STRASS test !

Publié par jfl-seronet le 02.06.2011
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travailleuse du sexetravailleur du sexepénalisation
Fortes menaces, attaques en règle, le travail du sexe est une nouvelle fois dans le collimateur du gouvernement. Le 1er juin, le STRASS, syndicat du travail sexuel, et le collectif Droits et prostitution ont lancé leur campagne pour défendre les droits des travailleurs et travailleuses du sexe. Une campagne qui a pris les allures d’une manifestation jeudi 2 juin. Revendications, coups de gueule et accents de fierté. Seronet était là pour le "STRASS test" !
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"Y a pas trop de monde !", lâche une passante un peu blasée. Question de point de vue. Plus de 400 personnes, dont une majorité de travailleuses et travailleurs sexuel(le)s, on peut considérer que cela en fait du monde justement. A fortiori lorsqu’il s’agit de défendre des revendications et des droits qui sont ignorés et bafoués et de demander la reconnaissance de métiers, une fois de plus violemment attaqués par un rapport parlementaire et la menace d’un texte législatif qui pénaliserait les clients. Plus de 400 personnes, sur la question de la prostitution, cela en fait du monde dans le contexte politique actuel. C’est même un acte de courage. Ce n’est pas le premier du STRASS, le syndicat du travail sexuel, créé en 2009, organisateur de l’événement. C’en est un de plus. Comme les années précédentes, c’est une manifestation publique qui a été retenue et une date : le 2 juin. "Cette date n’est pas le fruit du hasard, explique Maîtresse Gilda, porte-parole du STRASS. C’est celle de la Journée mondiale des sex workers [travailleurs du sexe, ndlr] et c’est la date anniversaire de l’occupation de l’église Saint-Nizier à Lyon, il y a 36 ans". En 1975, des femmes, prostituées, investissaient cette église pour exprimer leur colère face au harcèlement policier et social dont elles étaient alors victimes. "Nous en sommes toujours là !", lâche Maîtresse Gilda.


Si cette manifestation de 2011 revêt un caractère un peu particulier, c’est qu’un événement s’est produit il y a quelques semaines : la présentation du rapport de la mission parlementaire d’information sur la prostitution. "C’est le pire événement qui soit arrivé ces dernières années", confirme Marie-Elisabeth Handman, historienne de la prostitution. La mission dirigée par la députée PS Danielle Bousquet et son collègue UMP Guy Geoffroy a émis un grand nombre de recommandations dont la principale est de pénaliser les clients. Bref, la vision classique : tarir la demande pour supprimer l’offre. La ministre de la Solidarité et de la Cohésion sociale, Roselyne Bachelot, a profité de cet événement (aux fortes allures de commande officielle) pour affirmer, dans la presse d’abord et devant les parlementaires de la mission, son souhait de voir la France instaurer effectivement des sanctions pénales à l'encontre des clients des travailleurs et travailleuses du sexe. Pour maîtresse Gilda, ce rapport parlementaire "très programmé" n’est que la "caisse de résonnance" de mesures déjà décidées. "C’est tout de même curieux de voir que la seule audition de la mission qui ait été publique et ouverte à la presse soit celle avec Roselyne Bachelot, les autres se sont tenues à huis clos", constate-t-elle. Ce n’est d’ailleurs pas l’unique grief que le STRASS fait au rapport. Sur les quelque deux cents personnes auditionnées par les députés, une quinzaine seulement étaient prostituées et certaines n’exerçaient plus. Et pourtant, avec un syndicat comme le STRASS, regroupant pas loin de 500 adhérents et adhérentes, il n’était pas difficile de trouver des professionnel(le)s pouvant donner leur vision de leur métier. Mais d’après le STRASS et pour le collectif Droits et prostitution, ce n’est manifestement pas cela qui intéressait les députés.

