Pénalisation : que se passe t-il en Suisse ?

Publié par olivier-seronet le 05.11.2008
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justice et VIH
Depuis 1990, plus d'une quarantaine de personnes ont été poursuivies pénalement en Suisse pour tentative de transmission ou transmission effective du VIH. Les condamnations vont de quelques mois à plusieurs années de prison.

Ces actions en justice se basent sur deux articles du code pénal qui ne criminalisent pas la transmission du VIH en tant que telle mais, d'une part, les “lésions corporelles graves” intentionnelles ou par négligence (art. 122 CP) et d'autre part la “propagation d'une maladie de l'homme” (art. 231 CP). Ce dernier, inscrit dans la législation à des fins de sauvegarde de la santé publique et pour lutter contre la propagation des infections sexuellement transmissibles, n'avait plus été invoqué depuis 1951 lors d'un cas d'une transmission de blennorragie. En février 2007, la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral suisse a confirmé une condamnation à trois ans de prison ferme pour un homme qui avait exposé sa partenaire au VIH sans qu'une contamination ait eu lieu : “Ni la cour cantonale, ni les premiers juges n'ont mentionné qu'ils tenaient compte, comme élément à décharge, du fait qu'aucune des partenaires du recourant [la personne poursuivie] n'avait été finalement contaminée (…) en qualifiant les actes du recourant de crimes manqués de lésions corporelles graves et de crimes manqués de propagation d'une maladie de l'homme” (1). Autre dérive de la loi, dans le cadre d'un jugement pour “tentative de propagation d’une maladie” en 2006, en plus d'une sentence d'un an de prison avec sursis malgré l'absence de toute transmission du virus, une femme a été condamnée par le tribunal de Zurich à fournir le nom de tous ses partenaires, y compris ceux avec lesquels elle a eu des rapports sexuels protégés. La même année, un homme de 74 ans a été condamné à neuf mois de prison avec sursis pour avoir transmis le VIH à sa partenaire, alors qu'il ignorait qu'il était séropositif. A noter qu'en aucun cas la notion de responsabilité partagée n'est prise en compte… Un jugement du Tribunal fédéral suisse a d'ailleurs récemment réaffirmé que “toute personne qui a un partenaire occasionnel doit utiliser le préservatif.”

Deborah Glejser, Groupe sida Genève

(1) Arrêt du 1er février 2007 de la Cour de cassation pénale.

illustration : Yul Studio