FN : une santé sous contrôles ?

Publié par jfl-seronet le 12.04.2012
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santé en campagne 2012Front national
Comme d’autres partis qui présentent des candidats à l’élection présidentielle de 2012, le Front national a planché sur la santé, le handicap… On trouve dans le programme du parti d’extrême droite des mesures, dans les chapitres consacrés à la famille et à l’immigration qui ont un lien avec la santé. En parler ou pas… Seronet a choisi d’informer. Passage en revue de quelques morceaux choisis qui sont loin d’être des détails !
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En parler ou pas… la question s’est posée dans l’équipe de Seronet et plus largement dans les instances politiques de l’association AIDES. Cette question est légitime compte tenu de ce qu’est le passé et, disons-le, le passif du parti d’extrême droite sur le VIH/sida. L’extrême-droite a souvent tendance à réécrire l’histoire, face à cela, il n’est pas interdit d’avoir de la mémoire. C’est Jean-Marie Le Pen qui, le premier, a parlé des "sidaïques". A l’émission politique "L’heure de vérité" (12 septembre 1987), il affirme ainsi : "Le sidaïque est une espèce de lépreux". Et d’ajouter sans doute pour faire bonne mesure : "Le sidaïque est contagieux, par sa transpiration, ses larmes, sa salive, son contact". Il est le premier homme politique à avoir défendu les "sidatoriums" pour isoler les séropositifs du reste de la société. Il faut dire qu’à l’époque, milieu des années 80, il estimait que le nombre de contaminations allait doubler tous les huit à dix mois en France ! Cette fascination pour les idées fausses et les solutions discriminatoires sur le VIH s’est poursuivie politiquement jusqu’en 2002.

Lors de ces élections présidentielles-là, le Front national est le seul parti politique à mentionner dans son programme de gouvernement le dépistage systématique du sida en France et en particulier "aux frontières évidemment, à l'occasion du mariage, de la grossesse, en milieu carcéral ou de prostitution et chez tous ceux qui ont une responsabilité collective". Le programme indiquait aussi dans la partie santé : "des contrôles adaptés seront mis en place auprès des personnes étrangères appelées à résider en France. Les personnes à soigner seront envoyées dans des centres spécialisés".


Le Front national n’a jamais retiré, ni désavoué ses propos sur les "sidaïques" et autres "sidatoriums". A mettre aussi au passif du parti d’extrême droite, un manque d’intérêt pour ne pas dire plus sur les questions de santé… Le FN ne parlait du financement de la santé que pour proposer de créer deux Sécurité sociale : l’une pour les Français, l’autre pour les étrangers. Il n’abordait le VIH que sous l’angle de la peur, en faisant des séropositifs des repoussoirs. Il est donc logique que cette vision entretenue depuis des années avec quelques variantes pose question, aujourd’hui encore. Il est tout aussi évident que cet héritage-là, jamais dénoncé, soit problématique pour les associations de lutte contre le sida. A cet égard, les élections municipales de 1995, qui ont vu arriver des maires FN dans plusieurs villes, ont été un signal d’alarme de plus. Bien souvent, les nouvelles majorités ont diminué voire retiré leurs subventions aux associations de lutte contre le sida, à AIDES surtout au motif que ce serait une "association d’homosexuels". Ce passé et ce passif existent. Ils illustrent une conception de la société, de la santé, des relations entre les personnes qui sont à l’opposé des valeurs et des combats que la majorité des associations de lutte contre le sida, dont AIDES, de défense des droits des personnes étrangères et LGBT portent.

Le parti d’extrême droite participe de nouveau aux élections présidentielles et législatives. Dans ce cadre, il a développé un programme qui traite, entre autres, de la santé, du handicap, de l’immigration et de la famille. Des mesures qui font partie du débat. Seronet pense qu’il vaut mieux les connaître que de les ignorer. Elles peuvent faire réfléchir… notamment quant à leurs conséquences sur la lutte contre le VIH/sida et les personnes séropositives. Et ça, c’est utile de le savoir.

