez l’adresser vous-même au médecin conseil de la compagnie d’assurance.
Les questionnaires de santé que les assureurs vous donneront à remplir, ainsi que les clauses générales de votre contrat d’assurance, respecteront les dispositions sur le "droit à l’oubli".

A savoir : La formulation des questions relatives aux arrêts de travail et à la prescription d’un traitement médical, à la prise en charge au titre des affections de longue durée (ALD), à l'invalidité et à l'allocation pour adulte handicapé (AAH), a été harmonisée. La question relative à la prise en charge au titre d’une ALD porte au maximum sur les quinze dernières années. La question relative aux arrêts de travail ainsi qu'à la prescription d’un traitement médical, porte sur des durées de plus de vingt-et-un jours et au maximum, sur les dix dernières années. Le délai de mise à jour des questionnaires de santé à la suite d’une modification de la grille de référence par pathologies ne peut excéder trois mois.

Droit à l’oubli : l’avenant de septembre 2015
Depuis sa création en 1991, la convention Aeras a été largement modifiée en 2001 puis 2006, puis 2011. La dernière modification d’ampleur date de 2015.
Un nouvel avenant à la convention Aeras a été signé le 2 septembre 2015. Il introduit le "droit à l’oubli". Celui-ci regroupe deux dispositifs :
- Absence de déclaration : les anciens malades du cancer ont la possibilité, passé certains délais, de ne pas le déclarer lors de la souscription d’un contrat d’assurance emprunteur et, en conséquence, de ne se voir appliquer aucune exclusion de garantie ou surprime du fait de ce cancer.
- L’élaboration d’une grille de référence listant les pathologies (pathologies cancéreuses et autres pathologies, notamment chroniques) pour lesquelles l’assurance sera accordée aux personnes qui en ont souffert ou en souffrent, sans surprime, ni exclusion de garantie, ou dans des conditions se rapprochant des conditions standard, après certains délais adaptés à chacune de ces pathologies. Cette grille sera établie et actualisée au rythme des progrès thérapeutiques et de la disponibilité des données de santé nécessaires.