Séropositive pour aimer mieux…

Publié par Rédacteur-seronet le 22.11.2010
2 596 lectures
Notez l'article : 
0
 
Initiative

"Est-ce que tu peux te donner le droit de vivre en ayant des questions sans réponse ?" C'est une des nombreuses questions que se pose Célia Bonier dans le récit, atypique et délicat, qu'elle propose sur son aventure personnelle avec le VIH. En racontant les grandes étapes d'un parcours avec le VIH commencé en 1998, Célia Bonier nous parle d'elle pour mieux nous faire collectivement réfléchir à ce que nous sommes.

C__liaBonnier614.jpg

Verdict, anormalité, haine, amour, etc.  Ces mots sont forts. Ils jalonnent un court récit qui l'est tout autant. Celui de Célia Bonier (un nom d'auteur) qui, en brefs chapitres, raconte une aventure personnelle : celle de la découverte de sa séropositivité en 1998 au retour d'un séjour en Afrique où elle travaillait. "J’apprends que je suis séropositive… La chape de plomb… Une nouvelle "anormalité" ! Moi qui ai passé dix ans de ma vie à essayer d’accepter mon corps différent, me revoilà à nouveau différente, marginalisée avec, en plus, la notion de  honte et toujours le même tabou. Impossible d’en parler dans ma famille ! C'est ainsi que commence mon long voyage avec le VIH", écrit Célia Bonier;

Ce qui frappe dans son livre, qui n'est pas un récit au jour le jour d'un parcours avec la maladie mais plutôt une mise en perspective de grands tournants et de grandes interrogations, c'est un évident volontarisme, un refus de subir, même si le début a été difficile. "Ah, c’est sûr, entre nous, ce n’est pas de suite le grand amour, loin s’en faut ! Le voyage, c’est d’abord plusieurs années de solitude à essayer d’apprivoiser ce nouvel inséparable compagnon de route. Chaque matin devant la glace, voir mes joues se creuser, mon corps se modifier et me dire : "Oui je suis malade. Oui mon corps se modifie. Est-ce que je vais réussir à l’aimer ?", écrit Célia Bonier qui explique pourtant qu'"après des montées harassantes, des traversées du désert… il  y a des moments magiques, des moments où l’on remercie de, simplement, être en vie, des bouffées d’amour à en prendre le vertige".

Ce revers, constructif, de la médaille, ce bien derrière le mal, c'est pour l'auteur une façon d'affirmer, souvent avec une grande justesse,  que ce compagnon qu'est le VIH lui a beaucoup appris. "Il m’a fait découvrir une tendresse et un respect au-dedans alors que je le cherchais au-dehors. Il m’a appris un peu plus d’humilité et d’écoute des autres. Il donne à chaque instant une valeur supplémentaire, un plus de goût. Il m’aide à être un peu plus vraie et me pousse à dire des je t’aime que je n’oserais pas forcément dire", explique Célia Bonier. Pour elle, dans un  contexte général marqué par une certaine violence des rapports sociaux, englué dans un consumérisme effréné, le VIH est un appel à être quelqu'un de mieux, une personne qui "aime mieux" les autres. Parfois les interrogations personnelles (qui peuvent pourtant nous faire réfléchir à notre propre parcours) prennent une ampleur plus universelle. "Est-ce que l’on va continuer à voir des milliers d’hommes et de femmes mourir de faim puis mourir du sida en Afrique sans réagir, sans rien changer à notre mode de vie ?", s'interroge t-elle. Une façon de nous proposer de nous situer sur un échiquier qui comprendrait, d'un côté, l'indifférence, de l'autre la solidarité. Délicat dans son approche, peut-être un peu idéaliste, jamais sentencieux, ce livre permet, à partir du récit d'un voyage personnel avec le VIH, de réfléchir à ce qui pourrait être un message de la maladie.
"Séropositive… pour aimer mieux" est publié en auto-édition.