Sida Mémoires Vives : ne pas oublier

Publié par Fred Lebreton le 14.04.2023
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Initiativemémoire VIH

Témoigner pour ne pas (les) oublier et créer une mémoire vive et collective pour les personnes vivant avec le VIH et leurs proches. C’est l’idée de cette nouvelle plateforme collaborative lancée par des militants-es de trois associations : Les ActupienNEs, Les Ami.e.s du Patchwork des Noms et l'Académie Gay et Lesbienne. Seronet a interrogé deux bénévoles qui participent à ce projet, Mikaël Zenouda et Pascal Lièvre, pour en savoir plus. Entretien.

Comment est né le projet Sida Mémoires Vives ?

Mikaël Zenouda : Il est né au sein des ActupienNEs, pour plusieurs raisons. D’abord, nous sommes proches du combat pour la création d’un centre d’archives LGBTQI en Île-de-France. On avait créé pendant les Gay Games 2018 un mémorial de sportifs-ves séropos morts-es ou vivant avec ou victimes de sérophobie sous forme de notices biographiques sur des pancartes. On a constaté que beaucoup de personnes dans le milieu de la lutte contre le sida saluaient l’initiative The Aids Memorial, comme diffuseur de récits de mémoires sur les séropos décédés-es sans qu’il ne se passe rien de vraiment concret en France à ce sujet. Donc, on s’est dit pourquoi ne pas lancer quelque chose nous-même ? Par ailleurs, en travaillant sur des campagnes pour la Journée de la Disance en octobre et en lançant une campagne contre la sérophobie, on avait créé une vidéo avec plusieurs séropos racontant les discriminations subies. Dans le cadre de l'enquête sur les conditions de vie sociales et médicales des séropos de plus cinquante ans, nous avons recueilli de nombreux témoignages issus d'entretiens en groupe, ce qui a donné également envie de les prolonger en élargissant le projet Sida Mémoires Vives à la parole des long term survivors [survivants-es de longue date, ndlr]. Le projet a germé en 2020 et nous avons associé tout naturellement Les Ami.e.s du Patchwork des Noms et l'Académie Gay et Lesbienne. Nous avons publié un premier appel à témoignages en 2021 qui n'a pas eu de retour, donc, on s'est lancés-es dans la recherche active de témoignages, en mobilisant une partie d'une subvention de la Dilcrah redirigée vers ce projet pour les premiers entretiens et la création du site internet.  Sida Mémoires Vives se réfère à la fois à la philosophie de l’archive du Collectif Archives LGBTQI, l’archives vive, vivante, qui considère toutes les personnes comme créateurs-rices d’archives, avec le slogan : « ARCHIVES = VIE », et à QueerCode pour l’aspect numérique et leur formidable et très beau travail d’archives sur les lesbiennes déportées.

Qui gère cette plateforme ?

Pascal Lièvre : En ce qui concerne les personnes à interviewer, Les Ami .es du Patchwork des noms m’ont indiqué des personnes à contacter. C’est moi qui, par la suite, les contacte, mène les interviews, monte les films et surtout les sous-titre. Ensuite, les personnes filmées visionnent la vidéo et, si cela leur convient, me permettent de la diffuser sur le site Sida Mémoires Vives. Nous faisons signer une autorisation d’exploitation de droit à l’image, spécifiant si la personne nous autorise ou non, dans un deuxième temps, à communiquer sur les réseaux sociaux. Pour l’instant, c’est moi qui gère la page Instagram, qui vient d’ouvrir il y a quelques semaines, afin d’inviter les personnes à venir regarder les vidéos sur le site Internet.

À qui est destinée cette plateforme ?

Pascal Lièvre : Sida Mémoires Vives est destinée à toutes les personnes qui souhaitent s’informer sur le VIH/Sida, et entendre des témoignages de plusieurs formes. La plateforme diffuse, en effet, les récits de personnes vivant avec le VIH depuis plus de 15 ans, mais aussi de soignants-es et les proches de personnes décédées du sida.

Comment faire pour témoigner ?

Pascal Lièvre : Il suffit de nous écrire par mail (sidamemoiresvives "@" gmail.com), et nous répondrons à tout le monde. Ensuite, il faut attendre un peu avant que la vidéo soit en ligne car le temps de filmer, de sous-titrer, cela prend du temps. Même si nous avons eu une petite subvention au départ, aujourd’hui, c’est un projet entièrement bénévole. Enfin, pour celles et ceux qui ne souhaitent pas témoigner en vidéo, il y a aussi la possibilité de nous envoyer des images et du texte. C’est Mikaël Zenouda qui s’occupera de les mettre en ligne sur le site internet.

 

The Aids Memorial
Se servir des réseaux sociaux pour rendre hommage aux personnes emportées par le VIH/sida ? C’est ce que propose The Aids Memorial sur son compte Instagram. Des histoires d’amour, de deuil et des souvenirs publiés chaque jour avec des photos personnelles envoyées par les proches des personnes disparues. Une façon digne et touchante de faire vivre la mémoire de ces combattants-es parfois oubliés-es. Créé en 2017 par Stuart, un Écossais qui préfère rester anonyme, The Aids Memorial compte aujourd’hui plus de 233 000 abonnés-es et plus de 10 000 hommages.