Loi Renseignement : des assos de santé craignent le pire !

Publié par jfl-seronet le 23.04.2015
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Droit et socialLoi renseignement

Le projet de loi sur le renseignement a été adopté à l’Assemblée Nationale, jeudi 16 avril. Le vote solennel sur ce texte aura lieu, par scrutin public, mardi 5 mai. Des associations de lutte contre le sida et les hépatites virales craignent plusieurs dispositions du texte et parlent d’une "loi antidémocratique, dangereuse pour [leurs] combats". Elles s’en expliquent.

La loi sur le renseignement récemment votée à l’Assemblée Nationale fait l’objet de nombreuses critiques. C’est logique puisque ce texte porte sur les libertés publiques et des possibles restrictions de ces dernières. Même le président du Sénat (c’est dire !) a mis en garde le gouvernement contre ce qu’il appelle les "lois d’émotion". "Il faut que nous améliorions le renseignement, c'est indispensable pour lutter contre la menace terroriste. Il y a cette réalité de la sécurité. Et de l'autre côté, il y a un principe auquel nous sommes tous attachés c'est le respect des libertés individuelles et des libertés collectives", a ajouté le président de la Haute assemblée, le 16 avril, cité par l’AFP. Ce dernier estime que sa responsabilité est de trouver "cet équilibre entre l'indispensable sécurité et le respect des libertés individuelles et collectives".

Pour le moment, le texte voté en première lecture par les députés doit faire face à des critiques nombreuses : milieux juridiques, associations de défense des libertés, etc. Certaines associations de santé (1) ont également fait part de points d’inquiétude voire de désaccords profonds sur certains aspects du projet de loi sur le renseignement. Ces associations de lutte contre le sida et les hépatites virales parlent même de "loi antidémocratique, dangereuse pour [leurs] combats". Elles s’en expliquent dans un texte commun publié le 13 avril 2015.

Qu’est-ce qui pose problème ?

Le projet de loi sur le renseignement met en place une surveillance généralisée de l’ensemble des citoyens et des citoyennes, avancent les associations. Selon elles, le dit projet "étend les motifs d’écoute et de surveillance à des textes qui peuvent s’appliquer aux combats des associations de lutte contre le sida et les hépatites virales". Pour être plus précis, le projet et les amendements adoptés en commission des Lois autorisent les écoutes pour le recueil de renseignements relatifs, entre autres, aux intérêts économiques et scientifiques de la France. Or, les luttes des malades ont souvent été opposées à ces mêmes intérêts, rappellent les associations. "C’est bien au nom des intérêts économiques et scientifiques de la France que des socialistes et des responsables administratifs ont repoussé, au milieu des années 80, les mesures indispensables à assurer la sécurité transfusionnelle, se rendant responsables du scandale du sang contaminé. Combien de scandales sanitaires, comme celui des laboratoires Servier [L’affaire du Mediator, ndlr], auraient pu être évités, s’ils n’avaient pas été couverts au nom de prétextes assimilables à la défense des intérêts économiques et scientifiques de la France ?", note le texte associatif.

Les associations rappellent que leurs combats les "amènent à remettre en cause le système économique et scientifique français : prix du médicament, instances opaques, carences de la pharmacovigilance, démantèlement de la Sécurité sociale, baisse des subventions pour des actions qui sauvent des vies, abandon des malades des pays pauvres, etc. Quelle garantie avons-nous qu’un prétexte aussi flou — que la commission des lois s’est empressée d’élargir — ne transforme pas le plaidoyer de nos associations en une menace pour les intérêts économiques et scientifiques de la France ? Rien dans les décennies passées en matière de vigilance, de respect des lanceur-ses d’alerte, de réactivité, de lutte contre les conflits d’intérêt, ne saurait nous rassurer en la matière", estiment-elles.

Désobéissance civile et manifestation = terrorisme ?

Le projet prévoit aussi de légaliser les écoutes pour "prévenir les actions collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique". De nombreuses voix (syndicats, associations de défense des droits humain, syndicats, magistrat, y compris de la lutte anti-terroriste) ont dénoncé l’amalgame probable de cet article avec les protestations du mouvement social, indique le texte des associations. "C’est notamment vrai pour nos combats, qui ont toujours eu besoin d’actions de désobéissance civile qui pourraient relever d’une interprétation élargie de cet article de loi : distribution de seringues à une époque où c’était interdit, accueil d’usagers et d’usagères de drogues avant l’institution de la réduction des risques, mise de côté des lois répressives pour accueillir sans-papiers, travailleuses du sexe, entrave à l’expulsion d’étrangers et d’étrangères malades dans des pays où on ne pourra les soigner, manifestations non autorisées pour dénoncer de graves blocages institutionnels, etc. Ces actions ont fait avancer la lutte contre le sida et les hépatites. Désobéir à la loi est une nécessité quand la loi et la société excluent et marginalisent des populations entières en les rendant plus vulnérables à l’épidémie. Faudrait-il dès lors nous considérer comme potentiels terroristes et nous mettre sur écoute ? Alors même que des actions similaires restent nécessaires pour alerter politiques et responsables administratifs des graves lacunes de notre système de santé, doit-on s’attendre à être traité-es en terroristes ?"

