Recommandations européennes : l’EACS est enfin PrEP !

Publié par Mathieu Brancourt le 27.10.2015
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ConférencesPrEPEACS 2015

Troisième journée à Barcelone. Les sessions et plénières continuent. Point d’orgue de vendredi 23 octobre, la présentation des guidelines, recommandations officielles de La Société européenne de recherche clinique sur le sida. Pour la première fois, la PrEP fait son entrée dans cette actualisation 2015. L’occasion aussi de voir leurs intérêts et spécificités, au regard de celle de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Au début de la journée, Sheena Mc Cormack, chercheure coordinatrice de l’essai britannique Proud a dressé le panorama, aujourd’hui assez complet, des connaissances et des résultats d’efficacité de la prophylaxie pré-exposition. Et de terminer par une nouvelle prise de position, assez militante, sur les atermoiements européens dans la mise en place d’une stratégie de prévention des contaminations aujourd’hui validée scientifiquement. "Rentrons chez nous et faisons quelque chose, a-t-elle lancé à la salle comble. Les trithérapies sont arrivées un an après les Etats-Unis. Pour la PrEP, nous attendons depuis trois ans", rappelle la chercheure sur la diapositive finale de sa présentation. Au-delà de son accès effectif, il devenait également urgent que l’EACS prenne acte de ces données et intègre la question du traitement préventif dans ses recommandations.

C’est désormais chose faite. Quelques heures plus tard, le président de l’EACS, Manuel Battegay, a ouvert la session de présentation des recommandations officielles de l’institution européenne. Pour ne lister que les principales nouveautés, on peut remarquer déjà l’invitation à la mise sous traitement précoce, peu importe le niveau de CD4, comme dans les recommandations de l’OMS. Les nouvelles recommandations intègrent aussi la prise en compte des pathologies neurologiques comme facteur de co-morbidité pour les personnes vivant avec le VIH. Ou encore la préconisation d’une approche multidisciplinaire des équipes médicales pour mieux prendre en charge et améliorer la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH. Et évidemment, l’introduction d’un chapitre spécifique sur la prophylaxie pré-exposition, recommandée pour les personnes séronégatives exposées à un "risque substantiel" d’acquisition du VIH, comme les gays n’utilisant pas forcément le préservatif, les personnes trans ou les femmes et les hommes qui sont dans un couple où leur partenaire séropositif n’est pas sous traitement ARV. Sur ce point, ces recommandations de l’EACS collent quasi-parfaitement avec celles de l’OMS, publiées en septembre dernier. En dehors de quelques variantes dans la proposition de certains traitements ou d’approches alternatives, les deux institutions vont dans le même sens de la promotion de nouveaux outils ou stratégies de prévention pour tendre vers les objectifs 90-90-90 de 2020 de l’Onusida. "Les approches de l’OMS et de l’EACS sont différentes mais complémentaires", a estimé de son côté Marco Vitoria de l’OMS.

Ne manque plus que la volonté politique pour faire de ces recommandations des réalités dans les pays d’Europe. Et l’impatience est très forte chez les chercheurs, dont le professeur Jean-Michel Molina. Co-investigateur de l’essai de PrEP ANRS-Ipergay, ce dernier a indiqué en conférence de presse qu’il ne "fallait plus attendre". Il a discrètement glissé qu’il espérait ouvrir des "consultations pour des utilisateurs de PrEP en France d’ici un mois", restant assez vague sur les détails finaux. Interrogé par la suite, il a indiqué que rien n’était encore arrêté mais qu’il concevait cette proposition comme "un acte militant" pour rendre la PrEP disponible en France. Nous attendions un scoop, nous en avons eu un !