"Ce n’est pas la première fois que la pénalisation des clients est proposée, rappelle maîtresse Gilda. Christophe Caresche, député PS [un temps adjoint de Bertrand Delanoë à la sécurité, ndlr], l’a déjà proposée. Aujourd’hui, on nous cite l’exemple de la Suède, on manipule les chiffres et on pratique volontairement l’amalgame entre le travail du sexe et la traite des femmes. Et cela pour rendre plus acceptable l’interdiction de la prostitution et la pénalisation des clients". Créé en 2003, le collectif Droits et prostitution milite pour les droits des travailleurs sexuels. Ce collectif a eu pour premier combat en 2003 la loi de sécurité intérieure qui a pénalisé le racolage public. Ce n’est un mystère pour personne (sauf pour les députés de la mission prostitution) mais cette première loi a provoqué "une dégradation des conditions de vie des travailleurs sexuels, ainsi qu’une augmentation des prises de risque du fait de pressions multiples (économiques, policières notamment)". La pénalisation du racolage public a, selon le collectif, poussé à une "invisibilisation généralisée des travailleurs sexuels qui rend leur accès aux droits et à la justice extrêmement difficile". Elle a aussi éloigné les travailleurs et travailleuses du sexe des structures et services de prévention. "La santé des personnes est en danger, note Miguel-Ange Garzo d’Arcat. Un vrai travail de prévention était mené depuis des années et cela a été remis en cause depuis 2003. On note, depuis cette date, une augmentation des infections sexuellement transmissibles chez les travailleuses du sexe les plus précaires". Pour les associations communautaires de santé, le danger existe déjà et il ne pourra qu’être renforcé par une éventuelle loi de pénalisation des clients.

"Notre association s’est opposée au délit de racolage public, indique Cécile Lhuillier d’Act-Up Paris. Cette mesure a fait courir des risques accrus aux personnes, elle en a poussé certaines à se mettre à l’écart des structures de dépistage et de prévention". Aujourd’hui, ce qui mobilise l’association, c’est que les mesures envisagées se télescopent avec d’une part les recommandations du Conseil national du sida (CNS) sur "VIH et commerce du sexe" et d’autre part avec les priorités du dernier Plan national de lutte contre le sida et les IST 2010-2014, dont une mesure concerne les travailleurs et travailleuses sexuel(le)s. Dans son avis (septembre 2010), le CNS faisait état de "politiques publiques contradictoires", de "cadre législatif défavorable, peu conforme aux droits des personnes" et préconisait de "renforcer les droits". "Roselyne Bachelot, elle-même, alors ministre de la Santé, avait insisté, lors de la conférence internationale sur le sida à Mexico, sur l’importance des actions de prévention auprès des populations les plus vulnérables, comme les travailleuses du sexe. Manifestement, l’idée de renforcer les droits des personnes en matière de prévention est moins à la mode. Cet enjeu de santé est une des raisons de l’opposition d’associations comme Act-Up Paris, Arcat, Solidarité Sida et AIDES à la pénalisation des clients. Pour les associations, le travail du sexe n’est pas, en soi, un facteur d’exposition particulière. Ce sont les rapports non protégés et les conditions d’exercice de leur activité qui accroissent les risques. Pour elles, c’est évident que la pénalisation des clients aura pour conséquence "d’éloigner d’avantage encore les travailleurs et travailleuses sexuel(le)s des structures de prévention, de soins et de dépistage". Elle risque également de rendre "plus difficile pour les travailleurs et travailleuses sexuel(le)s d’imposer le port du préservatif".

