Montpellier : une ministre à la rencontre des LGBT

Publié par Rédacteur-seronet le 06.10.2012
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A l’invitation de la Lesbian and Gay Pride (LGP) de Montpellier, la ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, s’est rendue dans les locaux de l’association à la rencontre des associations LGBT et de lutte contre le VIH/sida locales. Coordinatrice des actions régionales AIDES Auvergne-Grand Languedoc, Manuelle Bos y était et raconte pour Seronet.
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"Il a beau être chaleureux, le local de la LGP a un inconvénient. Lors des visites ministérielles, il est un peu petit. Trop en tout cas pour accueillir l’ensemble des associations, des élus locaux, des journalistes et des personnalités officielles de l’étape ; en l’occurrence le préfet, Thierry Lataste, la maire de Montpellier Hélène Mandroux, la députée PS Anne-Yvonne Le Daim, le député socialiste Christian Assaf. Finalement au prix d’efforts : un représentant par association, presque tout le monde a pu entrer. Najat Vallaud-Belkacem a présenté les raisons de sa venue. Elle a pour mission, à la demande du Premier ministre Jean-Marc Ayrault, de proposer un plan d'action interministériel de lutte contre les discriminations. Echéance ? Fin octobre. Elle entame donc une grande consultation, à travers le territoire, pour recueillir les différents thèmes de préoccupations des Français. En parallèle, son ministère a créé différents groupes de travail auxquels participent des militants LGBT, de la lutte contre le VIH/sida. Outre son aisance (bon, c’est vrai qu’elle est porte-parole), j'ai été impressionnée par sa connaissance pointue des dossiers concernant les personnes LGBT, les réseaux associatifs, les discriminations, les questions liées au VIH/sida.

Nous étions une douzaine de représentants associatifs. Et la règle pour ce temps d’échange : une seule question par représentant. La question que j'ai posée, après avoir consulté quelques uns de mes camarades militants, portait sur la sérophobie : "Le gouvernement est-il prêt à faire entrer l'état de santé comme une circonstance aggravante dans le code pénal ? L'état de santé n'étant pas inscrit dans le droit, en cas d'agression motivée par la sérophobie ou en cas de discrimination au travail par exemple, il ne peut être retenu comme circonstance aggravante dans une décision de justice... La ministre a répondu du tac au tac : oui, bien entendu, cela faisait partie des aménagements législatifs qu'elle préconiserait dans le plan d'action qu’elle proposera fin octobre. J'ai, par ailleurs, eu l'occasion, à la fin de la rencontre, de lui donner une note sur le sujet. Elle m'a remerciée et m'a assuré que son équipe travaillait en étroite collaboration avec AIDES.


D’autres sujets ont été abordés par les autres représentants associatifs. Camille Bernard du GEST (Groupe D'Etude sur les Transidentités) a questionné la ministre sur ce sujet. Najat Vallaud-Belkacem a évoqué la proposition de loi de Michèle Delaunay lorsqu’elle était députée (elle est aujourd’hui ministre déléguée aux Personnes âgées et à l’autonomie) visant à la simplification de la procédure de la mention du sexe à l’état civil. Il s’agit de permettre aux trans d’avoir plus facilement des papiers en conformité avec leur genre. Cette proposition (jamais débattue à l’Assemblée nationale) va servir de base à une nouvelle proposition de loi dans les mois qui viennent. La ministre a lancé un appel à "témoignages" car, estime-t-elle, ce projet peut se heurter à des obstacles, et c'est l'expérience des personnes trans qui permettra de les lever. En fin de rencontre, j’ai pu discuter avec Camille Bernard et la députée PS Anne-Yvonne Le Daim (membre de la Commission des lois). La députée a été particulièrement intéressée par l'intervention et a assuré de son soutien sur la question.


Assez logiquement, c’est sa mission principale, l’association Le Refuge est intervenue sur la question de l'hébergement d'urgence, dispositif non prévu, nottament pour les jeunes hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes et qui sont en rupture familiale… On les a poussés dehors ! Le responsable du Refuge a interpellé la ministre sur une situation précise. Cet hiver, au moins soixante-cinq jeunes gays pourraient dormir dehors, après avoir été virés de chez eux. Najat Vallaud-Belkacem a assuré qu’elle ferait remonter cette information à sa collègue Cécile Duflot, ministre du logement. Plus largement, elle a évoqué la nécessité de travailler sur cette question de manière transversale puisque les jeunes dans cette situation ont besoin d'être autonome financièrement, de bénéficier de mesures en matière de formation, d’accès à l'emploi, etc.


Pour Amnesty International, le sujet portait sur la dépénalisation universelle de l'homosexualité. L’ONG a demandé si le discours de François Hollande (deux jours plus tôt lors de l’assemblée générale des Nations Unies) serait suivi d'un réel engagement du gouvernement français. La ministre a répondu que le fait pour le président de la République ait évoqué ce sujet dans son discours à l'ONU, le place, de fait, dans les priorités de la diplomatie française. De son côté, Sida Info service a interpellé la ministre sur la situation de la ligne AZUR, la ligne pour les personnes qui s'interrogent sur leur identité sexuelle. L’association ENVIE l’a interpellée sur la situation des "malades du sida" qui souffrent toujours de stigmatisation et de rejet... La ministre l'a assuré que cela restait une priorité pour le gouvernement. Une autre association a porté, de son côté, la question de l’homophobie dans le sport. La ministre a pris des notes qu’elle s’est engagée à donner à sa collègue Valérie Fourneyron, la ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative.


C’est un tout autre registre qu’a abordé l’Autre Cercle. L’association qui agit pour la diversité dans le monde du travail a souhaité parler du monde de l'entreprise et de l’ouverture du mariage pour tous. Quelles mesures règlementaires pour accompagner les chefs d'entreprises et/ou les responsables administratifs pour accompagner la loi ? Najat Vallaud-Belkacem a préconisé de mobiliser les organisations syndicales sur cette question. Promouvoir le "name and celebrate", dénoncer les entreprises qui ne sont pas facilitantes sont quelques unes des pistes évoquées… La LGP Montpellier a mentionné l'existence d'une charte qui pourrait être développée. Autre sujet encore avec l’association Angel qui a parlé des blocages de la part de certains établissements scolaires pour laisser les associations intervenir dans le cadre des cours d'éducation sexuelle. Des cours qui, rappelons-le, sont obligatoires… La dernière question sur l’ouverture du droit du sang aux homosexuels a, assez logiquement, été renvoyée à Marisol Touraine, la ministre de la Santé.


C’est Najat Vallaud-Belkacem qui a conclu la rencontre. La ministre en a profité pour annoncer que le premier mariage d’un couple de même sexe se ferait à Montpellier : celui de Vincent Autin, président de la LGP et de son compagnon Bruno. Ce mariage devrait être célébré par la maire de la ville Hélène Mandroux. La ministre, applaudie, s’est engagée à y assister. Evidemment, il faut, auparavant, que la loi soit adoptée et promulguée. Ce moment d’échange s'est déroulé assez vite, et malheureusement le temps de parole, trop court, n'a pas permis que s’instaure, sur tous les sujets, un vrai débat. Reste que cette initiative de la LGP est à saluer pour l’opportunité qu’elle a constituée pour les acteurs associatifs locaux de porter des revendications sur des enjeux qui nous concernent tous".