Croi 2014 : la fin du sida passe par la fin de la guerre contre les drogues

Publié par Renaud Persiaux et Emmanuel Trénado le 06.03.2014
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Produitsdrogueséchange de seringues

En plénière de la Croi 2014, mardi 4 mars au matin, Adeeba Kamarulzaman, de l’université de Kuala Lumpur en Malaisie, a donné une présentation générale sur l’état des connaissances concernant l’épidémie de VIH/sida chez les usagers de drogues injectables qui a fait froid dans le dos.

Les programmes d’échange de seringues et les programmes de substitution ont démontré au cours des trente ans de l’épidémie de VIH/sida leur grande efficacité à réduire le nombre de nouvelles infections.

Et pourtant, malgré ces données scientifiques indéniables un nombre limité d’usagers dans le monde a accès à ces programmes : seulement 8 % des usagers ont accès aux programmes de substitution, et, en moyenne seulement, deux seringues sont distribuées par personne usagère et par mois.

Certains pays ont étendu leurs programmes de réduction des risques comme la Chine et le Vietnam, d’autres maintiennent le statu quo (comme les Etats-Unis où il est toujours interdit d’utiliser des fonds fédéraux pour les programmes d’échange de seringues). D’autres réduisent l’accès au matériel de prévention, augmentent les arrestations, c’est le cas en particulier de la Russie.

Des sous-groupes négligés

Adeeba Kamarulzaman rappelle aussi que certains usagers connaissent des situations de vulnérabilité sociale plus importantes. Il s’agit en particulier des femmes et des transgenres qui ont en moyenne un recours plus difficile aux différents programmes qui ne sont pas pour la plupart adaptés à leurs besoins spécifiques.

Un autre sous-groupe est mal connu, mais il est certainement très exposé au risque d’infection par le VIH. Il s’agit des adolescents. On estime par exemple qu’au Népal, 20 % des usagers sont des adolescents.

L’injection de drogue par voie intraveineuse concerne aussi un nombre encore indéterminé de gays (hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes). Plusieurs récentes publications, dont celles de AIDES sur le Slam rapportent ce nouveau phénomène. Se pose ici aussi la question de fournir des services et programmes adaptés à ces usagers.

L’impact de la criminalisation

L’emprisonnement empêche trop souvent, comme c’est le cas en France, les usagers d’avoir accès aux programmes d’échange de seringues ce qui augmente le risque d’infection par le VIH, mais aussi les hépatites.

Enfin, Adeeba Kamarulzaman termine en rappelant que la guerre contre les drogues telle qu’elle est conduite aujourd’hui est un immense échec et empêche les usagers de prendre soin d’eux. Elle prend l’exemple du Portugal qui a décriminalisé l’usage (et non pas la vente) de toutes les drogues ce qui a permis une baisse significative des nouvelles infections.

La conclusion de cette universitaire est sans appel : "Un monde sans sida ne sera possible que si on met un terme à la guerre contre les usagers de drogues".

Commentaires

Portrait de Felix77

Tant que la guerre contre le mal être, la violence, la discrimination, la misère et la guerre elle même ne seront pas vaincu