Le gouverneur de New York veut éradiquer l’épidémie de sida

Publié par jfl-seronet le 10.07.2014
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Initiativetraitement universelcascade

"Il me paraît tout à fait approprié que nous nous montrions les plus agressifs pour éradiquer la maladie", expliquait récemment Andrew Cuomo, le gouverneur de New York. L’Etat de New York va devenir le premier territoire au monde à tester le traitement universel sur les personnes vivant avec le VIH. Explications.

En théorie, cela paraît tout simple : si suffisamment de personnes séropositives au VIH sont diagnostiquées, mises en contact avec les autorités de santé et mises sous traitement antirétroviral et si elles prennent leurs médicaments régulièrement, l’épidémie du sida peut être éradiquée. Bref, Andrew Cuomo entend mettre en œuvre l’effet cascade. Cette stratégie (le traitement universel) est préconisée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 2003 et figure dans les Objectifs du millénaire de l’ONU. Les milieux scientifiques estiment qu’on peut parler de couverture universelle lorsque 80 % des personnes vivant avec le VIH sont sous antirétroviraux. Reste que cette stratégie n’a encore jamais été appliquée de façon systématique sur un territoire donné. C’est le sens du pari que lance le gouverneur de l’Etat de New York. "Nous nous sommes retrouvés à l’épicentre de la crise du sida, il y a 30 ans", a-t-il déclaré (29 juin) juste avant de se rendre à la Gay Pride de New York. "Il me paraît donc tout à fait approprié que nous nous montrions également les plus agressifs pour éradiquer la maladie". La portée de cette initiative est d’autant plus forte que les premiers cas de sida ont été rapportés il y a exactement 33 ans, le 3 juillet 1981, dans un article du "New York Times".

Des objectifs… notamment épidémiologiques

Le but de l’initiative du gouverneur démocrate est de faire passer le nombre annuel de nouvelles infections en dessous de celui des décès d’ici à 2020, ce qui permettrait de réduire progressivement le nombre de personnes vivant avec le VIH, indique l’AFP. L’Etat de New York est déjà parvenu à faire passer les nouvelles infections de 14 000 en 1993 à 3 000 en 2014. Mais il veut aller plus loin. "Le but est de réduire ce nombre à 750 d’ici à 2020", indique-t-il dans un communiqué. Concrètement, le plan d’Andrew Cuomo repose sur trois piliers. "Il va tout d’abord chercher à maximiser le nombre de personnes qui se fait tester, sachant que 14 % des 154 000 séropositifs new-yorkais ne sont pas au courant de leur maladie", détaille Tim Horn, de Treatment Action Group, un think tank consacré à la lutte contre le sida. Cela passera notamment par la mise à disposition de kits qui permettent d’effectuer le test à la maison et par la simplification de la procédure en cabinet – un simple consentement oral suffira à l’avenir.

Il s’agira également de doubler la part des personnes qui, vivant avec le VIH, reçoit des médicaments et de s’assurer qu’elles continuent à les prendre sur le long terme (objectif : une bonne observance pour avoir une charge virale indétectable). "Aujour­d’hui, près de 50 % des séropositifs ne sont pas traités", glisse Tim Horn. Pour remédier à cela, l’administration Cuomo a négocié des rabais avec les trois entreprises pharmaceutiques américaines qui dominent 73 % du marché des antirétroviraux à New York (AbbVie, Bristol-Myers Squibb et Gilead). Elle a, en outre, introduit une limite de 30 % sur la part de revenu que les logements sociaux peuvent réclamer aux personnes séropositives. "Un logement fixe augmente la probabilité que ces malades continueront à prendre leurs médicaments", note le bureau du gouverneur.

Le troisième volet cible les personnes séronégatives "qui sont, en général, de grands oubliés des programmes de lutte contre le sida", relève Tim Horn. Le programme se concentrera sur les populations les plus à risque, "à savoir les gays afro-américains ou latinos et les femmes transgenres", précise-t-il. Celles-ci seront encouragées à prendre Truvada dans le cadre du TasP. Ces personnes seront dotées d’une assurance maladie et mises en relation avec les services sociaux pour s’assurer qu’elles disposent de conditions de vie stables, indique l’agence de presse française. Si les bienfaits de cette initiative seront principalement sanitaires, Andrew Cuomo ne perd pas non plus le nord. Chaque personne vivant avec le VIH coûte 400 000 dollars à l’Etat. Les 3 400 cas de VIH que New York espère ainsi éviter d’ici à 2020 lui permettront donc, outre d’économiser des vies, d’économiser également 317 millions de dollars. Ce plan ne devrait coûter, lui, que 5 millions de dollars.