PVVIH : retraites forcées !

Publié par jfl-seronet le 13.05.2023
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Droit et socialretraite

Entre janvier et avril 2023, la nouvelle réforme des retraites a été pliée. Au final : une crise sociale dont on ne voit pas bien la sortie et une crise politique à l’issue incertaine. Un texte incomplet qui semble répondre temporairement aux enjeux budgétaires, tout en creusant des inégalités. Des inégalités qui tiennent au refus de l’exécutif de prendre en compte des spécificités liées à des parcours professionnels atypiques du fait de l’état de santé. C’est le cas, notamment, des personnes vivant avec le VIH (PVVIH) et tout particulièrement, celles qui ont connu des parcours thérapeutiques compliqués. Comment s’est organisée la mobilisation des PVVIH et des personnes LGBT+ durant ces mois de débat ? Que va-t-il se passer désormais avec cette loi ? Première partie.

Coup de téléphone au lieu de mobilisation de AIDES à Angers. Au bout du fil, une travailleuse sociale qui expose la situation dont elle s’occupe. Elle accompagne une personne vivant avec le VIH qui connaît des soucis financiers. Celle-ci est à la recherche de différentes aides financières pour compléter une retraite qui semble insuffisante. La travailleuse sociale a appelé les militants-es de AIDES car la personne concernée prend en plus de son traitement anti-VIH des compléments alimentaires qui ne sont pas remboursés. Ils lui coûtent une centaine d'euros par mois et elle a du mal à faire face, au vu du montant de sa pension. Comment faire prendre en charge ces compléments ? Comment compléter une retraite trop basse ?

Edouard vit à Grenoble lorsque son témoignage est recueilli par des militants-es des ActupienNes, dans le cadre d’une étude pilote de l’association sur la « situation sociale, économique, affective et de santé des personnes séropositives vieillissantes ». Lors de l’échange, il parle de la retraite : « Moi, ça va être compliqué parce que j’ai 15 ans en Espagne où j’ai vécu. J’ai quand même travaillé quelques années légalement en Espagne, en France aussi. Je sais pas comment ça va se passer, mais les papiers… Pareil en Suisse, j’ai vadrouillé, je n’ai plus aucun papier ». « La retraite ? Pas encore. J’ai beaucoup de soucis dans la mise en place de ma retraite, ils ont mélangé invalidité, handicap et retraite normale. Ils m’ont obligé à la demander en décembre, parce que je ne pouvais pas la déclarer avant. Normalement, je devrais entrer en retraite dans quinze jours. Ben, ne rêvons pas », explique Xavier, lui aussi de Grenoble, interrogé dans cette même étude. Sabine, habite Marseille : « J’ai travaillé toute ma vie. Et là dernièrement, j’ai fait une demande parce que je commençais à être extrêmement fatiguée. J’ai demandé à ce qu’on me mette en invalidité. C’était hyper compliqué, donc l’administration a facilité les choses, ils m’ont mise en retraite [pour invalidité]. Je touche 750 euros par mois ».

Sur Seronet, un séronaute poste, le 10 mars, ce message : « Alors que le sujet des retraites agite actuellement partis politiques, syndicats et que des Français manifestent sur ce thème, je n'entends rien, vraiment rien, côté associatif, et en particulier ici de la part des associations censées défendre les intérêts des personnes touchées par le sida. Je parle, ici, de sida car je pense à celles et ceux que ce virus et ses effets ont amenés à être exclus de la vie active tôt et dont le calcul de pension de retraite risque de se faire de façon catastrophique. Bien pire que tout ce qu'on entend, ici et là, parmi des gens mécontents de leur sort. Pour que les choses soient plus claires : je vais parler de mon cas. Ma dernière année sans VIH, je l'ai gaspillée à faire mon service militaire ; service militaire qui n'a donné lieu à aucune cotisation (…). Ensuite, j'ai connu une vie active « normale » d'environ trois ans avant d'en être éjecté. Je suis très loin d'avoir 25 années cotisées et pour mon calcul de pension, a été prise en compte une moyenne incluant les jobs étudiants que j'ai pu effectuer jeune, à raison souvent de un à deux par an, payés au smic. C'est une catastrophe et je m'attendrais à ce que des associations de malades évoquent ce problème qui ne concerne pas que moi et d'ailleurs pas que des personnes touchées par le VIH. Connaissez-vous une association VIH qui s'est emparée de ce problème particulièrement important pour les personnes concernées ? Des débats, des consultations ont-ils ou vont-ils avoir lieu sur ce sujet ? »

