Masques : un sacré coup !

Publié par jfl-seronet le 24.07.2020
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ThérapeutiquemasquesCovid-19

Emmanuel Macron s'oppose à la gratuité des masques pour tous-tes, mais évoque des aides ponctuelles dans certains cas. C’est sa réponse aux demandes réitérées ces derniers jours d’un accès gratuit aux masques ; masques dont le gouvernement oblige le port depuis le 20 juillet dernier.

C’est non, mais un peu oui quand même. Invité du journal de 20 heures de TF1 mardi 21 juillet, Emmanuel Macron a estimé que l'État n'avait pas vocation à « payer des masques pour tout le monde ». Il a cependant reconnu que, dans certains cas précis, une aide financière à l’achat de masques serait possible. « L'État, et le contribuable français, n'ont pas vocation à payer des masques (...) pour tout le monde, tout le temps. Donc je pense que ça doit rester une politique sociale », a précisément indiqué le chef de l’État. Mais cette fin de non-recevoir a tout de même ses limites. En effet, Emmanuel macron n’a pas écarté l’idée que celles et ceux qui n'ont pas les moyens d'en acheter seront « aidés ». Pas trop le choix quand l’État oblige au port de cet outil de prévention.

Aider les personnes les plus précaires à s’équiper en masques, l’idée semble s’être imposée au gouvernement parce que les pressions ont été fortes sur le sujet, de la part de la société civile et de certaines formations politiques (proposition de loi de la France Insoumise). À l’Assemblée nationale, le 21 juillet, lors des questions au gouvernement, le ministre de la Santé a été interpellé par deux fois sur le sujet. Le député de Mayenne Guillaume Garot (Socialistes et apparentés) a ainsi expliqué que la « question qui se pose est celle de la charge financière que les masques, désormais obligatoires, font peser sur les familles. Pour une famille de quatre personnes, la dépense se monte à plus de 200 euros par mois pour des masques chirurgicaux, et à presque 100 euros pour des masques lavables ». Il a rappelé que son groupe « plaide depuis des semaines pour la gratuité des masques, c’est-à-dire pour leur prise en charge par la puissance publique au nom de la santé publique ». Et le député d’expliquer : « Si certains Français ne peuvent pas porter de masque pour des raisons financières, notre protection à tous en sera altérée. Il s’agit donc moins d’un coût que d’un investissement dans la santé de tous et de chacun pour sortir au plus vite de cette épidémie qui n’en finit pas (…) le port du masque ne doit pas dépendre du pouvoir d’achat de chacun. Quand allez-vous permettre sa gratuité ? » Embarqué dans de longues digressions, le ministre Olivier Véran n’a pas complètement répondu, se bornant à rappeler que « l’État a très tôt fait distribuer gratuitement cinq millions de masques par semaine via les centres communaux d’action sociale et les communes [ce qu’ont contesté des députés-es de l’opposition, ndlr]… et il va reprendre cette distribution de masques gratuits pour le public précaire, notamment pour les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire ». Le ministre a aussi indiqué que « les deux millions de Français présentant une fragilité peuvent obtenir le remboursement des masques chirurgicaux achetés sur prescription en pharmacie ».

La réponse ayant sans doute été jugée insuffisante, une seconde interpellation s’est faite sur le même sujet. On la doit au député Bastien Lachaud (France Insoumise). Là encore, c’est l’impact financier qui est mis en avant. « Alors que notre pays s’enfonce dans la crise sociale, croyez-vous vraiment que nos compatriotes puissent se permettre de dépenser plus de 200 euros par mois pour se protéger et protéger les autres ? Car 228 euros, c’est une montagne pour qui gagne le Smic ! C’est une montagne pour beaucoup d’habitants de ma circonscription de la Seine-Saint-Denis : à Aubervilliers et à Pantin, 30 % à 40 % de la population vit sous le seuil de pauvreté et beaucoup ont désormais des difficultés à payer leur loyer, voire leurs dépenses alimentaires. Vont-ils devoir choisir entre nourrir leurs enfants et acheter des masques ? », a demandé le député. Et d’expliquer : « Si le masque est obligatoire, ce n’est pas aux familles d’en payer le prix. En tant qu’êtres humains, nous sommes égaux devant la maladie ; nous devons donc être égaux devant la protection. La santé est un droit ».

Dans une interview sur Franceinfo, Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la relance avait évoqué la piste d’une « aide ponctuelle aux plus modestes ». « Est-ce qu'il faut une prise en charge complémentaire ? C'est un bon débat, je n'ai pas la réponse ce matin, mais je trouve que c'est une question qui se regarde attentivement », a-t-il déclaré. Une mesure dont le député de Seine-Saint-Denis craint qu’elle ne soit « trop tardive et, surtout, insuffisante ». Fin avril, les députés-es de la France insoumise avaient déposé une proposition de loi visant à instaurer la gratuité des masques, à laquelle la majorité n’avait pas donné suite. C’est donc avec ces éléments en tête qu’Olivier Véran répond : « s’agissant de l’accès des publics précaires à ce type de masques (…) sachez que, dès le début du mois de mai, avant même que les masques aient été rendus obligatoires, l’État a distribué cinq millions de masques aux populations précaires, par l’intermédiaire des associations, des centres communaux d’action sociale – CCAS –, des mairies et des préfectures (…) Ces envois à destination des communes, des CCAS et des sites associatifs reprendront dès la semaine prochaine [semaine du 27 juillet, ndlr]. En outre, lorsque ce sera nécessaire, des envois postaux directement chez les gens seront effectués. Nous nous assurerons ainsi qu’ils disposent de masques de protection sans avoir à débourser le moindre euro ». Mais pour le député de la France insoumise, le compte n’y est pas : « Seulement 5 millions de masques pour 9 millions de pauvres, c’est une goutte d’eau dans un océan de misère ! »

