Santé : l’OCDE dégaine son rapport

Publié par jfl-seronet le 24.11.2017
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Mondesanté

Le 10 novembre dernier, l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) a publié son panorama de la santé 2017. Ce document, particulièrement riche, fait un vaste état des lieux de l'état de santé de la population des 35 pays membres de l'organisation et établit une comparaison de leurs systèmes de santé. Le document pointe également quelques lacunes françaises.

Espérance de vie : 82,4 ans en moyenne

Des modes de vie plus sains, des revenus plus élevés, une meilleure qualité de soins : l'espérance de vie s'allonge dans les pays de l'OCDE (1), note l'organisation dans son panorama de la santé 2017. Le Japon est en tête… et les Etats-Unis loin derrière. L'espérance de vie à la naissance est en moyenne de 80,6 ans dans les pays de l'OCDE, soit dix de plus qu'en 1970. Dans le panorama de la santé publié en 2015, cette espérance de vie était de 80,5 ans : en deux ans, elle a donc augmenté d'un peu plus d'un mois. Les pays où l'on vit le plus vieux sont le Japon (83,9 ans), l'Espagne et la Suisse (83 ans), en tête d'un groupe de 25 nations où l'espérance de vie dépasse 80 ans.

L'espérance de vie des Français à la naissance est relativement longue par rapport aux autres pays de l'OCDE : 82,4 ans contre 80,6 en moyenne. La France arrive en sixième position. Les Etats-Unis (78,8) appartiennent à un deuxième groupe où elle est comprise entre 75 et 80 ans. Les Etats-Unis font moins bien que le Costa Rica (79,6) et le Chili (79,1). En cause, "le caractère très fragmenté du système de santé" (une part importante de la population n'ayant pas d'assurance), des comportements néfastes (obésité, drogue...) et "des taux de pauvreté plus élevés". C'est la Lettonie et le Mexique qui affichent l'espérance de vie la plus basse (74,6 et 75 ans, soit environ 9 de moins que le Japon). Parmi les pays non membres de l'OCDE mais partenaires, il s'agit de l'Afrique du Sud (57,4 ans), essentiellement à cause du VIH. "Dans tous les pays de l'OCDE, l'écart d'espérance de vie entre les hommes et les femmes demeure prononcé", note le rapport: 77,9 ans pour les premiers en moyenne et 83,1 ans pour les secondes, soit une différence de plus de 5 ans.

Les causes de mortalité

"Plus de 10 millions de décès ont été enregistrés en 2015 dans les pays de l'OCDE", note le rapport, selon lequel les causes principales dans la plupart des endroits sont "les maladies du système circulatoire et le cancer". "Dans l'OCDE, plus d'un décès sur trois est lié à une cardiopathie ischémique (maladies coronariennes dont crises cardiaques, ndlr), une maladie cérébrovasculaire ou d'autres maladies circulatoires, et un sur quatre au cancer", selon le panorama. Les écarts sont importants entre les pays. Le Japon et la France affichent les taux les plus faibles de décès dus aux maladies circulatoires, avec 152 et 164 décès pour 100 000 habitants. A l'autre bout de l'échelle, on trouve la Lettonie (654). La moyenne est de 282. La différence entre pays est moins grande pour la mortalité par cancer, comprise entre 123 (Mexique) et 286 (Hongrie) décès pour 100 000 habitants. D’autres causes de mortalité occupent une place particulièrement importante dans certains pays. Ainsi, les maladies de l’appareil respiratoire (les bronchopneumopathies chroniques obstructives surtout) provoquent plus de 100 décès pour 100 000 habitants en Irlande, au Royaume-Uni, au Brésil et en Colombie. Les causes extérieures (agressions, accidents et automutilations) ont été à l’origine de plus de 80 décès pour 100 000 habitants au Brésil, en Lettonie, en Lituanie, en Afrique du Sud et dans la Fédération de Russie. Le VIH-sida est responsable de plus de 50 décès pour 100 000 habitants en Afrique du Sud.