Des questions, des interrogations, des craintes surtout… notamment pour certaines personnes vivant avec VIH, voilà ce que suscite la nouvelle réforme des retraites, adoptée aux forceps et toujours largement rejetée dans l’opinion publique. Mais reprenons l’histoire…

Clang, clang, CLANG ! Ces dernières semaines, les déplacements présidentiels comme ministériels sont perturbés par des concerts de casseroles, des huées et des sifflets pour protester contre la promulgation, par le Président Emmanuel Macron, de la loi Retraites, dans la nuit du 14 au 15 avril. La décision paraît le 15 avril au Journal officiel. Le 21 avril dernier, c’est le ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun, qui est accueilli de la sorte par quelque 250 personnes, lors d’un déplacement à Montreuil (Île-de-France) où il visite une maison de santé pluri-professionnelle. Cette visite, comme d’autres, est tendue : des manifestants-es essayent de pénétrer dans l'enceinte de la structure avant d'être repoussés-es par les forces de l’ordre et du gaz lacrymogène. « C'est pas des bruits de casseroles qui m'empêcheront de continuer à travailler, à avancer », commente le ministre. Reste que derrière son propos aux allures de rodomontade, François Braun concède qu’il y a un problème. « Il y a un vrai malaise dans la société. On en est tous conscients. Le président l'a dit, ce malaise est multifactoriel. Il y a le problème des retraites et il y a aussi une problématique d'accès à la santé pour nos concitoyens et ça contribue au malaise, à ce mal-être et à cet énervement », explique le ministre, lors d’un point presse. « Nous avons tous à assumer une part de ce malaise et à mettre en place des solutions pour répondre aux problématiques qui nous sont spécifiques », complète-t-il. Une perspective qui concerne davantage une énième réforme du système de santé que des aménagements à la nouvelle loi, dont la mesure-phare demeure le report de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans. Depuis, mi-avril, date de la décision du Conseil constitutionnel de valider l’essentiel de la loi et sa promulgation par Emmanuel Macron dans la foulée, l’exécutif avance l’explication d’une « crise » dont la loi Retraites serait un des éléments de contexte, alors qu’elle semble pourtant en être le déclencheur.

Tout commence le 10 janvier 2023. Le projet est présenté par la Première ministre, Élisabeth Borne. En amont, le gouvernement a procédé à des discussions avec les partenaires sociaux (syndicats, patronat) et les forces politiques. Le texte de l’exécutif prévoit de décaler l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans en 2030 et d’accélérer l’allongement de la durée de cotisations à 43 ans dès 2027 (soit un trimestre de plus par an : + trois mois pour les personnes nées en 1961, + six mois pour celles nées en 1962, etc.). En revanche, personne ne devra travailler plus de 44 ans. Et l'âge de la fin de la décote doit demeurer à 67 ans. L’équilibre du système de retraite par répartition est à ce prix, explique le gouvernement ; selon lui : aucune autre solution n’est possible pour éviter une faillite du système. Rapidement, les formations d’opposition dénoncent le texte ; l’ensemble des organisations syndicales aussi — ce qui n’est pas arrivé depuis longtemps. Il y a un désaccord quant au diagnostic : le système de retraites ne serait pas menacé ; un autre désaccord avec l’exécutif sur les moyens : d’autres mesures sont possibles, telle la hausse des cotisations, par exemple. Le gouvernement a rapidement conscience que son choix d’une réforme paramétrique (jouer sur l’âge de départ, le nombre de  trimestres de cotisation…) expose possiblement à un blocage et surtout qu’il va générer des inégalités, même s’il clame le contraire. Au fil des semaines, les discussions font d’ailleurs émerger les angles morts de la réforme. Le gouvernement donne le sentiment de découvrir certains problèmes et leurs conséquences (les inégalités salariales qui pénalisent les femmes, le problème des carrières hachées subies, entre autres, par les personnes qui ont été gravement malades, ou longtemps au chômage…). Il décide d’adoucir ces ajustements paramétriques en faisant des propositions sur les carrières longues (celles et ceux qui ont commencé à travailler très jeunes), en maintenant le départ plus tôt en retraite pour certaines professions (pilotes, hôtesses de l’air et stewards, marins, machinistes, électriciens, régisseurs de la Comédie Française…), etc. Il opte aussi pour des « mesures sociales » comme la hausse du minimum contributif pour une carrière complète à 85 % du SMIC (soit 1 200 euros brut par mois) ou la création d’un CDI pour les seniors-es pour garantir le maintien dans l’emploi au-delà de 60 ans.

