Prisons : un calvaire au Canada !

Publié par jfl-seronet le 14.05.2010
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Les chiffres sont imparables. Ils indiquent qu'une "crise du VIH et de l'hépatite C sévit dans les pénitenciers fédéraux au Canada. Ces chiffres sont d'autant plus pris au sérieux qu'ils émanent du Service correctionnel du Canada (SCC) qui a publié, fin avril, un rapport à ce sujet. Les militants canadiens de lutte contre le VIH montent au front.
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Le Rapport du Service correctionnel du Canada (SCC), publié en avril 2010, révèle que "le taux de prévalence du VIH dans les pénitenciers fédéraux est égal à celui de plusieurs pays d'Afrique subsaharienne et, même, supérieur à celui d'autres régions du monde. A 4,6 %, le taux d'infection à VIH dans les pénitenciers fédéraux est quinze fois plus élevé que dans la société en général. En ce qui concerne l'hépatite C, le taux d'infection de 31 % dans les pénitenciers fédéraux est trente-neuf fois plus élevé que dans la population dans son ensemble. Dans les deux cas, les femmes incarcérées et particulièrement les femmes autochtones [les femmes indiennes pour simplifier], dont 11,7 % sont atteintes du VIH, sont infectées par le VIH et l'hépatite C de manière disproportionnée."

Cette situation, nombreux sont les acteurs de la lutte contre le sida qui la dénoncent. Une des explications est la quasi absence de prévention dans les établissements pénitentiaires. "Environ la moitié des détenus interrogés partage des aiguilles ou des seringues usagées pour s'injecter des drogues, explique une des responsables du Réseau juridique canadien VIH/sida, tandis qu'environ le tiers d'entre eux ont déjà partagé une aiguille avec une personne qui était atteinte du VIH ou de l'hépatite C ou dont l'état d'infection était inconnu (…) Cela pose manifestement un risque de transmission du VIH ou de l'hépatite C, un risque qui pourrait être évité grâce à des programmes d'échange d'aiguilles et de seringues dans les prisons".

Pour les associations, la quasi absence de prévention se double d'autres difficultés. L'une porte sur la politique pénale elle-même qui fait mécaniquement augmenter les taux d'incarcération. "Les projets de loi s'attaquant au crime qui ont été récemment proposés comprennent des politiques sur les peines d'emprisonnement obligatoires [notamment contre les personnes usagères de drogues]", explique le Réseau juridique canadien VIH/sida qui affirme que "la hausse des taux d'incarcération fait augmenter le taux de VIH et d'hépatite C". L'autre problème est celui de la prise en charge médicale des personnes dans les établissements pénitentiaires.
"Je suis troublé par le manque de continuité que montrent les prisonniers infectés par le VIH dans la prise de leurs médicaments antiviraux, explique Greg Simmons, représentant des détenus au Conseil canadien de surveillance et d'accès aux traitements. Toute interruption de leur traitement pourrait avoir des implications graves pour leur santé et entraîner une résistance aux médicaments. Le [Service correctionnel du Canada] doit permettre aux détenus de récupérer leurs médicaments après l'incarcération et changer la manière dont les pharmacies des pénitenciers fédéraux surveillent et commandent les médicaments".

En fait, à la lecture des arguments des associations, on comprend que l'équation est simple : on enferme plus du fait d'une politique pénale intransigeante dans des établissements où la prévalence du VIH et du VHC est très forte, où il n'y a quasiment pas de prévention ni de réduction des risques et où la prise en charge médicale des personnes touchées est, au mieux, aléatoire. Bref, une situation explosive qui alarme les associations et laisse de marbre les autorités.
Source  : AIDSLaw

Photo : Nicolas Ducret