Séjour pour soins : c’est politique !

Publié par jfl-seronet le 02.02.2011
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droit au séjourAME
Réforme de l’AME, titre de séjour pour les personnes étrangères malades… Les militants de AIDES ont, ces derniers mois, pas mal battu le rappel des parlementaires dans leurs départements pour leur demander de voter contre les articles de lois qui posent problème et d’interpeller le gouvernement à ce sujet. Certains l’ont fait. D’autres ont botté en touche. D’autres encore sont favorables aux initiatives gouvernementales. Morceaux choisis.
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Députée (PS) de la Haute-Vienne, Marie-Françoise Pérol-Dumont a ainsi écrit le 20 décembre dernier à Xavier Bertrand, ministre du Travail, de l’emploi et de la santé "afin de relayer les remarques formulées par [AIDES] à l’occasion de la réforme de l’Aide médicale d’état", explique la députée dans un courrier adressé à l’association. Sénatrice (PS) de la Corrèze, Bernadette Bourzai indique à AIDES qu’elle a reçu le message "dans lequel vous (…) faites part de votre inquiétude quant aux réformes successives qui nuisent à l’efficacité de la lutte contre le VIH, à travers notamment la remise en cause de l’Aide médicale d’état". En conséquence, elle a "posé au gouvernement une question écrite" (23 décembre 2010) à ce sujet. La réponse est en attente. Cela devrait prendre au minimum trois mois. Sénateur (PS) de la Dordogne, Bernard Cazeau a lui aussi été interpellé par AIDES. Le 12 janvier, il explique qu’au Sénat, les sénateurs socialistes ont "fermement dénoncé cette mesure nauséabonde d’un point de vue politique et perverse en matière de santé publique (….) A cet égard, un rapport des inspections générales des affaires sociales et des finances va dans ce sens. Il juge la mesure inappropriée". Bernard Cazeau note aussi que l’expertise qui contredit le gouvernement a "été gardée secrète. Elle a été publiée, en toute discrétion, le 31 décembre".

Le 13 janvier dernier, Catherine Aumond, la présidente de AIDES de la Région Grand Ouest, écrit au sénateur Jean-Pierre Sueur en amont des débats au Sénat sur le projet de loi sur l’immigration et les "risques pour la santé publique" prévus début février. Elle y rappelle que : "L’Assemblée nationale a adopté une disposition qui remet profondément en cause le droit au séjour pour raisons médicales". Si cette disposition venait à être [définitivement] adoptée, un étranger malade pourrait se voir refuser l'accès ou le renouvellement de son titre de séjour pour raisons médicales, si, dans son pays, il existe quelque part un traitement relatif à sa maladie. Or, nous savons tous qu’il y a une grande différence entre la disponibilité d’un traitement et l’accès effectif à celui-ci (pour des raisons de coût trop élevé, par exemple et donc réservé à ceux qui peuvent payer, à l’"élite"). Cet article remet ainsi profondément en cause le droit aux soins et n’est pas acceptable”. "Ne trouvez-vous pas paradoxal, monsieur le Sénateur, de renvoyer mourir dans leur pays des séropositifs alors que la France, par la voix de son Président et de son épouse, a rappelé son engagement international dans la lutte contre le VIH/Sida ?, interroge Catherine Aumond. Ne trouvez-vous pas également paradoxal, monsieur le Sénateur, de précariser davantage des personnes séropositives qui, en conséquence, verront leur santé s'aggraver ?"
La réponse du sénateur socialiste Jean-Pierre Sueur ne tarde pas. Le 20 janvier, le sénateur répond qu’il "sera très vigilant" sur cette question. Il précise dans sa réponse que la Commission des lois du sénat a adopté [mercredi 19 janvier] un amendement [qu’il] a présenté conjointement avec [ses] collègues Richard Yung et Alain Anziani, visant à supprimer cet article 17 ter. Il n’apparait donc plus dans le projet de loi qui sera prochainement débattu en séance publique au Sénat."
Certes, mais tout n’est pas définitivement réglé pour autant. En effet, un sénateur UMP (Alpes Maritimes), Louis Nègre, a lui déposé un amendement sur ce fameux article 17 ter supprimé. Son amendement vise à rétablir l’article supprimé en commission des lois dans la rédaction suivante. Il s’agit de remplacer la mention "qu’il ne puisse bénéficier" par "de l’indisponibilité". Dans son texte d’explication, Louis Nègre rappelle que "l’Assemblée nationale avait souhaité revenir sur une évolution de la jurisprudence de la juridiction administrative sur l’appréciation, plus favorable aux étrangers, de la condition relative à l’accessibilité aux soins  dans le pays d’origine". Le sénateur UMP critique d’ailleurs le choix de la commission des lois sénatoriale qui a supprimé cet article alors que "l’objectif n'était ni plus ni moins que de revenir à la lettre et à l'esprit de la loi de 1998 créant le titre de séjour pour les étrangers malades, par une rédaction qui se veut plus précise, sans modifier la pratique actuelle de prise en charge des pathologies graves". C’est évidemment faux car derrière cette mesure souhaitée par la majorité, il s’agit juste de revenir à un système moins protecteur pour les étrangers souffrant de pathologies graves.
Le sénateur UMP Louis Nègre propose donc au Sénat de rétablir l’article tel que voté par l’Assemblée nationale. De son côté, le sénateur Jean-Pierre Sueur indiquait, dans son courrier à AIDES (20 janvier), qu’il s’opposerait "avec force à toute tentative visant à rétablir" cet article.