Militante de AIDES en rétention : "Patricia va bien, nous l’avons tous les jours au téléphone"

Publié par jfl-seronet le 06.02.2014
10 913 lectures
Notez l'article : 
5
 
Politiquecentre de rétention

Militante à AIDES, Patricia a été placée dans un centre de rétention administrative ; une décision qui a choqué l’association et tout particulièrement les militants de AIDES à Annemasse où s’investit Patricia. Pour Seronet, Sabrina, Coralie, Joanny, Valérie et Nicolas donnent des nouvelles de Patricia, expliquent ce qui est mis en œuvre pour l’aider, et comment ils vivent son interpellation et son placement en rétention.

Quelles nouvelles avez-vous de Patricia aujourd’hui placée au centre de rétention administrative à Lyon-Saint-Exupéry ?

Patricia va bien, nous l’avons tous les jours au téléphone. Heureusement, en rétention administrative, elle n’est pas privée de son téléphone. Nous avons également pu lui rendre visite il y a quelques jours. Les visites sont possibles tous les jours, même si le temps de visite reste limité. Au centre de rétention, Patricia parle d’une vie rythmée par les repas : le petit déjeuner, le déjeuner, le gouter et le diner. Chaque jour aussi, Patricia nous fait l’état des lieux des entrées et des sorties, l’arrivée d’un compatriote, le départ d’une voisine de chambre, une tentative d’évasion, etc. A chaque appel, Patricia rigole, c’est comme ça que nous la connaissons de toute manière. En revanche, elle craint le retour au Cameroun ; plus que cela, elle en a peur.

AIDES a publié un communiqué pour dénoncer ce qui lui arrivait, quelles autres actions sont conduites pour lui venir en aide ?

Nous avons dans un premier temps écrit aux préfectures de la Haute-Savoie et de l’Ain afin de demander la levée de son obligation de quitter le territoire et sa libération du centre de rétention. Nous n’avons à ce jour aucune réponse à nos interpellations. Nous avons également écrit au juge des libertés pour demander sa libération du centre, nous savons qu’il a pris note de notre courrier, mais il a quand même décidé de renouveler de 20 jours la rétention administrative de Patricia dans le centre. Cette prolongation pourrait être prolongée de 20 jours supplémentaires, si l’administration n’obtient pas du consulat du Cameroun à Marseille le laissez-passer qui permettrait alors de reconduire Patricia dans son pays d’origine. A ce sujet, nous avons également écrit à l’ambassade du Cameroun et au consulat afin de leur demander de ne pas délivrer ce laissez-passer qui ouvrirait la voie à l’expulsion de Patricia, contre sa volonté. Nous n’avons aucune réponse. Nous attendons maintenant un rendez-vous avec le cabinet du Préfet de la Haute-Savoie. Nous sommes prêts à manifester s'il le faut.

Comment les militants vivent-ils ce placement en rétention ?

Nous sommes choqués de voir l’une des nôtres arrêtée alors qu’elle revenait d’une formation de AIDES à Avignon, maintenant retenue, enfermée. Depuis plusieurs mois, Patricia s’implique de plus en plus dans nos actions à Annemasse et en Haute-Savoie. Elle anime avec les autres militants la permanence hebdomadaire de santé sexuelle et assure des actions de prévention sur le département. D’ailleurs, après sa formation de volontaire, elle souhaite se former à la pratique des tests rapides du VIH, les TROD, comme d’autres militants le font déjà en Haute-Savoie. Nous sommes choqués car elle menait une recherche active d’emploi, d’ailleurs lors de notre soirée de Noël elle nous racontait à quel point c’était compliqué de trouver du travail, ou simplement une promesse d’embauche, sans titre de séjour ou autorisation de travailler, alors même que l’administration lui réclame cette preuve pour la régulariser. Nous sommes choqués car la vie de Patricia risque de basculer à cause de ce contrôle de police et du refus de délivrer son titre de séjour par l’administration alors que, depuis des années, sa vie est ici. Elle nous racontait il y a encore peu de temps qu’elle a de la famille en France dans la région et dans l’ouest, ses parents au pays sont maintenant décédés, et son fils fait ses études en Afrique du Sud. Mais pourquoi donc cet acharnement à vouloir briser des vies comme celle de Patricia ?

En dehors de AIDES, quels ont été ou quels sont les soutiens de Patricia ?

Patricia est soutenue dans sa recherche d’emploi par une association à Annemasse qui s’appelle Yelen. Cette association fait un travail important au niveau local en proposant notamment des accompagnements aux personnes migrantes afin de les soutenir dans leur insertion sociale et professionnelle. Elle bénéficie aussi du soutien de la Ligue des droits de l’homme à Annemasse.

Tout récemment, le gouvernement a dressé le bilan de son "action" sur la question de l’immigration. Justement, à l’aune de ce qui se passe pour Patricia, quel jugement portez-vous sur la politique conduite ?

Il est difficile de porter un jugement sur la politique conduite par le gouvernement quelques jours après la prestation du ministre de l’intérieur présentant des expulsions à la baisse en 2013. Néanmoins les chiffres de 2012 sont eux caractérisés de "records". Sur le terrain, pour nous, il faut distinguer deux choses. D’abord, concernant les étrangers malades, que nous accueillons et soutenons à AIDES dans leur volonté de faire valoir leurs droits en France, la situation est de plus en plus difficile, et pas que du côté de l’administration. En effet, le climat n’est pas bon pour les étrangers en France et nous ressentons même du racisme de la part des professionnels de la prise en charge de la santé ou du social.