Pour majeure qu’elle soit, la question de la santé n’est pas l’unique enjeu pour s’opposer à la pénalisation des clients. La pénalisation des clients mettrait en danger l’intégrité physique et la liberté des travailleurs et travailleuses du sexe. Elle donnerait aux "forces de police le pouvoir de contrôler davantage les personnes exerçant cette activité", estime Droits et prostitution. Elle favoriserait leur exploitation. Il existe bien d’autres conséquences néfastes, mais l’une frappe plus particulièrement : pénaliser les clients reviendrait à interdire purement et simplement le travail sexuel. Et le collectif Droits et prostitution ne voit pas d’un bon œil "la prohibition de tout travail sexuel". Il considère qu’il s’agit d’un danger pour les libertés individuelles de tous. Lors de la conférence de presse pour le lancement de la manifestation parisienne, Chloé, travailleuse sexuelle, a dénoncé cette intrusion dans sa vie privée qui, demain, se généralisera. Chloé, comme d’autres femmes qui exercent ce métier, ne considère pas qu’elle vend son corps, mais un service. "Je suis comme un jardin secret, explique-t-elle. Mon rôle consiste à donner du rêve, à réaliser du fantasme. Je suis là aussi pour libérer la parole sur le sexe, mais aussi parler de prévention. C’est moi qui suis en première ligne lorsqu’on me demande des rapports sans préservatifs. C’est moi qui vais expliquer, faire comprendre. Je ne suis pas là pour faire prendre des risques, ni en prendre moi-même. Ce sont des rapports humains… Les échanges commerciaux à la bourse sont beaucoup plus vulgaires que les nôtres".

Ce qui frappe, c’est qu’il semble y avoir désormais consensus entre l’UMP et le PS sur la pénalisation. "Cela ne me surprend pas vraiment, cela m’attriste", explique Marie-Elisabeth Handman. "Nous n’avons rien à attendre des politiques. En tout cas, pas lieu de les racoler pour faire connaître nos droits, ironise maîtresse Gilda. Nous sommes suffisamment citoyennes et citoyens, mobilisés dans un syndicat qui est éminemment politique. Notre objectif est de faire connaître et défendre nos droits". Maîtresse Gilda est-elle surprise que l’UMP et le PS se soutiennent dans ce nouveau projet de pénalisation ? pas vraiment. "C’est simple. Pour nous, c’est la même merde, mais même repeinte en rose, elle n’en sent pas moins mauvais".

"Il est 15 heures. C’est parti pour la marche", s’époumone une des organisatrices. Derrière les banderoles, les manifestants s‘avancent. Certains portent de beaux masques décorés, d’autres de larges lunettes noires et des perruques. "Il faut faire comme nous, vous n’avez qu’à tout légaliser", lâche une touriste avant de s’engouffrer dans le métro. Sur une banderole, on peut lire : "On paie des impôts, c’est donc bien un vrai boulot". Dans le cortège, il y a une jeune femme aux cheveux d’un noir profond, des piercings encombrent ses lèvres, son nez et ses oreilles. "T’es travailleuse de sexe ? ", lui demande-t-on. Sourire aux lèvres, elle répond : "Non, pas du tout. Moi, je fais du tuning génital".

Photos : Mathieu Brancourt

Commentaires

Portrait de nasse

encore faut-il que AIDES fasse des actions de terrain à destination des putes et des escorts c'est hyper facile de défiler et de faire les fiers avec les pancartes mais pour le moment les seuls qui se soient intéressés à ma prévention en tant qu'escort, c'est ARCAT Et le Kiosque alors bravo l'hypocrisie et je fais le même constat avec mes amis migrants beaucoup de blabla et de manifs peu d'action concrète et je sais de quoi je parle j'ai été salarié de AIDES pendant 3 ans !!
Portrait de guppy

je m'éloigne un peu du sujet, mais qui peut me dire ce qu'est réellement un escort? Et peut on les considérer comme des "travailleurs du sexe"? C'est devenu un peu à la mode, je trouve, de se déclarer excort, il y a tout est n'importe quoi. J'en ai croisé quelque uns! certes pas du "haut de gamme" mais les tarifs étaient exhorbitants! Voilà c'était ma question du jour.
Portrait de alsaco

enfin je crois - on paye un professionnel pour avoir du plaisir - travailleur et travailleuse du sexe ou nécéssiteux ou necessiteuse J 'en croise souvent dans les sexe chops . Pas trop de communication entre nous . Moi je baise a l 'oeil . j 'ai quand mm essayé l 'autre jour pour l 'ascension . les tarifs sont très abordables 15 euros la passe !!!!!!!!! on peut marchander - Je trouve que cela reste du beau relationnel . la volupté est omnipresente . comprenne qui voudra dany
Portrait de patock

