Prostitution : la clientèle ciblée

Publié par jfl-seronet le 24.04.2011
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Le rapport d’une mission d’information parlementaire, des sorties quotidiennes de ministres, des personnalités qui parlent de leur recours aux services de travailleuses du sexe… le débat sur la prostitution est relancé en France. Le problème, c’est qu’il l’est uniquement sous l’angle de la répression. Cette fois, d’ailleurs, il s’agit de poursuivre et faire condamner les clients.
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La première à avoir dégainé, c’est Roselyne Bachelot dans une interview au "Parisien", fin mars. La ministre des Solidarités et de la cohésion sociale indique clairement qu’elle est favorable à une pénalisation des clients des prostituées. "La prostitution n'est jamais volontaire, assure-t-elle. Près de 85 % des prostituées sont soumises aux réseaux de proxénétisme internationaux issus principalement des pays de l'Est et d'Afrique sub-saharienne (...) Ces femmes se prostituent car elles n'ont pas le choix", affirme la ministre pour expliquer son choix. L’idée est simple, il s’agit, de présenter, assez vite, un projet de loi pour qu’il soit applicable dès 2012. Ce projet, les députés de la mission parlementaire d’information sur la prostitution l’ont en tête. Il s’agit, à l'instar de la Suède, de créer un délit pour réprimer le recours à la prostitution en sanctionnant les clients de six mois de prison et d'une amende de 3 000 euros. "Pénaliser les clients, c'est leur faire comprendre qu'ils participent à une forme d'exploitation de la vulnérabilité d'autrui" et "réaffirmer le principe de non-patrimonialité du corps humain et lutter contre les inégalités et les violences dont sont victimes les femmes", peut-on lire dans le rapport parlementaire intitulé "En finir avec le mythe du plus vieux métier du monde". Le but d'un tel délit "ne serait pas, bien entendu, d'emprisonner tous les clients" mais de leur "indiquer quelles sont les conséquences potentielles de leur acte et quelle est la responsabilité qui est la leur dans la perpétuation de la prostitution", estime le rapport. Celui-ci indique d’ailleurs que la pénalisation du client constitue "à terme la meilleure piste pour voir diminuer la prostitution en France, là où tous les pays qui ont réglementé cette activité l'ont vu augmenter".
Ministre de la Justice, Michel Mercier, s'est déclaré (13 avril) "plutôt pour" l'idée de sanctionner les clients des prostituées. "Il faut lutter contre la prostitution sous toutes ses formes", a expliqué le ministre sur France Inter. "Il est bien certain que si l'on ne s'attaque qu'aux prostituées qui sont déjà des femmes malheureuses, on ne risque pas d'arriver à un bon résultat, parce qu'il y a des siècles qu'on lutte de cette façon-là", a-t-il ajouté. Le ministre de l'Intérieur Claude Guéant s'est montré beaucoup plus circonspect, soulignant que la pénalisation des clients supposerait une révolution juridique, la prostitution n'étant pas un délit en France.
Qui est concerné par le travail du sexe en France ? Le rapport de la mission parlementaire donne des chiffres sur la prostitution en France, mais il rappelle qu’ils sont à manier "avec précaution" tant la pratique reste "difficile à quantifier". Selon les estimations du Syndicat du travail sexuel, entre 18 000 et 20 000 personnes seraient travailleuses du sexe en France, près de 80% étant des femmes. La prostitution masculine représenterait entre 10% et 20% de la prostitution de rue. Selon des sources associatives, entre 4 000 et 10 000 mineurs se prostitueraient. Autre donnée, la prostitution est exercée à plus de 80% par des personnes étrangères (contre 20% dans les années 1990). Les principaux pays d'origine de la "traite" sont la Bulgarie et la Roumanie pour l'Europe de l'Est, le Nigeria et le Cameroun pour l'Afrique et la Chine pour l'Asie. Par ailleurs, en 2010, 1 367 personnes ont été mises en cause pour racolage par la police nationale.
De son côté, Act-Up Paris a dénoncé (13 avril) les "conséquences sanitaires" d'une éventuelle pénalisation de clients de prostitués, estimant que cela pourrait "provoquer des contaminations" au VIH-sida. La présidente de la mission parlementaire d'information, la députée (PS) Danielle Bousquet, "s'exhibe depuis des mois dans les médias pour défendre cette disposition qui va provoquer des contaminations au VIH/sida et d'autres IST, entraîner des retards dans le dépistage et freiner un peu plus l'accès aux soins", écrit Act-Up dans un communiqué. "Les prostitués devront aller exercer dans des endroits reculés, dans des conditions "insécurisantes", ce qui les fragiliseront dans les négociations sur l'utilisation du préservatif". Cela "contredit les principes de la lutte contre la pandémie, tels qu'ils ont été notamment rappelés par le Conseil national du sida", ajoute l'association, qui plaide pour la reconnaissance d'un statut et de droits pour les "sex workers" (travailleurs du sexe).
"Pour les associations et syndicats de défense des droits des prostituées, très majoritairement opposés, la pénalisation est une mesure "liberticide". Elles relèvent que les parlementaires de la mission, présidée par la socialiste Danièle Bousquet, confondent trop souvent prostitution et exploitation", écrit "Libération" (13 avril). Les associations semblent surtout inquiètes des risques de précarisation : avec un client devenu délinquant, les prostituées n’auront plus le temps de le choisir, elles devront s’isoler. "La pénalisation des clients risque de baisser leur nombre et d’amoindrir les revenus des prostituées. Celles-ci craignent une augmentation du non-paiement des passes, donc des viols, accompagnés d’actes violents", explique Tiphaine Bernard, du Strass (syndicat des travailleurs du sexe).

Commentaires

Portrait de romainparis

Oui, la seule clientèle ciblée est celle de la rue. Font-ils s'attaquer aux hommes d'affaires ou politiques qui utilisent et usent des prostitué(e)s par d'autres biais ? Non. Bache-à-l'eau et cie prétendent agir pour le bien des prostitué(e)s mais ce n'est que l'hypocrisie électorale... Ils ne veulent pas s'attaquer à la prostitution, ils veulent juste qu'elle ne soit pas visible. Qu'ils foutent la paix aux putes et qu'ils mettent plus de moyens pour s'attaquer à ceux et celles qui les exploitent : les proxénètes, ces esclavagistes.