Croi 2014 : Zoom sur la transmission verticale et la prise en charge pédiatrique

Publié par Renaud Persiaux et Emmanuel Trénado le 07.03.2014
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Thérapeutiquetransmission verticalemère-enfant

Mercredi matin, à la Croi 2014, plusieurs sessions de présentation des résumés scientifiques sélectionnés ont fait l’objet de présentations orales. Le sujet de la prévention de la transmission de la mère à l’enfant (dite transmission verticale), de la prise en charge pédiatrique a été sélectionné par les organisateurs de la conférence et a permis à une dizaine de chercheurs de partager leurs résultats.

Le VIH principale cause de décès au moment de l’accouchement

Coceka N. Nmyani (Anova Health Institute de Johannesburg, Afrique du Sud) a recensé les causes de décès de 590 femmes enceintes au cours de la période 1997 - 2012. Malgré l’amélioration de l’accès au traitement ARV en Afrique du Sud, la principale cause de décès de ces femmes au moment de l’accouchement reste l’infection à VIH. Un nombre important d’entre elles ne prenaient pas d’antirétroviraux alors que leur état de santé le demandait.

Améliorer le dépistage pendant la grossesse ?

Une équipe kenyane a tenté de mesurer l’incidence de l’infection à VIH (le nombre de nouvelles infections) chez les femmes enceintes de deux hôpitaux de la région Ouest du Kenya en utilisant un test de mesure d’infection récente. 1 305 femmes enceintes ont participé à l’étude. Elles étaient séronégatives, et ont été suivies 9 mois après l’accouchement. Parmi ce groupe de femmes, 24 ont contracté le VIH pendant la période de l’étude. Les auteurs de la recherche concluent qu’il faudrait proposer tout au long de la grossesse et après l’accouchement un dépistage fréquent du VIH pour mettre en place rapidement un traitement antirétroviral.

Prise en charge des femmes enceintes séropositives qui vont allaiter

Plusieurs études ont mis en avant de nouvelles informations potentiellement utiles dans la prise en charge des femmes enceintes séropositives qui vont allaiter leur enfant. La première montre que les traitements à base de Sustiva ou à base de Kaletra sont comparables en termes d’efficacité pour contrôler l’infection à VIH et réduire de manière très significative la transmission verticale (de la mère à l’enfant). Une autre étude, ANRS 12174, PROMISE-PEP, montre que l’administration d’Epivir ou de Kaletra aux bébés nés de mères séropositives qui ne prennent pas de traitement ARV réduit le risque de transmettre le virus au cours de l’allaitement.

Un effet du ténofovir sur les os du bébé

Une équipe américaine a démontré que les enfants nés de mamans séropositives qui prenaient le ténofovir dans leur trithérapie (ce médicament est un des composants de nombreuses trithérapies comme Atripla) avait une densité osseuse significativement moins importante que les bébés nés de mamans séropositives qui ne prenaient pas ce traitement. Cette information ne remet actuellement pas en cause l’utilisation de ce médicament chez la femme enceinte, même si nous ne savons pas encore les conséquences sur le développement du squelette de ces enfants.

Traitement précoce et réservoir VIH

La cohorte américaine des enfants séropositifs a tenté d’explorer les différences en termes de quantité de VIH stocké dans les réservoirs du système immunitaire entre trois groupes d’enfants : ceux traités dans leur première année de vie, ceux traités entre l’âge de 1 et 5 ans et enfin ceux qui ont commencé la trithérapie après 5 ans. Les enfants du premier groupe ont significativement moins de VIH stocké dans les réservoirs.

Passer de Kaletra à Sustiva après Viramune

Une étude a été menée en Afrique du Sud chez des enfants séropositifs qui avaient été exposés à la névirapine (pour réduire le risque d’infection par le VIH lors de la naissance) au moment de l’accouchement et qui prennent généralement après un traitement à base de Kaletra. Les chercheurs voulaient démontrer qu’il était peut-être possible de proposer à ces enfants un changement pour un traitement à base de Sustiva (plus facile à prendre). Le Sustiva est un médicament de la même famille que Viramune (névirapine), mais il n’était pas certain qu’il soit efficace dans ce cas. L’étude comparait deux groupes d’enfants, ceux qui continuaient le traitement à base de Kaletra et ceux qui changeaient pour Sustiva. Les résultats montrent qu’il est possible et sans risque de proposer ce changement. Il semble ainsi que la période de traitement par Kaletra ait permis de resensibiliser le virus à Sustiva.

Pas de Kaletra en une prise par jour pour les enfants

Une autre étude chez les enfants infectés par le VIH en traitement à base de Kaletra a essayé de montrer qu’il serait possible d’administrer le Kaletra en une prise par jour (comme les adultes) au lieu de deux. Les résultats ne sont pas encourageant, le Kaletra en une prise par jour est moins efficace que le Kaletra en deux prises par jour chez l’enfant.

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Portrait de basique

Autres résultats encourageants, ceux publiés dans The New England Journal of Medicine par une équipe d’immunothérapeutes de l’université de Pennsylvanie. En modifiant génétiquement des cellules immunitaires, appelées lymphocytes T, ils ont créé une résistance naturelle au virus du SIDA. La reproduction de cette mutation génétique présente chez seulement 1 % de la population empêcherait ainsi le VIH de pénétrer dans les cellules immunitaires. Selon ces chercheurs, la modification des lymphocytes T est un pas supplémentaire vers la suppression des traitements par antirétroviraux. Les plus optimistes parlent même d’une forme de guérison.