La Disance… s’envole sur Paris

Publié par jfl-seronet le 07.10.2013
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InitiativeDisance 2013

Le 6 octobre, un dimanche ensoleillé, s’est déroulée la deuxième Journée de la Disance. Une soixantaine de participants, parfois venus de loin, ont joué sur le Champ-de-Mars à Paris la carte de la visibilité pour changer le regard de la société sur les personnes qui vivent avec le VIH. Seronet y était.

Sur le Champ-de-Mars, elle est venue en famille avec ses trois enfants. C’est dimanche, il fait beau, chaud même pour un 6 octobre. Elle s’approche des banderoles de AIDES posées sur le gazon. Elle demande : "Qu’est-ce que c’est que cette action ?" Ses enfants observent les ballons rouges. Volontaire à AIDES, Fabien lui répond, détaille la raison de la présence de l’association à quelque 500 mètres de la Tour Eiffel, parle de ce qui a motivé la participation de la soixantaine de personnes, parfois venues de loin. C’est le cas de Dominique, arrivé de Perpignan. Il met la main aux préparatifs, transporte les cartons de sandwichs, parle avec les autres participants, rigole, met de la bonne humeur. Comme d’autres venus de Saône-et-Loire, de Nantes, de Montpellier, Rennes, Lyon, Lille ou encore Calais... Dominique a inscrit un mot sur le carton qu’il a attaché à un ballon rouge ? C’est ce ballon qu’il va lâcher dans le ciel parisien en même temps que ceux des autres participants…

Un temps militant… et de plaisir

En attendant, les discussions s’animent, les stylos sont de sortie pour personnaliser les messages et le pique-nique démarre. Sous le soleil exactement, on mange, s’amuse, discute plus sérieusement… La Journée de la Disance est conçue comme un temps militant, mais aussi un temps de plaisir, de rencontre entre les personnes séro-concernées ; un temps pour attirer l’attention des badauds, nombreux ce jour-là sur le Champ-de-Mars. De ce point de vue, les ballons s’avèrent utiles. C’est une cible privilégiée pour les photographes du dimanche : la masse des ballons s’accommode bien avec la vieille dame d’acier. C’est surtout un moyen d’attirer l’attention. Des passants s’approchent — certains veulent acheter des ballons pour leurs enfants — demandent à quoi ils servent. Il est alors facile d’expliquer ce que comportent les messages qui y sont attachés, pourquoi les gens, ici réunis, participent à cet événement, ce qu’ils en espèrent. Parisien, Pascal est de la partie. Sur son message, il a écrit : "Le sida, la maladie, où ça ? Je suis en bonne santé ; je vis comme tout le monde et la vie est belle". "Cela veut dire que je n’ai pas de problème particulier", explique-t-il. Et Pascal entend le faire savoir. Il l’affirmera, plus tard dans le porte-voix pas loin des passants qui longent l’école militaire.

Défi personnel et challenge collectif

D’un ballon rouge à l’autre, on voit des messages différents, des phrases révélatrices d’un état d’esprit. Sur Seronet qui a organisé cette manifestation, des personnes ont publié des messages sur la séropositivité, la disance ; des messages qu’ils voulaient voir dans le ciel parisien, mais aussi lus au micro devant les badauds. "J’ai du respect pour celui qui en parle", a écrit quelqu’un. "Heureux en couple séro-différent, c’est possible !", proclame un autre. "Séropos et heureux, Séropos et alors ; Séropos et vous" ; "C’est moi qui dirige le VIH et non lui", "Je dis ; Je me montre ; Je suis séropos et alors !", affiche un autre. "Il est plus facile d’en parler quand on a la famille et les proches avec soi". En parler à d’autres, c’est un des objectifs de la Journée de la Disance. C’est à la fois un défi personnel et un challenge collectif. Défi personnel pour celle ou celui qui affirme : "Regarde-moi, je en suis pas qu’un virus" ; challenge collectif comme le résume un message : "Bousculer les esprits pour changer les gens ! Pour un futur plus joyeux pour les séropos !"

Proposer aux passants de se joindre à nous

Administratrice de AIDES, Camille Spire remercie les personnes qui sont venues. "Après le pique-nique, nous allons marcher vers le mur de la paix [le monument de Clara Halter, situé devant l’école militaire, qui s’inspire du mur des lamentations, ndlr] . En chemin, nous allons proposer aux passants que nous croiserons de se joindre à nous pour le lâcher des ballons". Le déjeuner sur l’herbe englouti, les ballons rouges répartis, la troupe marche vers le mur de la paix. Venue de Montpellier, Emma, dans un anglais parfait, "recrute" trois touristes canadiens. Un autre participant mobilise un couple. Evidemment, ce n’est pas facile de faire participer des groupes attablés autour d’assiettes, des couples enlacés, des familles dont les enfants bougent en essaim, mais certains veulent prendre des photos, ou être pris en photos avec des manifestants. Devant le mur de la paix où le mot est écrit en 49 langues, il y a du monde, sans doute pas assez vu l’ampleur de l’enjeu, mais suffisamment pour attirer l’attention, pour créer un premier symbole, pour débuter un mouvement. Après tout, il en faut du courage pour parler publiquement de sa séropositivité, pour se montrer et contribuer à faire changer le regard de l’autre. Au micro, Martine, venue de Saône-et-Loire, emprunte les accents de la TSF lorsqu’elle lance : "Les séropositifs parlent aux séronégatifs… Si vous avez des questions nous y répondrons intelligemment".

