Malawi : graciés… enfin !

Publié par tofo le 01.06.2010
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Le couple homo qui avait organisé la première cérémonie symbolique de mariage gay au Malawi, condamné le 20 mai dernier à 14 ans de prison et aux travaux forcés pour avoir violé "l'ordre de la nature", a finalement bénéficié d'une grâce présidentielle le 29 mai. Une mesure que le couple n'espérait plus et qui doit beaucoup aux protestations internationales qui avaient accueilli leur condamnation. Explications.

14 ans de prison pour avoir organisé la première cérémonie symbolique de mariage gay du Malawi ! La peine était à peine croyable, elle est pourtant prévue par la loi. Cette condamnation particulièrement sévère était, de surcroît, marquée par une homophobie stupéfiante de la part du juge qui a prononcé la sentence. Selon l'AFP, ce dernier aurait justifié ainsi sa décision : "La condamnation que je vous inflige est destinée à faire peur afin de protéger le public de gens comme vous pour que nous ne soyons pas tentés de reproduire cet exemple horrible (…) Le Malawi n'est pas prêt à voir ses fils mariés à ses fils". Les deux gays condamnés ont respectivement 20 et 26 ans. Lors des deux procès (janvier et février 2010), ils avaient plaidé non coupable. Ce jugement, parfaitement outrancier, a scandalisé à l'étranger. Ainsi, l'Union européenne s'est déclarée " préoccupée par l'homophobie et la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle au Malawi et rappelle que le principe de non-discrimination est inscrit dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques auquel le gouvernement du Malawi est partie depuis 1993". "L'UE invite le gouvernement du Malawi à respecter les obligations qui lui incombent en vertu du droit international relatif aux droits de l'homme et à montrer qu'il est déterminé à promouvoir et protéger les droits de l'homme de toutes les personnes quelle que soit leur orientation sexuelle", a indiqué la Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères. Du côté des Nations Unies, on n'est pas en reste. Le Haut commissaire des Nations Unies aux droits de l'Homme s'est dite "choquée" de la condamnation, jugeant cette décision "ouvertement discriminatoire". "Je suis choquée et consternée par la sentence et les informations rapportées sur la façon dont [les deux hommes] ont été traités durant leur détention", a expliqué le Haut commissaire. Cette responsable de l'ONU a rappelé que la législation qui avait permis cette condamnation "remontait à l'époque coloniale". Cette loi est "discriminatoire et a pour effet de criminaliser, stigmatiser des personnes sur une perception de leur identité", a-t-elle ajouté, soulignant que de telles lois existaient "malheureusement encore dans un certain nombre de pays dans le monde". Elle a appelé les gouvernements à y mettre un terme, soulignant que ces lois violaient "un certain nombre de traités internationaux" dont la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, rappelle l'AFP.

Ce qui est bien avec les protestations, c'est que, parfois, elles portent leur fruit. C'est ainsi qu'on peut expliquer le revirement complet des autorités du Malawi puisque, finalement, le président Bingu wa Mutharika a accordé (29 mai) la grâce présidentielle au couple gay, suite à un entretien avec le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon. "J'ai décidé de leur accorder ma grâce, avec effet ce jour même, et ils seront remis en liberté", a déclaré le président Bingu, cité par l'AFP. "Leur grâce leur a été accordée pour des raisons humanitaires", a-t-il ajouté. Les Etats-Unis ont aussitôt salué cette décision. "Ces personnes n'étaient pas des criminels et elles ne sont pas seules dans leur combat", a indiqué Robert Gibbs, le porte-parole du président Barack Obama dans un communiqué. "Nous remercions le président du Malawi pour ses actions humanitaires ainsi que le secrétaire général de l'ONU (Ban Ki-moon) pour son engagement indéfectible pour mettre un terme aux législations qui entravent la lutte contre le sida, dont les lois qui répriment pénalement les relations homosexuelles entre adultes consentants", a explique, très diplomatiquement, l'ONUSIDA. Quant au couple gracié, il est pour le moment séparé puisque les autorités pénitentiaires les ont reconduits chacun dans leur village respectif. Selon une association locale, chacun d'entre eux a été "chaleureusement accueilli par sa famille". C'est déjà ça…