Journée nationale contre les hépatites : les ONG revendiquent

Publié par jfl-seronet le 02.06.2015
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Thérapeutiquevhcvhbhépatites

Le 2 juin a lieu la Journée nationale de lutte contre les hépatites virales en France. A cette occasion, plusieurs organisations non gouvernementales font passer leurs messages… sur la prévention, l’accès aux traitements, les prix des médicaments. Qui dit quoi ? C’est parti !

Médecins du Monde

Message clair et net pour Médecins du Monde qui rappelle "la nécessité d’un accès aux traitements contre l’hépatite C pour tous en France et partout ailleurs". En février dernier, Médecins du Monde a déposé auprès de l’Office Européen des Brevets (OEB) une opposition au brevet sur le sofosbuvir (Sovaldi) détenu par le laboratoire Gilead Sciences, considérant que les critères de brevetabilité ne sont pas remplis. En prenant cette initiative, Médecins du Monde a tenu à alerter "sur les problèmes posés par le prix des nouveaux traitements contre l’hépatite C, qui peuvent atteindre jusqu’à 140 000 euros la cure". L’ONG estime que "ces prix exorbitants conduisent à un rationnement et fragilisent l’accès des patients aux médicaments : les nouveaux traitements ne sont pris en charge par la sécurité sociale que pour les personnes à un stade avancé de la maladie. Ils ont aussi un impact financier lourd sur le système de santé. Les prix de ces médicaments mettent donc en péril l’existence même de notre modèle de santé solidaire". En fait, l’ONG défend l’idée que deux conditions sont nécessaires pour éviter "la propagation des logiques de rationnement qui excluent les patients des soins". La première, c’est le renforcement de la démocratie sanitaire. Si les malades sont représentés au sein de toutes les instances de santé, mieux seront défendus les intérêts des patients et mieux écartée sera la menace d’une logique financière dans l’accès aux soins. La seconde, c’est la "transparence sur l’évaluation des produits de santé". La démarche concernant le brevet du sofosbuvir va prendre du temps (sans doute un an et demi). Médecins du Monde n’entend pas attendre sans rien faire, même si d’autres actions du même type ont été déposées contre Gilead et ce brevet (9 autres oppositions ont été déposées). En Argentine, Brésil, Chine, Russie et Ukraine des membres de la société civile viennent également de s’engager dans cette procédure.

Dans son communiqué, MdM rappelle "la nécessité d’un débat sur la fixation du prix des médicaments" et demande, notamment : "L’accès aux nouveaux traitements contre l’hépatite C pour tous les patients" ; "L’utilisation, lorsque la situation le justifie, des procédures permettant de réduire les prix des médicaments telles que la licence d’office ou la fixation unilatérale du prix par le CEPS (Comité économique des produits de santé)" ; "La transparence et le contrôle démocratique du système médico-pharmaceutique et des relations entre l'industrie et les institutions publiques".

Aides

Du côté de Aides, on insiste beaucoup sur le fait que les "tests rapides de l'hépatite C doivent être mis à disposition des associations". "En 2014, la lutte contre l'hépatite C a connu une véritable révolution : la mise au point de nouveaux traitements antiviraux, beaucoup mieux supportés par les personnes, permettent une guérison de l’infection en trois mois. Depuis la mise sur le marché de ces nouvelles molécules, Aides, avec d’autres associations (médecins du monde, SOS hépatites, le Comede, le TRT-5 et le CHV), n'a cessé de se battre pour les rendre accessibles à tous, à commencer par les publics les plus précarisés comme les détenus ou les usagers de drogues. "C'est une question d'égalité devant le soin", explique Bruno Spire, président de Aides. "C'est aussi l'espoir inédit de mettre fin à une épidémie qui touche plus de 230 000 personnes en France", explique l’association. "En cette journée nationale, Aides appelle à nouveau l'Etat à tout mettre en œuvre pour faire baisser les prix exorbitants de ces nouveaux traitements et en garantir l'accès inconditionnel aux malades". L'association explique aussi que les tests rapides de dépistage du VHC sont "l'autre urgence" : Ces nouveaux traitements n'auront l'effet escompté que s'ils s'accompagnent d'une offre de dépistage efficace, en proximité avec les populations les plus exposées. Avec plus de 100 000 personnes en France qui ignorent être porteuses de l'hépatite C, il y a urgence. Ces Trod, ou tests rapides d'orientation diagnostique, existent désormais pour l'hépatite C. Qu'attend-on pour les mettre à disposition des associations ? Ils étaient attendus pour mai 2015, mais certains acteurs du monde de la santé freinent leur arrivée. Les derniers obstacles doivent être levés, car les militants associatifs formés au dépistage sont prêts. Aides demande aux pouvoirs publics de tenir leurs engagements en accélérant la mise à disposition de ce nouvel outil. Aides rappelle que l’évolution lente et silencieuse de l’infection peut mener à des complications gravissimes (cirrhoses, cancers...). 2 600 personnes décèdent chaque année en France des suites directes de l’hépatite C. Beaucoup seraient désormais évitables par un meilleur accès au dépistage et aux traitements", conclut l’association.