L’alcool

La consommation d’alcool compte parmi les dix principaux facteurs de risque en termes de nombre d’années en bonne santé perdues dans 32 pays de l’OCDE, et demeure nettement supérieure à la moyenne mondiale dans l’OCDE. En 2015, l’alcool a été à l’origine de 2,3 millions de décès dus à des cancers et des maladies cardiaques et hépatiques notamment. L’alcool est majoritairement consommé par les 20 % de la population qui boivent le plus. Globalement, la consommation d’alcool recensée a reculé dans l’OCDE depuis 2000, passant de 9,5 litres par habitant et par année à 9 litres d’alcool pur par habitant par année, l’équivalent de 96 bouteilles de vin. L’ampleur de la baisse varie considérablement d’un pays à l’autre ; en fait, la consommation a augmenté dans treize pays de l’OCDE, ainsi qu’en Afrique du Sud, en Chine, en Inde et en Lituanie. Elle a progressé dans une fourchette comprise entre 0.1 et 1 litre au Canada, au Chili, en Corée, aux États-Unis, en Israël, au Mexique, en Norvège, en Slovénie et en Suède, de même qu’en Afrique du Sud. Sa hausse a été plus forte en Belgique, en Islande, en Lettonie et en Pologne, ainsi qu’en Chine, en Inde et en Lituanie (entre 1,1 et 5,3 litres par habitant). Dans l’OCDE, 12 % des femmes et 30 % des hommes en moyenne s’adonnent régulièrement (au moins une fois par mois) au binge drinking, ou suralcoolisation épisodique. Les taux sont compris entre 8 % en Hongrie et 37 % au Danemark, et présentent de vastes écarts entre les sexes, les hommes affichant des taux plus élevés pratiquement partout. Les écarts les plus faibles sont observés en Espagne et en Grèce (8 à 10 points), et les plus élevés en Estonie, en Finlande et en Lettonie (plus de 25 points). Les Français de 15 ans et plus consomment 11,9 litres d'alcool pur par an, contre 9 dans la moyenne des pays de l'OCDE.

Le tabac

22 % des Français de plus de 15 ans fument, contre 18 % dans la moyenne de l'OCDE. Et près d'un jeune de 15 ans sur cinq fume au moins une fois par semaine en France (19 %, contre 12 en moyenne ailleurs). Dans l’OCDE, un peu plus de 18% des adultes fument quotidiennement (14 % des femmes et 23 % des hommes). Les taux les plus élevés sont observés en Grèce, en Hongrie, en Turquie ainsi qu’en Indonésie (plus de 25 %), et les plus faibles au Mexique ainsi qu’au Brésil (moins de 10 %). L’Autriche, la Grèce et la Hongrie affichent les taux de tabagisme des femmes les plus élevés (supérieurs à 20 %), les plus faibles étant ceux de la Corée et du Mexique, ainsi que de la Chine, de l’Inde, et de l’Indonésie, où ils sont inférieurs à 5 %. S’agissant des hommes, ce sont la Turquie ainsi que la Chine, la Fédération de Russie et l’Indonésie qui enregistrent les taux les plus forts (supérieurs à 40 %), alors qu’ils sont inférieurs à 10 % en Islande ainsi qu’au Brésil. Les hommes fument davantage que les femmes dans tous les pays sauf au Danemark et en Islande, où l’écart entre les sexes est d’environ un point de pourcentage.

Le tabagisme quotidien a reculé dans la plupart des pays de l’OCDE depuis 2000, bien que son taux ait légèrement augmenté en République slovaque (+0.8 point), fortement progressé en Indonésie (+8.8 points), et soit resté stable en Autriche (graphique 4.2). En 2015, 18 % des adultes en moyenne fumaient tous les jours dans l’OCDE, contre 26 % en 2000, ce qui correspond à un recul de 28 %. Les baisses les plus prononcées sont intervenues au Danemark, en Islande, au Luxembourg, en Nouvelle-Zélande, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, ainsi qu’au Brésil, en Fédération de Russie, en Inde et en Lituanie, où elles ont été supérieures à 10 points, et en Norvège (20 points).