Menaces sur la confidentialité de l’état de santé

Dans un communiqué (16 avril), les associations sont revenues à la charge contre le texte, notamment avec un angle nouveau : celui des menaces sur la confidentialité de l’état de santé. Les associations, qui ont suivi les débats en séances, expliquent que de nombreux amendements protecteurs ont été repoussés. Ils visaient à introduire de fragiles garde-fous pour garantir la protection des vies privées, notamment des échanges concernant la santé, mais aussi la sexualité, les opinions, les loisirs… des militants des associations de santé et plus généralement des militants et activistes de la société civile. La commission de contrôle, décidée par le texte, notamment, n'aura pas les pouvoirs suffisants par rapport aux enjeux. "Les discussions ont témoigné d'une rare désinvolture chez beaucoup d'élu-es face aux questions de confidentialité et de respect de la vie privée", notent les associations. "Sur les questions de santé, notamment, la majorité des parlementaires estimait que les médecins devaient être en partie protégés, sans se rendre compte que le secret médical appartient au patient, et non au professionnel. Sans se rendre compte non plus des conséquences pour le travail de suivi des associations de santé, s'il était confirmé que ces associations sont sous surveillance quand elles sont contactées par des personnes vivant avec le virus du sida ou des hépatites virales.

Appel à retirer le texte

"En répondant à des actes de terreur par des mesures de peur et de suspicion, la majorité donne aux terroristes ce qu’ils et elles veulent : moins de démocratie, le soupçon généralisé, des scissions supplémentaires au sein de la société. Ce faisant, elle menace nos combats, nos actions. (…) Nous appelons au retrait de ce projet de loi. Nous incitons nos militantes et militants, adhérents et adhérentes, sympathisantes et sympathisants, à participer à la campagne organisée par la Quadrature du Net et à contacter leur député-e pour dénoncer ce texte", concluent les associations.

(1) Access France, Act Up-Paris, Act Up Sud-Ouest, Aides, le Strass

Commentaires

Portrait de frabro

Désolé, mais je ne soutiendrai pas cette position absurde qui consiste à voir un complot contre les associtaions dans toute Loi qui viserait à renforcer la sécurité publique, toujours plus menacée.

Portrait de Centvin

Bonjour à toutes et tous,

je suis ravi de voir que les associations de santé liées à la lutte anti-vih prennent cette position qui est largement explicité et argumenté sur le fond et la forme dans l'article de SERONET.

Cette position manquait car les voies opposantes a ce projet de loi étaient entre autres celles de partis politiques,de syndicats,d'intellectuels,d'organes de presse,etc.

Il faut faire pression avec nos associations pendant ce débat parlementaires pour mettre en lumiére et éliminer toutes dérives futures pour nos libertés que l'on aurait couvert par complicité politique avec le pouvoir politique...

J'appelle à soutenir cette position collective de nos associations!

Centvin.

Portrait de basique

En quoi se donner les moyens d'assurer la sécurité publique serait-il liberticide pour le quidam qui n'a rien a se reprocher ? Il faut peut-être à un moment donné faire le choix du pragmatisme plutôt que de rester dans la posture. Il y a des gens qui ne sont pas démocrates et dont l'objectif est de déstabiliser la démocratie en montant les communautés les unes contre les autres. L'angélisme n'est pas une solution. Je partage le point de vue de Fabro quant à  l'absurdité qu'il y a à voir partout un complot contre nos libertés. Les réelles atteintes à la libertés sont celles qui tuent à charlie, à l'hyper cacher,  maintenant dans les églises, dans le but de semer le chaos. C'est à celà qu'il faut s'attaquer.

Portrait de IMIM

communiquer à l'aide de pigeons voyageurs et de signaux de fumée  MDRMDR!!! Ou trouver des noms de code: VIH = véritable indifférence humaine, ou sans papier = sous protégés

C'est juste du flicage à l'extrème Et ça n'a rien de bon ds une démocratie....

Quelle liberté quand les assos,les syndicats, mm celui de la lutte anti terroriste, mdr,et autres sont écoutés 

Désobéissance civile et manifestations ????

Ceux qui ont des choses à se reprocher trouveront d'autres moyens

Ils trouvent toujours des parades...le jeu du chat et de la souris....

Si le travail en amont était fait correctement, il n'y aurait pas besoin de ces dispositions....

Pour ma part, qu'ils écoutent mes conversations téléphoniques mdr Des heures avec ma fille et mes "cop's"(copines)  à parler chiffons + les histoires de famille!!! Ils vont pouvoir ronffler trankils!!!!