"C’était très beau !"

Crainte et méconnaissance. Elle réside en grande partie-là cette défiance mutuelle. Les uns ont souvent été blessés par les réactions de proches, ont perdu des partenaires sexuels suite à cette annonce… comme le montrent les enquêtes de AIDES. Près de 50 % des personnes interrogées dans les accueils de l’association considèrent qu’en parler a été une erreur. Les autres ne sont pas en capacité d’entendre car leurs préjugés sont trop forts, leurs réactions motivées par le refus de savoir pour eux-mêmes. Martine, dans un style très personnel, l’a signifié lorsqu’elle a ainsi interpellé les badauds au porte-voix : "Nous sommes des séropositifs qui parlent aux séronégatifs… Et encore on ne sait pas dans quel état vous êtes !" Evidemment, c’est cash. Mais la manifestation est aussi faite pour interpeller. "C’était très beau", explique Maya dans un message sur Seronet, publié au lendemain du rassemblement. "De nouvelles rencontres intéressantes, revu d’anciennes têtes aimées (…) une action militante bien émouvante (…) rentrée crevée et heureuse. Disance en route !" "Les messages auront, j'espère, voyagé le plus loin possible. Maintenant, à nous tous de continuer à changer le regard de la société sur les personnes séropositives, chaque jour, à notre échelle", écrit Emilie (Seronet), une des organisatrices avec Sophie de l’événement.

"Pourtant j'avais déjà la chance ; Quand j'étais gosse dans mon quartier ; De ne pas attacher d'importance ; A ce que les autres pensaient ; Et je n'ai pas vu dans l'Histoire ; Quelque guerrier ou quelque roi ; Assoiffé de règne ou de gloire ; Qui soit plus orgueilleux que moi ; J'ai rien d'mandé, je n'ai rien eu ; Mais j'ai fait ... ce que j'ai voulu". Ces paroles d’une célèbre chanson auraient pu avoir quelque résonnance avec la manifestation de cette deuxième Journée de la Disance… C’est drôle, elle a pour titre "Les ballons rouges" !

Commentaires

Portrait de seropochidem

Merci d'avoir organisé cette journée de visibilité. 

4 ans après mon inscription, je reviens sur le site pour lire l'article et laisser ce commentaire. 

Et je rends compte que mon pseudo créé il y a 4ans est un peu désuet aujourd'hui !

Bien qu'en Province hélas, nous nous battons au quotidien pour faire évoluer les mentalités sur "ces gens, les séropos..."

Nous ne pouvons pas trop faire avancer la science à notre niveau, mais nous pouvons faire évoluer notre société sur ces sujets encore trop tabous et stigmatisés

Vive Aides, Vive Séronet, Vive nous... et Vive la sérodifférence

Portrait de badiane

 

d'avoir été là parmi vous, belle journée, beaucoup de chaleur humaine.

 

 

Beau texte, Jean-François.

 

 

Belle photo de cet enfant déliant ces fils rouges.

 

 

C'est Byzance!!

 

 

Régine

 

 

Portrait de rigologue

A toute l'équipe de Séronet, au photographe, au rédacteur du texte. Merci à tous ceux qui ont eu l'audace de se déplacer et de parler (faute de parler, on meurt !).

Merci à tous ceux qui vont continuer, au quotidien, chez le boulanger, le marchand de journaux, à l'école des enfants, à informer les ignorants. Parce que l'ignorance est mère de sectarisme, ensemble nous sommes les savants qui pouvons rectifier cette déviance.

Je vous embrasse tous et à très bientôt.Laughing

Portrait de pasch75

Une journée ensoleillé, de la solidarité, on ce sens plus fort a plusieurs, on ce soutient;

On a envie de dire, de crier haut et fort, regardé moi comme je suis heureux de vous témoignez le faite qu'être seropo c'est pas la fin du monde et que le jours ou l'on pourra dire je suis seropo ( quand il sera neccessaire de le dire, car c'est pas ce qui nous définit en 1er lieu) sans pour autant transmettre un rejet, un dégoût ou des a prioris, ce sera gagnéSmile.

Venez nombreux à la prochaine, vous verez.... c'est le pied.

Pensé a tous ces hommes et femmes qui on bousculé les mentalités, qui on changé le regard de la société et vous vous dirait peut être...... j'y étaitCool.

A bientôt pour de nouvelles aventures exaltantes.

    

Portrait de pasch75

......pour ton action orale (amplifier) dont la lecture des textes n'a pas laissé indifférents bon nombres des participants.

Portrait de gys

Je n'étais pas présente physiquement mais avec vous par la pensée, j'aurais participé, aurait témoigné comme à de nombreuses manifestations, je n'ai pas à me cacher de ma pathologie.

Merci et bravo à tous !

Bizzzzzzzz