Santé
Le slogan, c’est : "Vers un égal accès à la santé" et son codicille : "Garantir l’accès à la santé pour tous les Français". "Aujourd’hui, beaucoup de Français renoncent à se soigner faute de moyens. En outre, le "trou" de la sécurité sociale ne s’est jamais résorbé et menace la pérennité de notre système de soins. La santé est un bien précieux qui ne doit pas être réservé à ceux qui en ont les moyens, ou à ceux qui vivent au bon endroit. Il est de notre devoir de défendre la Sécurité Sociale et de l’améliorer sans cesse, dans un esprit de responsabilité. Il faut donc agir, pour préserver l’accès de tous les Français aux soins et combler les déficits", avance le Front national. Dans son analyse, le parti d’extrême droite avance que "la multiplication des déremboursements de médicaments, la hausse du forfait hospitalier, la baisse des indemnités journalières des malades, l’augmentation de la taxe sur les complémentaires santé (…) ont contribué à creuser le fossé entre une santé des pauvres et une santé des riches". Voilà pour le diagnostic. Alors quelles solutions ? Elles sont marquées par le corpus idéologique habituel de l’extrême droite. La première mesure vise très explicitement les étrangers puisqu’il s’agit d’"Instaurer un délai de carence d’un an de résidence continue en France et de cotisation avant de bénéficier de tous les avantages de la Sécurité sociale". Par ailleurs, le Front national compte : "Supprimer l’AME (aide médicale d’Etat) réservée aux migrants clandestins" et "Créer un observatoire des droits sociaux des étrangers et de l’usage des conventions bilatérales de soins". Des mesures qui empêcheraient un "égal accès à la santé" et ne permettraient pas d’équilibrer les comptes sociaux, même si c’est plus simple de prétendre le contraire.
Un autre des axes en santé est la lutte "contre la fraude et les abus avec la création d’un secrétariat d’Etat à la lutte contre la fraude, chargé de piloter un vaste plan interministériel anti-fraude". En matière de santé toujours, le Front national entend : "Assurer l’accès aux soins sur tout le territoire en assurant la présence de centres hospitaliers ou médicaux pluridisciplinaires dans chaque bassin de santé". Il préconise aussi un "plafonnement des dépassements d’honoraires en secteur 2, après concertation avec les représentants des médecins", une "nouvelle politique du médicament qui sortira des logiques purement comptables et examinera avec beaucoup plus de discernement les médicaments réellement efficaces et inefficaces. Certains médicaments déremboursés pourront de nouveau être remboursés par la Sécurité Sociale au taux normal". Autre mesure : le "gel du montant du forfait hospitalier et des taxes sur les mutuelles de santé". Le parti d’extrême droite a cogité, par rapport à ses habitudes, sur la santé et propose aussi des mesures qui visent à améliorer l’efficacité du système de soins. Cela passe par une réorganisation concertée de la carte hospitalière et l’organisation du travail au sein des hôpitaux, le développement en particulier des maisons de santé (comme le PS et l’UMP d’ailleurs), la mise en place du DMP (dossier médical personnalisé) et le renforcement de la tutelle du ministère en charge de la Santé sur les Agences régionales de santé (ARS), afin d’assurer une cohérence de la politique de santé sur l’ensemble du territoire national. Soit, sur ce dernier point, le grand retour du jacobinisme.

Immigration
Le projet se résume d’une phrase : "Stopper l'immigration, renforcer l'identité française". Il est inutile d’entrer dans le détail des analyses qui conduisent à cette vision de la société puisque la candidate d’extrême droite les présente assez souvent pour qu’elles soient connues de tous et son père fait pareil depuis les années 70. Signalons juste que l’AME (Aide médicale d’Etat) y est présentée comme une "pompe aspirante" de l’immigration illégale. Très logiquement, le Front National supprimerait donc l’AME, une proposition déjà affirmée dans le chapitre consacré à la Santé. Le FN veut modifier le Code de l’entrée et du séjour des étrangers en restreignant les droits. Par exemple, en supprimant le regroupement familial. Enfin, notons un grand progrès démocratique qui fait frémir si on pense au précédent qu’il crée en matière de liberté d’opinion et d’expression : "Les manifestations de clandestins ou de soutien aux clandestins seront interdites".

Handicap
Le credo du parti d’extrême droite sur ce sujet : "Un état au service de tous". L’analyse du FN se veut évidemment sévère sur la politique du handicap conduite ses dernières années. "Les dispositions de la loi de transfert de compétences aux départements [allusion aux Maisons départementales des personnes handicapées, ndlr] ont rendu les modalités d’aide plus complexes du fait de l’approche pluridisciplinaire parfois inutilement lourde et donc souvent coûteuse. Les décrets d’application ont tardé à être pris et de nombreuses dispositions remettent en question ces acquis, faute d’une réelle volonté politique et faute de moyens". Le Front national considère que : "Les aides aux handicapés ne sont pas seulement la compensation d’un inconvénient matériel plus ou moins grave. Il s’agit au contraire de permettre aux personnes handicapées de mener une vie normale, humaine, alors qu’en l’absence de telles aides morales et financières, elles se trouvent condamnées à une existence parfois végétative (sic)". Alors quelles mesures ? Le FN entend : "Définir enfin les contours du handicap" ; "Simplifier et clarifier les critères d’appréciation du handicap et de la dépendance, revenir à une déclaration annuelle de ressources". Il préconise de : "Revaloriser l’AAH".

Famille
Là, cela va aller vite. C’est : "Aider la famille, préparer l'avenir". Des mesures sur le revenu parental, la baisse de l’âge de retraite pour les mères, etc. Dans le chapitre de protection et de valorisation de la famille, on peut lire : "La famille doit se fonder exclusivement sur l’union d’un homme et d’une femme et accueillir des enfants nés d’un père et d’une mère. Nous nous opposerons donc à toute demande de création d’un mariage homosexuel et/ou d’une adoption par des couples homosexuels. Pour autant, la vie commune suscitant des intérêts matériels communs, le PACS apporte une solution suffisante et ne sera pas remis en cause".