Rétention, asile : la Cimade dénonce

Publié par jfl-seronet le 07.10.2017
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Droit et socialcentre de rétention administrativemigrants

Le 28 septembre dernier, l’AFP a commencé à dévoiler quelques uns des aspects du nouveau projet de loi sur l’immigration : allongement de la durée de rétention administrative jusqu’à trois mois voire plus, nouvelles restrictions en matière de droit d’asile, etc. Ce projet est raccord avec l’annonce, en septembre 2017, par le président de la République d’une "ligne plus ferme" en matière d’immigration. Cette première version a suscité de vives critiques dont celle de la Cimade (28 septembre) qui y voir un texte "liberticide et sans précédent".

Dans son communiqué (28 septembre), la Cimade se dit "consternée" par les dispositions mentionnées dans les dépêches de presse "notamment celles de doubler la durée maximale d’enfermement en rétention administrative, ou de priver de liberté des demandeurs d’asile relevant de la procédure Dublin, dans l’hypothèse de leur renvoi vers un autre pays européen". "Si ces choix politiques étaient confirmés, il s’agirait de la plus importante régression pour les droits des personnes étrangères depuis la loi de 2011 du funeste ministère de l'immigration et de l'identité nationale [Eric Besson, ndlr]", explique la Cimade. "A l’époque, rappelle l’organisation non gouvernementale, le gouvernement avait augmenté la durée de rétention de 32 à 45 jours. La durée maximale de rétention n’a cessé d’être allongée depuis la création de la rétention administrative : sept jours en 1981, douze en 1998, 32 en 2003 et donc 45 depuis 2011.

La Cimade appelle "solennellement le président Emmanuel Macron à revenir sur ces premiers choix en ce qui concerne la rétention ou encore sur la possibilité pour l’Ofpra [Office français de protection des réfugiés et apatrides] de juger irrecevable les demandes d’asile de personnes pouvant être réadmises dans un pays tiers sûr". "Pour un gouvernement qui prône le renouveau, il est surprenant de recourir une fois encore aux vieilles recettes des politiques migratoires sécuritaires qui ont prouvé au fil des années leur inefficacité", tacle la Cimade. "Faire notamment de la rétention l’alpha et l’oméga de la politique migratoire est stupéfiant. Nous attendons du gouvernement qu’il revoit sa copie entièrement après avoir sérieusement consulté les acteurs de terrain", a réagi Jean-Claude Mas, secrétaire général de La Cimade.

La Cimade et ses partenaires associatifs disent avoir déjà démontré après la réforme de 2011 qu’enfermer plus longtemps en rétention ne faisait qu’aggraver le traumatisme pour les personnes enfermées (dont des familles avec enfants) et ne permettait pas d’augmenter significativement les expulsions dont la majorité sont mises en œuvre dans les premiers jours de la rétention. Et pourtant, selon les premières informations, l’avant-projet de loi prévoit de passer de 45 jours de rétention administrative à 90 jours, voire 105 en cas de refus d’expulsion.

Sur la base d’un constat similaire, en 2016, le contrôleur général des lieux de privation de liberté avait recommandé de réduire à 32 jours la durée maximum de rétention, pointe l’ONG. "Aujourd’hui, le système français de rétention compte 1 830 places et a concerné en 2016 plus de 50 000 personnes", indique-t-elle. Présente au sein des Centres de rétention administrative depuis leur création au début des années 1980, La Cimade prône leur fermeture.

Quelques données sur les centres de rétention administrative
Comme l’explique "Le Monde" (28 septembre) : "Les Maghrébins sont de loin les plus nombreux dans les centres de rétention administrative de métropole : Algériens, Marocains et Tunisiens représentent près d’un tiers des étrangers enfermés. Ce sont les Albanais et les Roumains qui sont le plus systématiquement renvoyés vers leur pays. Par ailleurs, le passage par un centre de rétention administrative ne conduit pas systématiquement à une procédure d’expulsion. "En 2016, parmi les 23 000 personnes qui ont été enfermées, moins de 9 500 ont finalement été expulsées, dont près de la moitié vers un autre pays de l’Union Européenne", indique le quotidien. Seule une toute petite minorité des personnes étrangères retenues (3,7 %, soit moins de 800 personnes) est libérée en raison de l’expiration du délai légal actuel de quarante-cinq jours. Si la durée légale n’a cessé d’augmenter, le sort des personnes qui y sont retenues est réglé en bien moins de temps. En effet, la durée moyenne du séjour en centre de rétention administrative était de 12,7 jours en 2016, un chiffre stable depuis 2011. Du côté des associations, on rappelle la grande majorité des expulsions sont prononcées au cours des dix premiers jours de rétention.