Perception de son état de santé

Dans l’optique de comparaisons internationales, les écarts de perception de l’état de santé général sont difficiles à interpréter, explique l’OCDE, car la formulation des questions et des réponses et les facteurs socioculturels peuvent influer sur les résultats. Un biais de tendance centrale a ainsi été observé au Japon et en Corée. En outre, comme les personnes âgées signalent plus souvent un mauvais état de santé que les jeunes, les pays comptant une proportion plus importante de personnes âgées recensent également moins de personnes se déclarant en bonne santé. Ces réserves étant faites, dans la quasi-totalité des pays de l’OCDE, la majorité de la population adulte s’estime en bonne santé.

La Nouvelle-Zélande, le Canada, les Etats-Unis et l’Australie arrivent en tête, avec plus de 85 % des personnes se déclarant en bonne santé. Toutefois, les catégories de réponse proposées dans ces quatre pays diffèrent de celles utilisées dans les pays européens et dans les pays asiatiques de l’OCDE, ce qui introduit un biais par excès.

A l’inverse, moins de la moitié de la population adulte du Japon, de la Corée, de la Lettonie et du Portugal s’estime en bonne santé. La proportion est aussi relativement faible en Estonie, en Hongrie, en Pologne, et au Chili, où moins de 60 % des adultes se considèrent en bonne santé. Dans bon nombre de ces cas, néanmoins, les adultes jugent leur état de santé moyen. Une distinction éventuellement plus nette a trait aux adultes qui s’estiment en mauvaise santé. Dans l’OCDE, c’est le cas de 9 % des adultes en moyenne. Ce pourcentage est supérieur à 15 % au Portugal, en Corée, en Lettonie, en Israël, en Hongrie et en Estonie. Dans tous les pays de l’OCDE, les hommes sont plus nombreux que les femmes à se considérer en bonne santé, sauf en Nouvelle-Zélande, au Canada et en Australie où l’écart est quasiment inexistant. Comme on pouvait s’y attendre, l’état de santé auto-évalué tend à diminuer avec l’âge. Dans de nombreux pays, ce déclin est particulièrement marqué après l’âge de 45 ans, un autre intervenant après l’âge de 65 ans.

De fortes disparités sont également observables dans la perception de l’état de santé selon le milieu socio-économique. Dans tous les pays, les personnes à faible revenu ont tendance à se déclarer en moins bonne santé que cellesdont les revenus sont élevés, même si l’écart varie. Globalement, dans les pays de l’OCDE, près de 80 % des personnes du quintile supérieur de revenu s’estiment en bonne santé, contre un peu moins de 60 % de celles qui ont les revenus les plus bas.  Les personnes vivant dans des ménages à faible revenu ont parfois aussi un accès plus limité à certains services de santé, pour des raisons financières ou autres. Un lien de cause à effet inverse est également possible, un mauvais état de santé conduisant à une baisse de l’emploi et des revenus.

Il serait possible d’améliorer encore l’état de santé de la population en général et de réduire les inégalités en matière de santé en mettant davantage l’accent sur la santé publique et la prévention des maladies chez les personnes défavorisées, et en développant l’accès aux services de santé.

OCDE (2017), "Principales causes de mortalité", dans Panorama de la santé 2017 : Les indicateurs de l'OCDE, Éditions OCDE, Paris.
OCDE (2017), "Consommation d'alcool chez les adultes", dans Panorama de la santé 2017 : Les indicateurs de l'OCDE, Editions OCDE, Paris.
OCDE (2017), "Tabagisme chez les adultes", dans Panorama de la santé 2017 : Les indicateurs de l'OCDE, Editions OCDE, Paris.
OCDE (2017), "Etat de santé général perçu", dans Panorama de la santé 2017 : Les indicateurs de l'OCDE, Editions OCDE, Paris.