Soulages : l’œuvre au noir
D'abord un conseil… Oubliez tout cela, et allez voir cette rétrospective à Beaubourg. Sans a priori, sans connaissances particulières, juste avec vos yeux grands ouverts. Et participez à ces œuvres. Et je vous promets que vous ne serez pas déçus ! L’exposition est quasi chronologique et commence avec des œuvres de 1948. Jusqu’en 1979, Soulages peint principalement des motifs noirs sur fond blanc. Il y a bien sûr parfois un peu de couleurs (bleu, rouge, ocre), mais pas plus. Ah si, le peintre utilise parfois du goudron ou du brou de noix (les menuisiers du dimanche connaissent) pour peindre. Et il peint parfois sur des morceaux de verre. J’avoue ne pas être très fan de ces œuvres de la première époque.
Et en 1979, la révolution copernicienne : le noir envahit l’entièreté de la toile, et la peinture devient matière et lumière. Soulages continue son œuvre universelle : le noir parle à tout le monde (même si c’est de manière différente), il n’y a pas de message. Et là, on est fasciné par cette salle où un polyptique de cinq œuvres est suspendu dans une salle noire. Et les œuvres vivent : en effet, suivant l’éclairage et l’endroit où vous êtes, la "couleur" change. Tout cela grâce au travail du maître sur les stries, les scarifications qu’il fait subir à la matière peinture.
Et il y a ce triptyque entièrement recouvert de fines striures et qui, à la lumière, semble dorée ! Le grand œuvre de cet alchimiste est réalisé : il a transformé le plomb en or.
La scénographie est simple et sobre, les cartels des œuvres aussi (les titres des toiles sont résumés à une date et une dimension). Un certain nombre d’œuvres sont présentées suspendues entre ciel et terre (sol et plafond quoi). On lévite ! Voir cette expo, c’est voyager en son monde intérieur et mieux se connaître soi-même. Et c’est aussi (un peu) une expérience mystique (religion de la beauté). En regardant ces œuvres, je me suis pris à voir le monolithe de "2001, l’odyssée de l’espace" et la Kaaba à la Mecque. Génial, je vous dis !
Pierre Soulages, Centre Georges Pompidou (Beaubourg) jusqu’au 8 mars 2010. Plus d'infos sur le site du musée.
PS : Pas la peine d’acheter le catalogue de l’expo car les œuvres de Soulages doivent être vues "en vrai" car elles changent tout le temps sous notre regard, en fonction de l’éclairage, etc. Comme dirait Verlaine, elles ne sont ni tout à fait les mêmes ni tout à fait une autre…
- 1442 lectures
- Envoyer par mail
Commentaires
Superbe
merci l'artiste