Le gouvernement veut un débat rapide : la réforme doit être applicable dès septembre 2023. Il faut donc aller vite : présentation de la réforme en Conseil des ministres le 23 janvier, examen au Parlement en février et mars dans le cadre d’un projet de loi de financement rectificatif de la Sécurité sociale (PLFSS rectificatif). Ce « véhicule législatif » a pour avantage sa souplesse et de limiter la durée des débats. La procédure retenue se heurte à l’opposition politique et syndicale. Le 16 mars 2023, à la tribune de l'Assemblée nationale, Élisabeth Borne annonce, sous les huées de l’opposition, qu’elle déclenche l'article 49.3 de la Constitution et engage la responsabilité de son gouvernement pour faire valider, sans vote, le projet de réforme des retraites. Deux motions de censure sont rejetées, dont l’un à neuf voix près. La réforme est définitivement adoptée. Elle est soumise au Conseil constitutionnel, qui valide l'essentiel du texte dans son avis du 14 avril. Puis, vient le temps des « casserolades » qui résonnent encore aujourd’hui. Clang, clang, CLANG !

« Connaissez-vous une association VIH qui s'est emparée de ce problème particulièrement important pour les personnes concernées ? Des débats, des consultations ont-ils ou vont-ils avoir lieu sur ce sujet ? », interrogeait, il y a quelques jours, un séronaute. Déjà impliquées dans l’accompagnement des personnes vivant avec le VIH (PVVIH), notamment sur les enjeux liés à la retraite, des associations ou services comme les ActupienNes, Act Up-Paris, la ligne Santé Info Droits et d’autres continuent leurs missions. Rapidement, la mobilisation prend un tour inédit chez les militants-es LGBT+ et celles et ceux de la lutte contre le sida… sur un sujet, les retraites, qui n’était pas leur priorité jusqu’alors. Une tribune est publiée le 17 janvier sur Mediapart et sur le site têtu. Elle est à l’initiative du collectif Les Inverti.e.s qui comprend notamment des structures et personnalités engagées dans la lutte contre le sida comme Act Up-Paris, Eva Vocz, le COREVIH Bourgogne Franche Comté, Fred Bladou, Philippe Mangeot, Nathan Boumendil, Marc-Antoine Bartoli ou encore Jean-Luc Romero-Michel. La tribune explique que : « Si cette réforme est appliquée, elle sera nuisible pour tous·tes les futur·es retraité·es. Elle sera particulièrement néfaste pour les LGBTI, car nous sommes encore plus vulnérables que le reste de la population face à la vieillesse ». Les signataires dressent le constat suivant : « Avec la nouvelle réforme des retraites, nous allons devoir travailler plus longtemps, ce qui dégradera nos conditions de santé, ou partir avant d’avoir toutes nos annuités, ce qui réduira nos pensions. Face à ces régressions, nous n’avons pas les mêmes possibilités de s’appuyer sur la solidarité familiale, ce qui nous fragilise davantage quand nous arrivons à la retraite ». Le VIH y est cité, comme un obstacle à l’embauche et un élément ayant des conséquences sur les « ruptures de carrières » et les « difficultés d'évolution professionnelle ». Le texte pointe aussi que, dans les premiers temps, de l’épidémie la maladie a beaucoup tué, privant nombre de personnes LGBT+ de leur retraite. La première manifestation générale est prévue le jeudi 19 janvier : la tribune appelle à y participer.

C’est aussi le cas de l’appel des ActupienNes : « Retraite pour les personnes vivant avec le VIH et une pathologie chronique grave. On nous promet que dalle ! » La force de cet appel est de pointer, avec efficacité et pertinence, ce qui est en jeu pour les PVVIH. « Nous, personnes vivant avec le VIH et personnes atteintes de pathologie chronique grave, avons eu la chance de survivre. La retraite, nous ne l’avions même pas envisagée. Nos parcours professionnels ont été hachés. Nous avons été trop souvent en arrêt de longue maladie. Nous avons été quelques fois orientées vers des dispositifs de remplacement financier inadaptés. Nous étions des artisans, des agriculteurs, des libéraux, des fonctionnaires. Nous n’avions pas même pensé aux ruptures de droits dans le maquis de la protection sociale », développe l’appel. Et d’expliquer : « Pour toutes ces raisons, nous n’avons pas les trimestres requis pour prétendre à une retraite décente. Pour bon nombre d’entre nous, c’est l’Aspa [allocation de solidarité personnes âgées, ndlr] qui se profile jusqu’à la fin de notre vie, soit 961,08 euros par mois [pour une personne seule, ndlr] ; nous sommes et serons en dessous du seuil de pauvreté [en France, il est fixé à 1102 euros par mois pour une personne, ndlr]. »