Concernant Patricia, c’est une toute autre affaire car elle a fait une demande de régularisation, mais il n’est pas question du VIH dans sa situation. Ce que nous observons au travers de sa situation c’est qu’on lui laisse bien peu de chance de réaliser son vœu d’intégration en France, alors qu’elle a fait par deux reprises ce long voyage jusqu’ici. Mais laissons le bénéfice du doute au ministre vu que la politique d’expulsion semble "s’humaniser", même si nous en doutons dans un contexte de nouvelles élections en France.

Quelles démarches depuis son arrivée en France et quels ont été les points de blocage qui ont fait qu'elle se retrouve aujourd'hui en centre de rétention ?

Patricia vit en France depuis 2003. Sa première demande de titre de séjour n’a pas abouti et elle a été renvoyée une première fois. Elle est très vite revenue et a déposé une nouvelle demande. L’administration lui demandait de produire une preuve comme quoi elle était en emploi ou alors qu’elle était au bénéfice d’une promesse d’embauche ce qu’elle n’a malheureusement jamais pu produire. Patricia nous a raconté aussi qu’elle peine a rassembler les preuves de sa présence en France depuis le début des années 2000, lorsqu’elle habitait en région parisienne. Elle faisait notamment sa déclaration d’impôt, comme tout le monde, mais elle a perdu ses documents. D’après elle, l’administration fiscale dit qu’elle ne peut pas lui produire de duplicata qui viendrait attester de sa présence sur le territoire depuis cette période. Au début du mois de décembre, elle a épuisé tous les recours possibles et dès lors l’obligation de quitter le territoire français qui lui a été donnée par la préfecture pouvait être exécutée à tout moment. Elle a pris le risque de partir en formation à Avignon. Arrêtée, elle se retrouve au centre de rétention.

Commentaires

Portrait de Felix77

mais il ridicule de la retenir au milieu de nul part pour rien. Ce n'est pas constructif

Portrait de petitpaumé

Comme toute personne séjournant en france sans titre de séjour valable elle connaissait certainement les risques.

Alors oui on peut être désolé pour l'équipe d'Annemasse, mais les lois de la république doivent aussi être respectées et le fait d'être militant à Aides n'est pas en soit une raison pour ne pas les appliquer.

Une situation qui traine depuis plus de 13 ans aurait certainement du être régularisée avant.

Et puis comme nous pouvons le lire, elle a déja été renvoyée au Cameroun une première fois, donc en revenant en situation irrégulière elle connaissait les risques.

Dommage mais voila la réalité.

Portrait de Superpoussin

Cela donne l'impression qu'être militant chez Aides c'est un peu être au-dessus des lois.

Seronet manque (une fois de plus) sérieusement d'éthique en prenant position sur des thèmes ayant bien peu à voir avec le VIH.

Je vais peut-être surprendre les séronégatifs qui sont payés pour diriger ce site mais le rétrovirus n'est ni de gauche, ni de droite, il n'a pas de couleur politique. En politisant Seronet on marque du mépris envers les séropositifs qui seraient d'une autre tendance. Là pour le coup il y a matière à râler (et à manifester si on aime ça).

Portrait de gys

Ont été écrits pour tous, qu'elle soit militante ou pas, qu'elle soit séropo ou pas là n'est pas la question, on garde sur notre territoire des personnes malfaisantes et on renvoit des personnes qui sont sur notre sol depuis des décennies, faisons preuve d'empathie et de compassion, c'est 1 être humain, mettez vous à sa place si vous étiez dans la même situation......bonne soirée !

Portrait de lounaa2

je n'est pas poster en pensant au politique ,

j'ai réagie face à la situation de cette femme en rétention ,

que elle soit bénévole à aides ou pas perso je m'en fou ,

c'est juste que les humains qui se retrouve en rétention ,

sa me fait réagir , elle n'aurait pas bosser à aides pour moi c'était idem ...

Si ceci na rien à faire sur seronet alors sa serait bien de faire une liste de ce que l'on à le droit de dire ou pas ...

pourtant je trouve que la liberté de s'exprimer et fortement compromise , alors en rajouter ?

GYs merci Kiss

Portrait de Paradixman

Effectivement Superpoussin ton genre de commentaire n'a rien à faire également sur Seronet.

Surtout pour lire des bétises qui me font penser à des propos discriminatoires surtout envers une grande dame qui se bat pour une grande cause dont je te rappel qui est la notre au risque d'en payer le prix fort.

La preuve, alors un peu de respect.

Merci

Tiens je te redonne au passage deux liens:

Merci au redacteur de cet article pour nous avoir donner des nouvelles de Patricia. 

Portrait de Calou28

Superpoussin on ne peut que s'étonner qu'alors que toutes les voies de recours soient épuisées dans le respect des Lois de la République une décision ne puisse être appliquée. Le respect des lois est notre meilleure garantie du respect des personnes sinon retour à l'anarchie et à la loi du plus fort.

Portrait de lounaa2

les lois n'était pas toutes épuiser,  elle à eu la chance de tomber sur un pilote qui à choisis et c'est la loi aussi ,  et son droit ! de ne pas transporter une passagère contre son gré ...Smile

bonne soirée