SOS Hépatites

Du côté de SOS Hépatites, on insiste aussi sur l’accès universel aux traitements. A l’occasion de cette Journée, SOS Hépatites rappelle les principaux défis pour mener une lutte efficace contre les virus des hépatites B (VHB) et C (VHC), enjeux majeurs de santé publique en métropole et dans les départements d’Outre-Mer.

"Ces maladies sont autant silencieuses dans le corps des malades que dans les têtes des gens qui les entourent ! La méconnaissance de ces pathologies, des modes de prévention et de transmission perdure. Ces deux virus transmis par du sang contaminé (le VHB est également transmis par voie sexuelle) sont 10 à 100 fois plus transmissibles que le VIH. 280 000 personnes sont porteuses du VHB et 370 000 du VHC, cependant environ 50 % d’entre elles l’ignorent. Leurs conséquences (cirrhose et cancer du foie)  provoquent 4 000 à 5000 décès par an", rappelle la fédération. L’association fait un focus sur l’hépatite B, rappelant que "L’hépatite B est la maladie sexuellement transmissible la plus courante au monde". Et pointant un paradoxe : "Nous détenons l’ensemble des outils pour mettre un terme à la propagation de l’épidémie : des outils de dépistage variés, un vaccin efficace, des traitements qui ne permettent pas encore de guérir mais qui stoppent la progression de la maladie. Pourtant, des freins majeurs persistent, bien que 13 études aient montré qu’il n’existait aucune relation entre le vaccin et les maladies neurologiques, notamment la sclérose en plaque. La vaccination est l’un des grands succès de santé publique qui a sauvé des millions de vie. Finissons-en avec cette polémique purement française. Nous demandons le déploiement d’une vaccination universelle comme recommandée par l’OMS et comme appliquée en Italie et au Canada".

Pour l’hépatite C, l’enjeu est différent, c’est celui de l’accès aux soins. "Le rationnement pose des questions éthiques majeures", rappelle SOS hépatites. "Il n’existe actuellement aucun vaccin contre l’hépatite C mais de nouveaux traitements permettent désormais d’éliminer le virus chez la quasi-totalité des malades. Les prix des traitements exigés par les laboratoires ont conduit le gouvernement à réserver ces traitements aux personnes à un stade avancé de la maladie et à encadrer strictement les prescriptions. Les malades doivent désormais attendre que l’état de leur foie et de leur santé se dégradent pour avoir accès aux traitements. Nous demandons la fin de cette discrimination en ouvrant l’accès aux soins à tous les malades". Enfin, la fédération demande à "l’Etat français de se mobiliser pour une vraie politique de santé publique sur tout le territoire national. Nous voulons un engagement avec des moyens à la hauteur de l’épidémie, un accès aux soins de qualité pour tous et le respect du secret médical. Actuellement, entre  41 000 et 66 000 euros sont investis pour le traitement d’un patient (46 000 à 75 000 euros dans les départements d’Outre-mer) contre 200 euros seulement pour tout son accompagnement dans le soin, pour l’organisation des soins et de la prévention (…) Un traitement pour tous, une guérison pour chacun et une protection universelle !", conclut l’association.