Cette demande de gratuité est logique et (re)vient sur le haut de la pile des préoccupations dès lors que le port du masque est devenu obligatoire dans les lieux publics clos pour enrayer une reprise de l'épidémie de coronavirus. D’autant que l’absence de masque est considérée comme une infraction et pourra même valoir une amende de 135 euros. Si le gouvernement a plafonné le prix du masque chirurgical à 95 centimes d'euros, « cela peut représenter effectivement pour des familles un coût important », a d’ailleurs convenu Bruno Le Maire, soulignant que les entreprises et les administrations équipaient déjà leurs salariés-es. Pointant ce problème de « surcoût pour les populations précaires », l'association de consommateurs CLCV avait demandé (20 juillet) dans un communiqué : « Une aide financière mensuelle de 50 euros par personne composant la famille ». La demande d’un accès facilité aux masques via une forme de gratuité a été également faite par le président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy. Le professeur a indiqué (21 juillet) être favorable à leur gratuité pour « les personnes les plus fragiles ». « Les masques, c'est pas gratuit. Cela constitue un budget pour les familles les plus fragiles », a-t-il noté, interrogé sur BFMTV-RMC. « Le conseil scientifique a beaucoup insisté dans ses derniers avis sur les personnes fragiles, qui sont en situation de précarité ou à la limite. On a beaucoup insisté pour que l'ensemble des moyens pour se protéger contre le coronavirus leur soit donné, avec une forme de gratuité. »

Interrogé le 22 juillet sur France2, Olivier Véran a confirmé que quarante millions de masques allaient être distribués aux Français-es les plus précaires, tentant ainsi d'éteindre la controverse sur le coût que représente pour les plus pauvres ces dispositifs de protection face au nouveau coronavirus. « La France ne laissera pas des personnes dans l'impossibilité de s'équiper en masques », a-t-il déclaré sur France 2. « Nous allons envoyer 40 millions de masques grand public (...) de manière à fournir sept millions de Français qui sont au niveau du seuil de pauvreté, qui sont bénéficiaires de la complémentaire santé. » Un contrat sera passé avec La Poste pour adresser ces masques directement aux personnes concernées, a-t-il précisé.

Comme on le voit, la réponse gouvernementale est partielle, puisque un accès universel gratuit n’est pas retenu par le chef de l’État. Concernant les personnes en ALD, Libération nous rappelle que les « personnes à très haut risque de développer une forme grave de Covid-19 » peuvent retirer gratuitement des masques en pharmacie, sur prescription médicale. Ce droit est applicable au moins jusqu'au 31 août. Aucune information pour le moment quant au maintien de cette disposition. Des discussions seraient en cours.

Masques : un budget conséquent
Le Parisien a publié, lundi 20 juillet, une estimation du budget mensuel que représente l'achat de masques pour une personne seule ainsi que pour une famille de quatre personnes avec deux enfants de 11 ans et plus. Dans le premier cas, le journal estime que le budget mensuel s'élève à 24 euros pour des masques en tissu (le journal se base sur un prix unitaire de 3 euros) et à 57 euros pour des masques chirurgicaux. Pour la famille, la facture grimpe rapidement puisque l'achat de masques en tissus représente une somme de 96 euros par mois, un budget qui atteint les 228 euros si on fait le choix des masques chirurgicaux.

Commentaires

Portrait de basique

Tout d'abord , je ne pense pas que fournir des boites de masques chirurgicaux a longueur d'année soit plus efficace que d'en avoir 5-6 en tissus et de les laver régulièrement (jusqu'a 30 lavages). Côté filtration il y a peu de différence des études récentes le conforte, à nouveau, mais surtout ca coute moins cher et ca pollue beaucoup moins la planète. j'ai vu de nombreux masques chirugicaux sur la chaussée, mais pas un seul masque en tissu.

Je  suis donc pour la prise en charge par la sécu de 15  masques en tissus pour avoir le temps de les laver et les sécher, ce qui couvre allègrement l'année a raison de 30 lavages par masque, avec un coût modeste d'une trentaine d'euro par an et par personne. Il s'agit pour moi d'un dispositif de santé visant à protéger une population dans son ensemble. 

En revanche, pour les masques chirugicaux, je suis pour une utilisation restreinte aux personnes présentant des symptômes, et donc remboursables seulement après visite médicale.