Objectifs de développement du millénaire, hépatites, financements innovants : trois thèmes au cœur de cette première journée de l'AFRAVIH 2014

Publié par Sabrina Roduit le 28.04.2014
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ConférencesAfraVIH 2014

Au travers des symposiums de l’ONUSIDA et de UNITAID et de la cérémonie d’ouverture de la 7e conférence francophone sur le VIH, trois thèmes de plaidoyer semblent se dessiner comme étant au cœur de la conférence.

Tout d’abord, cette conférence vient à point nommé pour faire le point sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement, qui arriveront à échéance en 2015. Des débats sur l’avenir, sur comment se situer entre des objectifs intégrés à une santé plus globale ou défendre une lutte contre le sida spécifique, alors que des millions de personnes attendent encore un traitement. Tout le monde n’est pas d’accord. Michel Sidibé, directeur exécutif de l’ONUSIDA, rappelle que même si ces objectifs n’ont été que partiellement atteints, ce n’est pas le moment de baisser les bras. Certains groupes sont toujours plus touchés, avec des discriminations trop souvent présentes en lieu et place de l'accès universel au dépistage et au traitement ; notons une marginalisation des personnes consommatrices de drogue, des hommes victimes de lois homophobes dans plus de 70 pays, des jeunes filles et femmes victimes de violence, des personnes migrantes qui n'ont souvent qu’un faible accès aux dispositifs de santé. C’est le moment de rappeler le lien qui existe entre prévention du VIH et droits humains.

L’idée de travailler sur une approche de la santé plus globale a été amenée à différentes reprises. Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel de médecine, la préconise également pour créer des synergies dans la recherche, avec d'autres maladies chroniques (cancers, maladies cardiovasculaires), vu que des points communs sur les altérations de l'immunité se retrouvent.

Les hépatites… en question

Vient ensuite la question des hépatites virales. Avec la révolution liée à l’arrivée des nouveaux traitements contre l’hépatite C, la problématique de leur coût est au centre du débat. Actuellement sont avancés les chiffres de 56 000 euros pour un traitement de 12 semaines dans les pays du Nord, alors que les coûts de production tombent à moins de 200 dollars ! Des voix indignées s’élèvent pour que les médicaments soient remis dans le bien commun, pour le profit des malades, et non des actionnaires des pharmas ! Selon Isabelle Andrieux-Meyer de Médecins Sans Frontières, un plaidoyer fort doit être mené pour rendre véritablement possible l’accès à un vrai diagnostic, fiable et accessible à toutes les populations vulnérables, en particulier dans les pays les plus concernés. Elle revendique également des licences qui sont favorables aux gens et non aux industries pharmaceutiques, et d’éviter les situations de monopole d’une firme.

Un financement pérenne

Côté financement, le combat doit continuer, comme l’ont souligné les intervenants ; mais il faut pour cela assurer un financement durable. Pour ce faire, il est nécessaire d’avoir des sources de financement innovantes. Le modèle proposé par Philippe Douste-Blazy (UNITAID) s’inscrit dans une idée de contribution solidaire. Il s’agit de prélever des taxes très faibles sur les activités qui profitent des revenus de la globalisation. Une taxe sur les billets d’avion (1 euro par trajet) permet depuis 2006 de financer des traitements, des tests de dépistage, à hauteur de plusieurs millions de dollars par an. D’autres pistes seraient encore à imaginer (par exemple sur la téléphonie mobile, les transactions financières, les ressources extractives, Internet). Un autre axe est le travail mené pour développer des communautés de brevet, il s’agit de négociation avec les entreprises pharmaceutiques pour permettre un accès plus rapide et moins coûteux aux molécules antirétrovirales, en limitant l’impact de la propriété intellectuelle qui empêcherait pendant près de 15 ans de développer des versions génériques des nouveaux traitements. Ce mécanisme a également fait ses preuves pour faire baisser les coûts et rendre certains traitements de première ou deuxième ligne plus accessibles dans le monde. Il faut s’appuyer sur ces innovations et les pousser encore plus loin.

Concernant ces préoccupations, gageons que ces questions seront entendues, mais surtout soutenues par les dirigeants politiques, car la lutte est aussi et surtout politique.