Municipales 2014 : Médecins du Monde défend la santé des plus précaires

Publié par jfl-seronet le 09.02.2014
5 681 lectures
Notez l'article : 
0
 
Mode de vieprécaritépauvretépaupérisation

Comme de nombreuses organisations non gouvernementales, Médecins du Monde (MDM) est bien décidé à porter ses revendications à l’occasion des élections municipales de 2014. Son slogan "La santé des plus précaires doit être au cœur du débat électoral !", donne une idée précise du champ de son engagement. Récemment, MDM a publié une enquête dont les résultats appuient les revendications qu’elle entend porter dans le cadre de cette campagne.

Porter ses revendications à l’occasion des élections municipale de 2014... Pour cela, MDM situe son action un "an après l’annonce du plan quinquennal de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale", un plan dont on a vu récemment avec les déclarations de François Chérèque (président de l’Agence du service civique) qu’il était perfectible. Pour être plus pertinent dans ses revendications, Médecins du Monde qui souhaite "rappeler à tous les élus français leur responsabilité dans la lutte contre les inégalités sociales et territoriales de santé" a réalisé dans quatorze villes, où elle intervient, une enquête pour "établir un état des lieux des actions menées dans ces municipalités et des obstacles locaux rencontrés dans le champ sanitaire et social". Bref, un audit grandeur nature sur des terrains que MDM connaît bien parce que l’organisation y travaille. Les villes concernées sont : Calais, Grenoble, Lyon, Marseille, Nantes, Nice, Paris, Rouen, Saint-Denis, Strasbourg, Toulouse, auxquelles s’ajoutent trois villes des départements et régions d'outre-mer (DROM) : Saint-Denis de la Réunion, la commune de Koungou à Mayotte et l’Ile de Cayenne (Cayenne, Matoury et Rémire). Le 30 janvier, Médecins du Monde a rendu publics les résultats de son enquête.

Ce que montre l’enquête de MDM

"Les dispositifs sanitaires et sociaux, bien qu’existants, ne sont pas suffisants même si la plupart des villes interrogées ont mis en place des dispositifs sociaux et sanitaires (…) afin de diagnostiquer les besoins des populations précaires et d’améliorer leur accès aux soins et aux droits", explique MDM. "Dans le cas des Centres communaux d’action sociale (CCAS), les résultats de l’enquête révèlent que le recours à l’interprétariat ou à la médiation n’est pas systématique : 55 % ne font jamais appel à des interprètes et 80 % n’ont jamais recours à la médiation. Les Permanences d’accès aux soins de santé (PASS), dispositifs de prise en charge médicale et sociale situées au sein des centres hospitaliers sont encore trop peu connues, insuffisamment déployées et souvent non efficientes dans les villes métropolitaines et dans les DROM".

Eau et hygiène : des soucis encore…

"L’accès à l’eau et l’hygiène n’est pas encore une priorité de santé publique pour tout le monde", écrit MDM. "Il existe de fortes disparités dans l’accès effectif à l’eau des populations précaires. Sur les onze villes métropolitaines, un bain douche municipal couvre en moyenne 15 000 ménages pauvres. Bien que toutes les villes enquêtées disposent de points d’accès à l’eau potable et aux bains-douches, leur nombre est insuffisant. Ainsi à Calais, un seul point d’eau est mis à la disposition des migrants et il n’est ouvert qu’à des horaires restreints et est utilisé pour l’hygiène de 300 à 400 personnes. A Marseille, la majorité des fontaines publiques sont cassées et il n'est pas envisagé de travaux pour les remettre en état dans les prochaines années. Enfin, l’élimination des déchets dans les bidonvilles et les squats reste problématique dans la majorité des villes interrogées".

Précaires et publics spécifiques, peu considérés voire ciblés

Autre point enquêté par MDM, la question du "vivre-ensemble" et l’intégration des personnes les plus précaires dans l’espace public. "Il existe une forte disparité entre les villes", explique Médecins du Monde. "Les arrêtés municipaux se multiplient : 29 % des villes sondées appliquent des arrêtés "anti-mendicité" ou "anti-prostitution". Ces politiques de "tranquillité publique" criminalisent et stigmatisent les populations les plus vulnérables et les éloignent des dispositifs de droit commun. Par exemple, Nice applique un arrêté anti-mendicité : cette mesure est prise dans le but d’éloigner les personnes sans domicile fixe des lieux fréquentés, véritable incitation à la discrimination envers les pauvres. Enfin, parmi les villes enquêtées, 50 % font état d’actions répressives répétitives envers des publics spécifiques. Il s’agit essentiellement de pressions policières ou d’actes d’intimidation.

La santé au cœur de la campagne

Médecins du Monde souhaite que "la santé soit au cœur du débat municipal et formule des recommandations". Par exemple, celle du "renforcement et de la multiplication des dispositifs d’accès aux droits (type CCAS) avec la promotion au sein de ces structures de l’interprétariat, la médiation et la simplification de l’accès à la domiciliation. Afin d’améliorer leur efficacité, il est nécessaire d’impliquer les associations qui mènent des actions auprès des plus précaires". Autre préconisation : "La promotion des PASS, y compris mobiles et spécialisées, et des dispositifs d’accès aux soins de proximité dans le respect du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et l’inclusion sociale" ; "la facilitation de l’accès à l’eau et l’hygiène des plus précaires, quel que soit leur type d’habitat et le ramassage des ordures pour tous les habitants, y compris dans les bidonvilles" ; "le changement de regard sur les personnes les plus précaires en les intégrant dans l’espace public" et "l’amélioration de la lutte contre les inégalités sociales et territoriales de santé dans les DROM".