Mpox : nouvelles stratégies vaccinales

Publié par jfl-seronet le 11.01.2023
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Thérapeutiquempox

Ne pas crier victoire. Si l’épidémie de Mpox (Monkeypox ou variole du singe) semble maitrisée dans certaines zones géographiques comme l’Europe, elle n’est pas pour autant totalement éradiquée et elle perdure sur le continent américain. Dans ce contexte, la HAS (Haute autorité de santé) recommande des stratégies vaccinales différentes en fonction d’une éventuelle reprise de l’épidémie et de son niveau d’urgence.

Dernières données mondiales

Dans un récent bulletin d’informations (6 janvier 2023), l’Organisation mondiale de la santé (OMS) indique que depuis le début de l’épidémie de Mpox, 84 330 cas confirmés ont été recensés, dans 110 pays et ayant occasionné 74 décès. Pour l’OMS, le risque est désormais modéré pour l’Afrique, la zone méditerranéenne de l’Est, l’Europe et l’Asie du Sud-Est. Il est bas pour la région du Pacifique Ouest et reste élevé pour le continent américain. Ces quatre dernières semaines, la majorité des cas rapportés a été notifiée sur le continent américain (85,9 % des cas) et en Europe (6,9 % des cas). Les dix pays les plus touchés depuis le début de l’épidémie sont les États-Unis (29 715 cas), le Brésil (10 544 cas), l’Espagne (7 500 cas), La France (4 114), la Colombie (4 035), le Royaume-Uni (3 730), l’Allemagne (3 677), le Pérou (3 667, le Mexique (3637 cas) et le Canada (1 460). Ces pays représentent ensemble 85,5 % des cas rapportés. Les hommes représentent 96,6 % des cas, avec un âge médian de 34 ans : 79,2 % des cas concernant des hommes entre 18 et 44 ans. Les femmes représentent 3,4 % des cas. Enfin, chez les personnes dont on connaît le statut sérologique pour le VIH (c’est loin d’être la majorité des cas), 48,1 % des personnes touchées par le Mpox vivent avec le VIH. Les prochaines données concernant la France seront publiées par Santé publique France vers le 17 janvier 2023.

Mpox : une épidémie maîtrisée, et maintenant ?

En décembre dernier, le site vih.org publiait un solide article, intitulé « Mpox : une épidémie maîtrisée, et maintenant ? ». Le journaliste Charles Roncier y rappelle que la « flambée épidémique a été contrôlée dans les pays non endémiques où elle avait surgi cet été. Mais le virus n’a pas disparu complètement et pose des questions de stratégie préventive, mais aussi thérapeutique ». L’article revient notamment sur les réflexions du Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars) publiées dans un rapport. Au terme de ses travaux, le Covars estime que « le scénario le plus probable d'évolution de la maladie est celui d'une circulation virale à bas bruit à l'échelle européenne rendant l'hypothèse de l’élimination complète de l’infection à virus Monkeypox peu probable et conduisant à un risque de reprises épidémiques, voire saisonnières en France et en Europe ». Afin de limiter ces risques de résurgence le Covars recommande de « renforcer la prévention, la surveillance et le recherche ». Le point prévention passe par la poursuite active d’une « campagne de vaccination » tout particulièrement dans les populations exposées afin de permettre une immunisation complète (au moins deux injections. Cette campagne doit permettre un accès facilité aux vaccins et la réalisation de cette vaccination dans les centres de santé sexuelle (CSS) notamment et par diverses professionnels-les de santé. Le Covars recommande aussi d’intégrer la surveillance du Mpox à celle des infections sexuellement transmissibles (IST) et de proposer un dépistage à toute personne ayant un antécédent d’IST aiguë, rappelle VIH.ORG. Comme on le comprend, un des enjeux est l’offre vaccinale.