Les tribunes et pétitions, c’est bien ; manifester, c’est mieux. Rapidement, à chaque journée de manifestation, le Pink Bloc se mobilise. Il est composé de militants-es LGBT+ et de la lutte contre le sida, impliqués-es au sein du collectif Les Inverti.e.s et au-delà. Le 11 février, à Paris, les militants-es du Pink Bloc se sont donnés-es rendez-vous devant le Bisou bar, sur le boulevard du Temple, près de République. La France Insoumise a établi ses quartiers devant le Cirque d’hiver. À côté, le NPA décore un stand de drapeaux et d’affiches : « On ne crèvera pas pour le patronat ». Les affiches font face à la sortie du métro Filles du calvaire ! Sur les bancs, devant la devanture (rose !) du Bisou bar, des membres du Pink Bloc font des selfies, envoient des messages d’appels au ralliement et distribuent les pancartes : « Marre de simuler nos retraites ; on veut en jouir ! ». On déplie de grandes couvertures de survie dorées ; ça prend bien la lumière. C’est mieux pour les photos ; on ne voit qu’eux dans le long cortège qui serpente dans les rues de Paris. Entre deux slogans, on appelle à une assemblée générale pour « réfléchir ensemble aux perspectives de luttes dans le contexte de mobilisation sociale ». Autrement dit : comment faire valoir et progresser les revendications des personnes LGBTQI+ et aussi celles des PVVIH dans la mobilisation contre la réforme des retraites ? L’assemblée a lieu le 18 février. C’est l’amphithéâtre Durand dans le bâtiment Esclangon, sur le campus de Jussieu, qui a été choisi. Trois heures de discussion sont prévues, animées par Les Inverti.e.s. Une soixantaine de personnes est présente ; dont pas mal d’étudiants-es et d’enseignants-es. On y parle combats intersectionnels, meilleure visibilité du Pink Bloc, caisses de grève (« Et si on allait voir des gays de droite pour financer le mouvement ? »), opposition au projet de loi de Gérald Darmanin sur l’immigration et aussi de la réforme des retraites. Celle-ci n’est d’ailleurs pas vue comme un « projet isolé », mais comme une « pièce d’un ensemble plus vaste » (un projet de société ?) qui viserait les personnes les plus précaires, celles qui sont déjà le plus discriminées : les minorités ou le groupe majoritaire sous-représenté que sont les femmes. D’ailleurs, avancent la plupart des participants-es, les « racines de ces différentes oppressions sont identiques », d’où le besoin de « faire front commun ». Derrière la radicalité du discours, apparaît l’idée que les LGBT+ (mais aussi les mouvements féministes) ont tout intérêt à ne pas circonscrire leur champ d’action à leur domaine habituel de revendications, mais à avoir une vue d’ensemble sur ce qui se passe dans la société et à faire de la « politique » sur tous les sujets. Cette fois encore, il a été peu question des PVVIH, peu visibles dans ce collectif.

Évidemment, les personnes LGBT+ comme celles qui vivent avec le VIH ne sont pas les seules à subir un impact particulier de cette réforme des retraites dans leurs vies ; d’autres spécificités n’ont pas été prises en compte dans les discussions et dans le texte final adopté. Cela suscite aussi des craintes. Le 23 avril, le Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigrés-es) et l’ATMF (Association des travailleurs maghrébins de France) pointent, dans un communiqué que la réforme promulguée « touche particulièrement et de plein fouet les couches défavorisées de la population ». « Premiers impactés, les immigrés le sont, parce qu’une grande partie d’entre eux travaillent dans les métiers pénibles, ont des carrières hachées, sont tributaires du minimum vieillesse (allocation de solidarité personnes âgées : ASPA) conditionné jusqu’alors par une durée de résidence en France de plus de six mois. Discrètement et sans débat, un amendement de la droite sur la loi a porté cette obligation à plus de neuf mois par an sur le sol français sous peine de perte des droits. Cet article entrera en vigueur le 1er septembre. Ne nous y trompons pas : s’il vise toutes les personnes retraitées, y compris les Françaises (…) les premières ciblées sont les personnes âgées migrantes n’ayant pas suffisamment cotisé pour avoir une retraite décente, autrement dit les plus précaires ». Et de conclure : « Que faut-il voir dans cette volonté d’empêcher ces personnes âgées de passer quelques mois par an dans leur pays d’origine ? Rien d’autre qu’un moyen de supprimer des droits. Gageons en effet qu’ils ne seront pas informés de ces exigences nouvelles et que des contrôles de plus en plus stricts leur feront perdre leur droit à la première occasion ». Que doit penser un-e travailleur-se immigré-e LGBT, vivant avec le VIH ?