L'esprit ne sollicite pas une connaissance dans la croyance! mais, la croyance sollicite l'esprit.
Portrait de Sway

Ne coute pas 15 euros, à ce tarif la c'est une vulgaire prostituée rien de plus. Un(e) escort ne démarche pas non plus sur internet, la plupart sont booké en agence (en suisse notament puisque l'activité y est interdite en france). Certains travaillent en freelance... Et généralement les tarif sont de 500 euros la première heure, dégressif ensuite et proposent des forfait nuit, jours, semaine. Un(e) escort peut alors etre employé pour 1 semaines à l'étranger , en vacances. C'est généralement quelqu'un a qui on demande de parler couramment au minimat l'anglais, mieux trois langues, de bénéficier d'un certains niveau d'étude. Vous l'aurez compris il y a escort et pute...Une cause commune mais abordé totalement différement...Fort heureusement d'ailleurs...
Portrait de alsaco

après les analyses sociologiques et philosophiques de nos 2 spécialistes . Il s agit d 'un combat et d'une accreditation bonne soirée dany
Portrait de frabro

Si je comprends bien Nasse, au féminin c'est une pute au masculin c'est un escort... Pour Sway, ente tapin et escort c'est le prix qui fait la différence, comme entre une 2CV et une SM : elles servent toutes les deux à se déplacer mais y en a une qui permet aussi de frimer... Si on revenait au vrai sujet : la précarisation de plus en plus grande de celles et ceux qu'il est politiquement correct d'appeler "travailleurs (euses) du sexe" et les dégâts de cette politique sur la prévention des IST (politiquement correct pour dire maladies vénériennes) ? Autre façon de voir les choses : l'hypocrisie des mesures annoncées en fanfare et dont tout le monde sait qu'elles n'auront que des effets délétères et aucun résultat sur le but recherché qui n'est que la disparition de la prostitution.
Portrait de francis20250

slt mais dsk aurais mieus fait de prendre rdv avec une excort sa lui aurais couter moins cher ,et pas de barreaux aux fenetre seulement entre c'es jambes lol .
Portrait de romainparis

on finit par ne pas faire de différence là où il en existe. Entre les esclaves prostitués par les réseaux mafieux, ceux et celles qui se prostituent par une absence de choix, d'autres par facilité, il ne peut exister UNE solution comme ce gouvernement tente de nous le faire croire. Je dénote une aberration : comment peut-on obliger des prostitué(e)s à payer des impôts sur le revenu sans leur octroyer le droit à la Sécu ? Autre chose : je vois beaucoup de gay qui rentabilisent leur plan cul en se faisant payer, non pas parce qu'ils sont dans le besoin (j'en connais un qui est propriétaire de plusieurs apparts qu'il loue) mais par avidité ! Ils font ce qu'il veulent mais je n'ai aucun respect pour eux, car je ne peux pas les mettre sur le même plan que les personnes qui sont obligées de se prostituer.
Portrait de Sophie-seronet

Bonjour,

Les personnes qui se revendiquent travailleurs-euses du sexe, qu'elles soient occasionnelles ou non, militent pour la reconnaissance du travail du sexe comme un travail à part entière, donc reconnu légalement et protégé par les mêmes droits que n'importe quel autre travail.

C'est opposable à la prostitution contrainte et avec toute forme d'exploitation.

Le travail du sexe indépendant et choisi librement réclame des droits mais aussi des devoirs. Il doit pouvoir s'exercer en toute liberté, sans victimisation et sans pénalisation, qui on le sait ne permet plus de faire de prévention, ni de garantir un accès à la santé.

Bonne journée. Sophie

Portrait de guppy

Comme Romain le dit certains le font par "avidité" non par nécessité dans ce cas je ne pense pas que ceux ci militent afin que soit reconnu le travail du sexe comme un travail à part entière. Ce ne sont ni des prostitués ni des escorts mais des "profiteurs" qui exploitent la "détresse sexuelle" de personnes en ciblant leur "clientèle" en fonction de l'age de celle ci Je ne parle que pour le milieu homo bien évidemment.