Droit au séjour pour soins : Touraine faussement rassurante

Publié par jfl-seronet le 26.01.2015
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Droit et socialdroit au séjour pour soinsloi immigration 2015

Le gouvernement a pour projet de faire une nouvelle loi sur l’immigration. Cette dernière qui devrait arriver en débat en 2015 prévoit une évolution des procédures administratives concernant le droit au séjour des étrangers pour raison médicale (ou DASEM). Ce sujet est très délicat et a fait l’objet de passes d’armes parlementaires virulentes lorsque ce droit a été considérablement attaqué dans la loi Besson, en juin 2011. Les évolutions envisagées, pas très rassurantes, ont amené la députée (PC) Jacqueline Fraysse, a interpellé la ministre de la Santé, Marisol Touraine, à ce sujet le 13 janvier dernier dans le cadre des questions au gouvernement.

S’adressant à Marisol Touraine,  Jacqueline Fraysse explique : "Si nous nous réjouissons que vous résistiez aux assauts répétés de la droite contre l’aide médicale d’Etat (AME), nous sommes en revanche inquiets de l’évolution des procédures administratives concernant le droit au séjour des étrangers pour raison médicale. En effet, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales daté de 2013 souligne des disparités importantes, voire des irrégularités, dans le traitement des dossiers "Etrangers malades", qui sont "génératrices d’inégalités de traitement injustifiables selon le lieu de dépôt de la demande". Celles-ci sont notamment dues au "manque d’instructions précises aux préfets". Cette question relevant conjointement du ministère de l’intérieur et du vôtre, pouvez-vous nous dire quelles dispositions ont été prises pour que la loi soit appliquée de façon identique sur tout le territoire ?"

Revenir sur la loi Besson de 2011

Cela, c’est pour le premier point de l’interpellation, l’autre concerne la loi Besson de juin 2011. Cette loi a modifié les conditions permettant d’obtenir un titre de séjour pour raison médicale. "Alors qu’auparavant il fallait qu’il ne soit pas possible, pour le malade, de bénéficier effectivement, dans son pays d’origine, d’un traitement adapté, il faut désormais que le traitement y soit totalement indisponible. Cela signifie que si ce traitement existe quelque part dans le pays d’origine, même si son prix est inaccessible, même si c’est à des centaines de kilomètres du domicile du malade, le titre de séjour ne sera pas accordé", détaille la députée. "Vu que notre seule boussole est de répondre aux exigences médicales dans l’intérêt de ces personnes, nous vous demandons de revoir, et peut-être d’abroger, ces dispositions de la loi de 2011 et de revenir aux dispositions précédentes, qui étaient beaucoup plus humaines". Et Jacqueline Fraysse de demander à la ministre si elle partage "ces constats et ces préoccupations" et si elle est disposée à modifier la loi, notamment dans le cadre du projet de loi immigration du gouvernement.

Marisol Touraine… ne nous dit pas tout !

C’est un peu la loi du genre dans les échanges à l’Assemblée dans le cadre des questions au gouvernement, les ministres répondent assez souvent par des formules enrobées, parfois convenues, qui en font des tonnes… Lors de cet échange, Marisol Touraine a ainsi soigneusement évité de répondre au premier point abordé par Jacqueline Fraysse et a tenté d’endormir son monde avec des formules du genre : "le droit des étrangers malades est un symbole fort pour notre pays et pour notre République, pour notre capacité à soigner chaque malade sur notre territoire". Le problème, c’est que l’interpellation de la députée dit que cette vision béate n’est pas la réalité. La ministre indique qu’une "circulaire" a été adressé aux agences régionales de santé et aux préfectures, pour rappeler à chacune leur rôle, notamment l’exigence absolue de respect du secret médical en toutes circonstances". Il faudra se contenter de cela.

RAS sur le transfert… vraiment ?

