L’homophobie s’ancre dans la société française

Publié par Mathieu Brancourt le 20.05.2015
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Mode de viehomophobie

Dans son dernier rapport annuel, l’association SOS homophobie dresse la situation des discriminations liées à l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. Après deux années noires durant les débats sur le mariage pour tous, le nombre de témoignages recule certes, mais reste élevé.

C’est l’autre — et triste — anniversaire de l’ouverture du mariage à tous les couples. Alors que les premiers-ères marié-e-s vont fêter fin mai leurs noces de cuir, les chiffres de l’homophobie demeurent inquiétants. A l’approche de la Journée internationale de lutte contre les discriminations anti-LGBT (Idahot) du 17 mai, l’association SOS homophobie a présenté à la presse le 12 mai dernier son rapport annuel 2015 et les dernières données sur les témoignages de violences envers les lesbiennes, gays, bis et personnes trans. En 2014, le nombre de témoignages recueillis par l’association via sa ligne d’écoute ou son site Internet (1) est de 2 197, en baisse de 38 % par rapport à 2012 et 2013, années des débats violents et acharnés, où ces témoignages avaient explosé. "Deux années hors normes", rappelle Yohann Roszéwitch, président de SOS homophobie. Mais si l’on compare à la dernière année (2011) avant le mariage pour tous, l’augmentation reste de 41 % en quatre ans. Ce qui fait dire au responsable associatif que la haine envers les homosexuels, bisexuels et trans s’est "enracinée dans la société", malgré le vote d’une loi d’égalité.

Une agression homophobe tous les deux jours

Le milieu scolaire ou la famille restent, malheureusement, les premiers lieux de la vie de tous les jours où s’exercent l’homophobie ou la transphobie. Comparé à 2011, le nombre de témoignages de harcèlement scolaire a augmenté de 41 % et les situations de rejet dans la sphère familiale de 22 %. Ce calvaire du quotidien concerne 45 % des témoignages reçus en 2014 et Yohann Roszéwitch parle "d’une agression homophobe signalée tous les deux jours". Une violence qui provient souvent des membres de la famille des victimes.
Malgré un léger fléchissement, Internet reste un lieu de prédilection de la propagation de la parole homophobe. Avec 40 % de témoignages concernant des insultes sur la toile, les réseaux sociaux en ont la part belle : 33 % rapportent Twitter et 13 % Facebook comme lieux du délit. Même si Yohann Roszéwitch salue la "prise en compte grandissante de cette haine par les hébergeurs" et les sites de microblogging.

Une sur-mortalité des jeunes LGBT

Ce climat d’insultes décomplexées n’est pas sans conséquence. "Cette homophobie provoque un taux de suicide accru chez les jeunes LGBT", souligne le président de SOS homophobie. Il rapporte un risque cinq fois plus élevé chez les gays et près de quatre fois plus fort chez les jeunes lesbiennes, citant les dernières enquêtes internationales et françaises reprises par l’Inpes (Institut national de prévention et d’éducation à la santé).

Tout en rappelant que les LGBT-phobies prennent racines dans la même haine de la différence, il explique que les ressorts du rejet sont spécifiques à chaque groupe. Yohann Roszéwitch prend l’exemple de la biphobie, "double peine, avec un déni de sexualité et rejet, même au sein d’autres membres de la communauté LGBT". Tandis que pour les trans, c’est la violence physique, les clichés et l’absence de loi qui les rend particulièrement vulnérables.

Refus de soins et discrimination dans la santé

La médecine et les structures de santé ne sont pas épargnées par les manifestations homophobes. Parmi les témoignages dans ce domaine, près de 45 % font état de rejet et 22 % d’insultes liés à l’orientation sexuelle du couple ou de la personne. Comme Sophie, mère sociale d’un enfant de 9 mois qui se voit exiger de la part d’un pédiatre de revenir avec la "vraie mère de l’enfant". Les refus de soins restent encore d’actualité, avec 22 %.

Le bilan du quinquennat

SOS homophobie continue son combat sur le terrain, en tentant de soutenir les victimes qui contactent la structure et en montant des actions de sensibilisation auprès des jeunes, mais aussi auprès de salariés d’entreprises ou de collectivités. L’association appelle également de ses vœux une action politique, comme un plan ambitieux de lutte contre la discrimination des LGBT et de promotion de l’égalité. "Nous déplorons également le recul sur la PMA et le vote d’une loi de simplification du changement d’état civil des personnes trans". Sur le don du sang aux gays, dont la fin de l’interdiction de principe a été votée à l’Assemblée Nationale lors des débats sur la Loi de Santé, Yohann Roszéwitch souhaite voir évoluer les modalités du questionnaire pour le donneur, pour permettre à termes de n’exclure que les gays et bisexuels ayant eu des prises de risques récentes.

Concernant les médias, malgré les travers de la couverture parfois disproportionnée des antis-mariage et les trop nombreux clichés relayés par les titres ou les photos, le président de SOS homophobie note une évolution positive du comportement des journalistes sur ces sujets, évoquant par exemple la création d’une association de journalistes LGBT [AJLGBT, ndlr] et une vigilance accrue quant au traitement de l’homophobie et la médiatisation des affaires.

(1) : La ligne d'écoute nationale anonyme de SOS homophobie : 01 48 06 42 41 ou pour témoigner en ligne.


Commentaires

Portrait de RastaKouette

Je ne pense pas que les associations de lutte contre l'Homophobie arriveront un jour à changer les mentalités.

De plus nous sommes en pleine saison de la Gaypride 2015 qui à déja commencé le 16 mai dans certaines villes.(Voir le calendrier) Les médias à nouveau vont se donner à coeur joie.Dans la vidéo ci dessous je suis tout à fait d'accord avec ce que dit Muriel robin. A force de se montrer sur un char avec une plume etc...A mon avis je pense qu'il est temp que les LGBT se remettent en question!

Portrait de RastaKouette

L’homophobie est un mal qui nous ronge. C’est une violence pour toute la société car elle empêche des rapports libres et égaux entre tous les individus, qu’ils soient homosexuels ou hétérosexuels. Pour réagir à cet état de fait, Éric Guéret et Philippe Besson réunissent dans ce documentaire des paroles d’hommes et de femmes qui souffrent d’avoir subi des actes homophobes violents. Sauvagement agressés par des anonymes, rejetés par leur famille, harcelés au travail, chacun revient sur ce qu’il a vécu. En mettant en scène ces neuf témoignages, le documentaire Homos, la haine rend compte des effets dévastateurs de l’homophobie. Qu’elle soit diffuse ou qu’elle donne lieu à des passages à l’acte d’une violence inouïe, l’homophobie a les mêmes racines, bien ancrées au plus profond de l’inconscient collectif, qu’il faut absolument parvenir à extirper