L’enjeu vaccinal

Le 3 janvier, la Haute autorité de santé (HAS) publie une actualisation de sa « doctrine vaccinale de lutte contre les orthopoxvirus ». Les orthopoxvirus constituent une famille de virus à laquelle appartiennent la variole, mais aussi la vaccine et le Mpox (nouveau nom du virus Monkeypox). La vaccination contre la variole a été obligatoire en France jusqu’au début des années 1980. L’immunité vaccinale des populations a diminué progressivement depuis, favorisant l’apparition de nouvelles épidémies telle que celle de Mpox depuis le printemps 2022. La Direction générale de la santé (DGS) a donc saisi la HAS pour qu’elle actualise la doctrine de lutte contre une « réémergence » de la variole en France et qu’elle y intègre des recommandations pour anticiper le risque d’épidémies dues à d’autres orthopoxvirus. Aujourd’hui éradiquée grâce à la vaccination, la variole a été pendant plusieurs siècles une des premières causes de mortalité dans le monde. Elle se transmet par contact physique direct ou par l’échange d’objets contaminés. En dehors de la variole et du Mpox, les autres orthopoxvirus transmissibles à l’homme (vaccine, buffalowpox, camelpox...) sont considérés comme moins virulents, souligne la HAS. Pour ce nouveau plan, le ministère de la Santé a saisi la HAS et le HCSP (Haut conseil de la santé publique) sur la stratégie à adopter en cas de nouvelle épidémie liée à un orthopoxvirus et sur la place dans la stratégie vaccinale des différents vaccins antivarioliques, de 1ère, 2e et 3e générations. Sur cette base, la HAS a mis à jour la stratégie vaccinale à adopter pour faire face aux orthopoxvirus.

Vaccination : la stratégie la plus efficace

Les vaccins de 1ère génération ont permis l’éradication de la variole et leur efficacité contre le Mpox a été estimée à 85 %. Ils présentent cependant de nombreuses contre-indications et peuvent provoquer des effets indésirables graves, voire mortels. Une seule dose de vaccin est nécessaire et permet l’obtention d’une réponse immunitaire en moins de 10 jours. Les vaccins de 2e génération n’ont jamais été utilisés en population générale et ne sont aujourd’hui pas disponibles en France. Leurs effets indésirables attendus étaient proches de ceux des vaccins de première génération. Le profil de sécurité du vaccin de 3e génération est beaucoup plus satisfaisant, tout en assurant une réponse immunitaire comparable à celle observée avec les vaccins de première génération. Le schéma vaccinal est composé de deux doses de vaccin espacées de 28 jours. Les données d’efficacité contre le Mpox, bien que préliminaires et limitées, suggèrent une bonne efficacité de ce vaccin (entre 76 et 87 % après une première dose). Ces données nécessitent cependant d’être complétées, notamment dans les populations particulières (personnes immunodéprimées, femmes enceintes, enfants, etc.). La vaccination post-exposition est également efficace contre les formes graves et les décès, si le vaccin est administré dans les quatre jours suivant l’exposition. Le délai peut s’étendre à deux semaines pour les personnes vaccinées pendant l’enfance.

Au vu de ces données, la HAS recommande de constituer des stocks stratégiques de vaccins antivarioliques de 3e génération, suffisants pour permettre la mise en place rapide d’une campagne de vaccination réactive, y compris à large échelle si le niveau de menace le justifie, explique le communiqué de l’institution.

Une réponse graduée

La HAS recommande des stratégies différentes en fonction du type d’épidémie et de son niveau d’urgence. En cas de résurgence d’une épidémie de variole, dès les premiers cas survenant sur le territoire national, la HAS recommande le déploiement de la vaccination des intervenants-es de première ligne et la mise en place d’une vaccination en anneaux autour des cas. Le scénario le plus pessimiste, incluant de nombreux cas simultanés sur le territoire national, prévoit une vaccination généralisée à l’échelle d’une région, voire du pays.

En cas d’épidémie de Mpox et en présence de cas isolés ou dispersés sur le territoire national, la HAS recommande la mise en place d’une stratégie de vaccination post-exposition pour les personnes adultes contacts à risque d’exposition au Mpox. La première dose de vaccin doit être administrée idéalement dans les quatre jours après le contact à risque et au maximum 14 jours plus tard. Pour les personnes ayant bénéficié d’une vaccination antivariolique avec un vaccin de 1ère génération avant 1980 et répondant à la définition de contacts à risque, une seule dose de vaccin doit être administrée. Si les cas sont nombreux et simultanés sur le territoire, la HAS recommande en supplément la vaccination préventive des personnes à haut risque d’exposition et des personnels de santé amenés à prendre en charge, diagnostiquer, traiter, ou vacciner des cas ou des personnes-contact.