Covid-19 et personnes migrantes

Publié par Rédacteur-seronet le 31.03.2020
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Les associations n'ont pas ménagé leurs efforts pour éviter les problèmes et les difficultés rencontrés par les personnes migrantes/étrangères, notamment en proposant des amendements à la loi d'état d'urgence sanitaire, récemment adoptée pour deux mois. Les associations, dont l'Observatoire du droit à la santé des étrangers-ères, avaient identifié un certain nombre d'enjeux concernant le droit au séjour et l'accès à la santé des personnes étrangères.

Ce qu'ont demandé les associations

Concernant l'accès à la santé, les mesures de confinement adoptées imposent de simplifier les démarches d'ouverture et de renouvellement des droits à la protection maladie. Les associations partenaires membres de l'Observatoire du droit à la santé des étrangers-ères (ODSE) ont demandé à Olivier Véran, ministre de la Santé :

- la prolongation automatique de trois mois des droits ouverts : assurance maladie, exonération de ticket modérateur, complémentaire santé solidaire, aide médicale d'État...
- concernant l'ouverture de nouveaux droits : la simplification des procédures et la mise en place d'un mécanisme de « présomption des droits » (déclaration par le-la requérant-e de son identité, de sa résidence en France et des ses ressources, valable pour une période de trois mois), ainsi que l'envoi des attestations de droits par voie postale et/ou par SMS.

Concernant le droit au séjour, la fermeture des frontières extérieures de l'Union européenne et de l'espace Schengen appelle les autorités publiques à prendre un certain nombre de mesures. Les associations soutiennent les prises de positions de leurs partenaires institutionnels (le contrôleur général des lieux de privation de liberté notamment) et associatifs :

- l'absence de mise en œuvre des mesures d'éloignement vers les pays d'origine et la délivrance de titres de séjour provisoires ;
- l'enregistrement des demandes d'asile des personnes étrangères dublinées ;
- la libération immédiate des étrangers-ères retenus-es en centre de rétention administrative, d'autant plus urgentes que les conditions de rétention font peser sur elles un risque de contamination très important.

Par ailleurs, les mesures de confinement et les limitations d'accès aux services publics nécessite également :

- la généralisation à l'ensemble du territoire de la décision de la préfecture de police de Paris de prolonger de trois mois la durée de validité des titres de séjour actuellement en circulation ;
- la fin des assignations à résidence (pointage au commissariat ou à la préfecture) pour éviter les risques de contamination des personnes concernées ;
- la mise en place de procédures postales et dérogatoires pour les premières demandes et renouvellement de titres de séjour, ainsi que l'envoi d’attestation papier et/ou de SMS pour les récépissés.

Des demandes équivalentes ont été faites auprès du ministre de l'Intérieur, puisque nombre de questions sont directement de son ressort.

Mesures exceptionnelles prises et en cours

À la suite de l'adoption de la loi sur l'état d'urgence sanitaire par le Parlement, des mesures exceptionnelles concernant le séjour et la santé des personnes étrangères sont acquises, d'autres sont en cours.

Une ordonnance relative à la prolongation des droits sociaux a été publiée. Elle contient un certain nombre de mesures défendues par les associations partenaires au sein de l'Observatoire du droit à la santé des étrangers-ères (ODSE) :

- Prolongation automatique de trois mois des droits expirant entre le 12 mars et le 21 juillet pour : l'aide médicale d'État (AME) ; la Complémentaire Santé solidaire (CSS, ex-CMU-C) ; l'aide au paiement d'une complémentaire santé (ACS). L'Assurance maladie est implicitement maintenue pendant la période de prolongation des droits à la CSS et du contrat de complémentaire santé (ACS).
- Simplification de l'ouverture de nouveaux droits à l'AME, avec la dérogation à l'obligation de se présenter physiquement au guichet pour déposer sa demande, jusqu'au 31 juillet. Le ministère de la Santé a informé les associations que la réduction de 12 à 2 mois du maintien de droits à l'Assurance maladie après une mesure d'éloignement, prévue par la réforme 2019, serait repoussée à la fin de la période d'urgence sanitaire. Les associations continuent à se mobiliser pour la suppression de cette disposition particulièrement préjudiciable pour l'accès à la santé des personnes étrangères.
- Une ordonnance concernant la prolongation de la durée des documents de séjour a été publiée. Face à la fermeture des guichets des préfectures, elle prévoit la prolongation automatique de trois mois de la durée de validité des documents de séjour suivants expirant entre le 16 mars et le 15 mai : visas de long séjour ; titres de séjour, à l'exception de ceux délivrés au personnel diplomatique et consulaire étrangers ; autorisations provisoires de séjour (APS) ; récépissés de demandes de titres de séjour ; attestations de demande d'asile.

AIDES et ses partenaires restent mobilisés-es pour obtenir les avancées suivantes face aux mesures de confinement et de limitations d'accès aux préfectures :

- la prolongation automatique de trois mois aux documents de séjour expirés avant le 16 mars et qui n'ont pas pu être renouvelés ;
- la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour pour les personnes qui devaient déposer une première demande de titre de séjour durant la période ;
- la fin des assignations à résidence (pointage au commissariat ou à la préfecture) pour éviter de soumettre les personnes concernées à des risques de contamination.

 

La loi sur l'état d'urgence sanitaire
Le projet de loi d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 a été déposé au Parlement le 18 mars. Suivant une procédure accélérée, il a été adopté le 22 mars, promulgué le 23 et publié au Journal officiel le 24. C'est particulièrement rapide, inédit presque. On trouve dans ce texte deux types d'articles : des mesures inscrivant dans la loi un « état d'urgence sanitaire » à partir 25 mars et pour une durée de deux mois ; des mesures autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnances, dans des délais allant d'un à quatre mois à partir d’aujourd’hui, en lien avec l'urgence économique et l'adaptation à la lutte contre le Covid-19.
L'état d'urgence est une mesure exceptionnelle, décidée en conseil des ministres, initialement prévue en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public, ou en cas de catastrophe naturelle. Le projet de loi adopté le 22 mars prévoit d'étendre l'état d'urgence aux « cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ». Il permet au Premier ministre de prendre par décret des mesures restreignant les libertés individuelles, notamment pour : interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé ; réquisitionner les biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire ; prendre toute mesure permettant la mise à disposition des patients de médicaments appropriés pour l’éradication de la catastrophe sanitaire. Lorsque l'état d'urgence sanitaire est déclaré, un comité de scientifiques est réuni sans délai et pour une durée strictement égale à celle de l'état d'urgence. Il rend des avis publics sur « l’état de la catastrophe sanitaire, les connaissances scientifiques qui s’y rapportent et les mesures propres à y mettre un terme [...] ainsi que sur la durée de leur application ».


Des ressources utiles
Vidéos explicatives sur le coronavirus en plusieurs langues (Bengali / Bambara / Mandingue / Tigria / Wolof / Arabe / Somali / Français / Urdu / Dari / Pashto / Kurde).
Explications sur le confinement en plusieurs langues (partagé par Paris d’Exil).
Infos sur les déclarations du président de la République du 16 mars en plusieurs langues (partagé par le Baam).
Affiches sur gestes barrières en plusieurs langues.
Attestations de circulation en plusieurs langues.
Infos en anglais de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur le coronavirus et les mesures barrières.
Des messages de prévention ont été édités par Banlieue santé en LSF, roumain, arabe littéraire, dialectique algérien, chaoui, portugais, soninké, peulh et d'autres langues.