Puis vient le passage sur la future loi Immigration. "Un projet de loi relatif au droit des étrangers en France sera examiné prochainement au Parlement. Il fait évoluer la procédure applicable, d’abord en assouplissant les critères d’accès à ce droit, ensuite en instaurant un titre pluriannuel pour soins, ce qui représentera une nouveauté tout à fait importante", précise la ministre. "Par ailleurs, dans la gestion et l’évaluation des cas, le ministère chargé de la Santé aura une place centrale, puisque l’indépendance des professionnels rendant un avis médical vis-à-vis du service qui examine les demandes sera garantie. Le ministère de la Santé fixera par ailleurs les orientations pour l’organisation des avis médicaux, et la transparence de la procédure sera garantie, y compris en octroyant une place aux associations de défense des étranges malades. Vous le voyez, madame la députée, nous sommes mobilisés pour faire évoluer ce droit en garantissant les droits de chacun". Sur le papier, tout semble y être le regard du ministère de la Santé, la place aux associations… Très curieusement, la ministre ne mentionne pas le grand changement envisagé dans le texte : le transfert de l'évaluation médicale — un élément décisif pour les personnes étrangères malades — des médecins des ARS aux médecins de l'OFII (Office français de l'immigration et de l'intégration). Autrement dit, cette expertise passerait de la tutelle du ministère de la Santé à celle du ministère de l'intérieur puisque l’OFII en dépend. La crainte résiderait alors dans le passage vers une médecine de contrôle qui n’aurait rien à voir avec une médecine de santé publique... C’est curieux que la ministre n’en dise rien.
Plus d’infos sur le site de l’ODSE.

Commentaires

Portrait de Chrisplus

j'aurai, sur le sujet, une petite queston simple, tres basique, et peut-être derangeante !! OU TROUVE T'ON L'ARGENT POUR PAYER LES SOINS AUX PERSONNES ETRANGERES ??

Portrait de frabro

C'est le jeu principal des droites françaises que de chercher des boucs émissaires et de faire porter aux étrangers soignés en France le chapeau du déficit de la secu... Tous les chiffres démontrent que que le coût de ces soins par rapport aux gaspillages du système de soins ne sont qu'une goute d'eau dont la suppression ne résoudrait rien et enverrait à la mort faute de traitement les personnes ainsi rejetées

Comment payer alors ? Voici quelques pistes :

Revoir la politique du médicament, que ce soit le prix fixé, le développement de génériques, la dispensiation au nombre exact et non par boites, la suppression du remboursement des médicaments inutiles...

Revoir la gestion des arrêts de maladie en se donnant de les controler de façon plus efficace

Ne pas céder au chantage des professions médicales lorsqu'elles s'arqueboutent sur leurs privilèges, comme les consultations privées à l'hôpital par exemple ou le refus du tiers payant généralisé...

Travailler sur le gaspîllage des analyses, des radios, des IRM, des scanners...

Développer le DMP...

Voilà, c'est juste quelques pistes, qui ne plairont pas aux droites et aux professions libérales, mais qui pourraient être rentables...

Portrait de Yomi

Chrisplus wrote:

j'aurai, sur le sujet, une petite queston simple, tres basique, et peut-être derangeante !! OU TROUVE T'ON L'ARGENT POUR PAYER LES SOINS AUX PERSONNES ETRANGERES ??

Si tu travail, tu paye des impôts, et une partie sert à payer les soins aux etrangers, les loger, leur fournir toutes sortes d'aides (CAF, CMU, etc...) Yell

Portrait de Emilie-seronet

Juste une précision. Etranger ne rime pas forcément avec sans papier.

Les étrangers qui ont droit à un séjour pour soins peuvent travailler, et donc cotisent également, paient aussi des impôts. Leurs impôts servent aussi à toutes sortes d'aides, dont tout le monde peut bénéficier, français comme étranger.

Et, en passant,  des sans papiers qui travaillent, et payent des impôts, ça existe aussi !

Bref, tout le monde met la main à la pâte finalement !