Ma boite mail...Que des pubs ....

Mais, des micros à domicile........ C'est un VIOL !!!

Portrait de Rasta-Kouette

Centvin wrote:

J'appelle à soutenir cette position collective de nos associations!

Un peu tard pour tirer les sonnettes d'alarmes.

Portrait de Centvin

Bonjour,

Pour répondre au message précédent,je n'ai pas attendu l'articje de SERONET qui colle à l'actualité parlementaire pour pétitionner,transmettre,diffuser les positions des opposants à ce projet de loi.Donc il est encore temps de lutter contre,maintenant et plus tard...

Ne vous cacher pas les yeux le projet de loi ne fait qu'entériner des pratiques et techniques illégales déja en vigueur depuis fort longtemps.Ceux qui en doute peuvent visionner sur PLUZZ l'émission de FRANCE 2 "Envoyé Spécial",diffusé hier soir,ou un reportage trés pointu et serieux nous démontrait comment l'ex DCRI en 2010,écoutait illégalement des "suspects"...

Donc on va perenniser des pratiques déja en vigueur depuis fort longtemps...

Le pouvoir lorsqu'il sera en difficulté parce qu'il y aura une montée virulente des contestations aura l'arsenal supplémentaire qui lui est nécessaire pour mater a sa maniére des luttes sociales,économiques et politiques qui le mettrait en cause sérieusement.

Sarko et Marine peuvent se frotter les mains Hollande à préparer le terrain pour assoir le LIBERTICIDE à venir.Quant on voit les derniéres positions de Marine Le Pen sur la remise en cause de CMU,et l'aide médicale pour les séropositifs étrangers présents sur le territoire,on voit vers ou nous irons.

Donc les associations de Santé ont pris historiquement leurs responsabilités,quand à la nécessité de remettre en cause ce projet de loi.

Centvin.

Portrait de Rasta-Kouette

Portrait de Lomuse

J'ai depuis quelques temps pris le temps de lire et écouter les divers acteurs de la justice, des médias, de la presse, des entreprises, représentants des réseaux et entrepsies du net, CNIL, reportages télévisés (Vox Pop sur Arte dimanche soir dernier quant aux hacking ou vols de données médicales dans le monde, lisible en replay sur le site de l'émission), Ligue des droits de l'Homme, Amnesty International France, Reporters Sans Frontières, Syndicat de la Magistrature, etc.

Médiapart a prosposé 6 heures contre la surveillance de 16 heures à 22 heures en direct hier, avec des parlementaires, des élus, représentants syndicaux, entreprises, etc. Il y a eu un duplex avec la place des Invalides où une manifestation de personnes se sont retrouvées contre la surveillance de masse des citoyens de France et d'autres pays organisée.

Il s'agit d'une loi liberticide pour l'ensemble des libertés et des personnes, (vie privée, opinion, presse, réunion, ...) de part son spectre large et son ambiguité, préparée depuis fin d'année 2014 (articles du journal Le Monde entre autres), avant les attentats de janvier 2015.

Dans d'autres pays cela a déjà été dénoncé, la France est le 6e à surveiller ses citoyens et ceux des autres pays sous couvert de terrorisme.

Les technologies, communications et outils associés (téléphonie, internet) sont devenus des espions et sont utilisés à dessein pour des intérêts multiples.

L'ONU a protégé Edward Snowden, ainsi que d'autres personnes ayant commencé depuis des années à expliquer ce qui est fait par ces états avec ces technologies. Le Sénat aux Etats Unis revient en ce moment même sur les lois du Patriot Act ayant entraîné elles aussi la fin de l'état de droit, l'exploitation des données des habitants du monde via ces technlogies. Le film documentaire primé Citizen Four revient sur ce combat.

Première étape vers la surveillance avec ce passage en France ce jour, suite avec les autres instances démocratiques politiques à la viser, des recours pénaux et judiciaires nationaux puis internationaux sont déjà envisagés par l'ensemble des acteurs cités plus haut (émission d'hier).

Portrait de jl06

la loi  et voté ...............on aura tout  vu la gauche merci ............

Portrait de Lomuse

Voilà qui a voté quoi sur Libération via les réseaux sociaux (il vaut mieux en rire pris à leur propre piège les élus quant aux flux de données et les veille numèriques...): http://www.liberation.fr/apps/2015/05/vote-plr/?utm_campaign=Echobox&utm...

Oui mais pas trop tard.

Les liens sur l'explication du texte via ceux qui ont mobilisé et appelé les députés : http://www.sous-surveillance.fr/#/

La Quadrature du net pour le texte de loi analysé : http://wiki.laquadrature.net/Amender_le_PJL_Renseignement

Le nombre de personnes se mobilisant augmente en fait !!