Le Sidaction 2023 s’est tenu le 24 mars, quelques jours après l’épisode du 49.3 qui a permis l’adoption de la réforme des retraites… sans vote du Parlement sur le texte. À cette occasion, le ministre du Travail, Olivier Dussopt, a tweeté un message de soutien : « Donnons, aidons. Trouvons, soignons. Chaque minute une personne meurt du VIH dans le monde @Sidaction ». Message qui lui a valu cette réplique cinglante de Florence Thune, directrice générale de Sidaction : « Merci Monsieur le Ministre pour ce tweet. Néanmoins, si je peux me permettre, vu l’âge moyen des personnes séropositives décédées en 2020 (62 ans, selon les données de l’Assurance maladie), nous aurions préféré un tweet annonçant la suspension de la réforme des retraites ». « La moyenne d'âge de décès des personnes vivant avec le VIH est de 62 ans. Elles vont donc profiter de leur retraite dans un cercueil », avait cinglé Act Up-Paris sur Facebook le 18 mars. Un argument repris dans un flyer « Retraites des Séropos. Métro, boulot, caveau ». « Faut-il que tous-tes les séropos s’engagent dans la police pour avoir à nouveau droit à une retraite anticipée ? », y interpellait, ironique, l’association. Dans leur appel à manifester le 19 janvier dernier, les ActupienNes rappelait leurs revendications : « Nous exigeons le maintien de la possibilité de départ à taux plein dès 62 ans pour les personnes percevant une pension d’invalidité ou une Allocation Adultes Handicapés. Nous exigeons qu’une demande d’Aspa sans condition de validation de trimestres soit possible dès 62 ans. Nous exigeons la validation des trimestres pour les personnes qui ont été orientées à tort vers une Allocation Adultes Handicapés alors que des droits à une pension d’invalidité existaient ».

À l’instar de ce qui s’est passé avec les organisations syndicales, les manifestations, la protestation, la défense de revendications spécifiques, les propositions alternatives n’ont pas permis de faire bouger le curseur gouvernemental. Rien de ce qui a été défendu par la société civile mobilisée en faveur des droits des personnes LGBT+ et des PVVIH n’a été sérieusement considéré, ni pris en compte, alors que leurs arguments ont montré les lacunes du texte. Que va-t-il se passer désormais avec cette loi ? À suivre.
Clang, clang, CLANG !

 

L’étude pilote des ActupienNes
Le rapport de l’étude pilote sur la « situation sociale, économique, affective et de santé des personnes séropositives vieillissantes » réalisée par les ActupienNes est sorti en 2022. Il est téléchargeable gratuitement sur le site de l’association. L’étude visait à investiguer les « situations de personnes séropositives au VIH de plus de 50 ans ». Treize focus groupes ont eu lieu, réunissant 13 participants-es, à Paris et en régions. Ce sont majoritairement des citadins-es qui ont participé. Leur âge moyen était de 60,6 ans. L’enquête porte sur de très nombreux sujets (entourage, le sentiment de solitude, le fait d’avoir parlé de sa séropositivité, le rejet, le rapport au vieillissement, le logement, la précarité, la vie sexuelle, l’avenir, les aspects médicaux, la coordination de la prise en charge, etc.). Il a aussi été question des retraites. Un des constats (page 32 du rapport) est l’existence de « difficultés à faire valoir sa retraite », de « démarches complexes pour des parcours de vie très hachés ».
Les ActupienNes. 20 boulevard Gouvion-Saint-Cyr - 75017 Paris / contact "@" lesactupiennes.fr

 

Commentaires

Portrait de Xtophe2

Petite précision, nous avons interrogé 43 personnes lors des focus groupe.

Concernant les informations et aides sur les droits à la retraite, actuellement nous ne pouvons plus répondre, tant que les décrets d’application ne sont opérationnels !

Il va nous falloir tout comprendre ! C’était déjà compliqué, là cela devient du n’importe quoi !

Retraite, Invalidité &  AAH euhh WTF

Les personnes bénéficiant d’une pension d’invalidité de 2éme & 3éme catégorie peuvent toujours demander la liquidation de leurs droits à 62 ans. (1)

Les personne percevant uniquement une l’AAH (971,27€/mois doivent attendre 64 ans. (2)

Quid de celles et ceux qui cumule Invalidité et AAH. 2 cas se présente :

1/ La liquidation des droits est d’un montant supérieur à l’ASPA ou l’AAH pas de problème.

2/ La liquidation des droits est d’un montant inférieur à l’AAH :

- Cumuler sa retraite plus l’AAH jusqu’à 64 ans (je ne sais même pas si c’est possible pour arriver à un montant maximal de 971,27€/mois).

- Cumuler sa retraite + l’ASPA donc que 962,08€/mois pour vivre.

Retraite, euhh WTF

Entendu par spécialiste à la télé.

Une personne à fait sa demande de retraite pour le 1 septembre, mais après le décret (toujours pas publié, en plus au JO) elle doit avoir acquis un trimestre de plus. Mécaniquement, il lui en manque un maintenant, donc pas de retraite à taux plein, idem complémentaire.

Elle doit écrire pour demander à l'assurance vieillesse d'annuler sa demande de liquidation des droits à la retraite et en faire une nouvelle dans 3 mois

Retraite, euhh WTF

Lorsque tu es au chômage après 59 ans, Pole Emploi ne te radie pas pour que tu valide tes trimestres jusqu'à 62. ils sont en train de bidouiller un truc pour que ça continue jusqu'à 64 ans. Aucune information, si cet avantage reste à 59 ans ou passe à 61 ans.

Concernant l’ASPA : l’âge passe à 65 ans

L’allocation de solidarité pour les personnes âgées (ASPA) anciennement appelée minimum vieillesse est une destinée aux personnes de 65 ans ou plus ayant une pension de retraite trop faible pour pouvoir vivre correctement. Cette dernière est versée par la CNAV pour assurer un minimum de ressources afin de vivre correctement

Cet âge est abaissé à l’âge légal de départ en retraite pour les personnes inaptes au travail ou assimilées inaptes et pour les assurés handicapés atteints d’une incapacité permanente d’au moins 50 %. (donc de 62 Invalidité à 64 ans AAH)

Pour les étrangers, 65 ans et avoir de façon continue depuis au moins 10 ans un titre de séjour autorisant à travailler (cas général). Donc aucune solution à part le RSA.

(1) Pourquoi l’invalidité reste à 62 ans, mon hypothèse est très simple : cela permet de faire des économies. Les pensions d’invalidité sont calculées sur les 10 meilleures années de salaire, les retraites sur les 25 meilleures années, auquel il faut rajouter la minoration pour trimestre manquant en fonction de son année de naissance, donc mathématiquement la retraite sera souvent inférieur à la pension d’invalidité. Il peut y avoir compensation grâce aux points gratuits accordées par l’ARRCO (mais ce n’est pas payer par l’état) !

(2) Petit rappel pour les personnes percevant la MVA – Majoration vie autonome, ont intérêt à rester dans cette situation. Elles doivent faire évaluer leurs droits à la retraite, la MDPH versera via la CAF la différence pour arriver à 1076,14€/ mois vs ASPA 961,08€/mois pour une personne seule.

Xtophe – Les Actupiennes.

Portrait de temis01

Xtophe2 wrote:

Les personne percevant uniquement une l’AAH (971,27€/mois doivent attendre 64 ans. (2)

Non, les personnes en situation de handicap à partir d'un taux de RQTH de 50% et plus qui perçoivent l'AAH se verront automatiquement basculé vers le système de retraite à 62 ans sans intervention de leur part.

Basculement automatique à surveiller bien sûr pour être sûr que tout fonctionne bien.

Ceux qui ont un taux de RQTH de 80% et plus pourront cumuler la retraite et l'AAH en complément.

Ceux en dessous de 80% ne pourront pas et devront se tourner vers d'autre complément de revenu en fonction du montant de leur retraite.