Suisse : percée dans la lutte contre la criminalisation des personnes séropositives

Publié par jfl-seronet le 08.11.2012
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Le Parlement a adopté (28 septembre dernier) la révision totale de la loi sur les épidémies (LEp). "C’est une bonne nouvelle pour les séropositifs dans notre pays : ils ne seront plus sanctionnés à l’avenir s'ils renoncent au préservatif pour les rapports sexuels d’un commun accord avec leurs partenaires", indique l’Aide Suisse contre le Sida. L’organisme appelle "les organes juridictionnels à tenir compte dès à présent de la loi révisée sur les épidémies".
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Fin septembre, le Parlement a adopté la révision totale de la loi sur les épidémies. En Suisse, cette loi (LEp) règle "la protection de l’être humain contre les maladies transmissibles". La loi en vigueur, très marquée par la lutte contre les épidémies développée au XIXe siècle, a fait l’objet d’une révision totale. Cette loi date des années 70, elle permet à la Confédération helvétique et aux cantons de "prendre les mesures qui s'imposent pour prévenir et combattre l'apparition et la propagation des maladies transmissibles de l'homme. L'exécution en incombe principalement aux cantons". Le texte révisé a été très débattu. Par exemple, il y a eu une forte opposition concernant la promotion d’une éducation sexuelle précoce qu’autoriserait la loi sur les épidémies, en permettant à l’Office fédéral de la santé publique et aux institutions d’éducation et de santé de fournir des informations aux enfants sur les risques liés aux maladies transmissibles. Des associations et formations politiques y étaient opposées.

Bien évidemment, la loi a beaucoup traité du VIH/sida. La nouvelle loi sur les épidémies constitue, sur certains points, une avancée. "Les personnes porteuses du VIH ne seront désormais plus sanctionnées pour propagation d’une maladie dangereuse de l’homme si elles renoncent au préservatif lors des rapports sexuels d’un commun accord avec leurs partenaires", se félicite l’Aide Suisse contre le Sida (ASS). "En adoptant cette nouvelle réglementation, les Chambres fédérales expriment clairement que l’application actuelle du droit pénal visant à sanctionner les rapports sexuels non protégés n’est pas compatible avec les principes de la prévention, qui attend des deux partenaires qu’ils assument leurs responsabilités", commente l’organisme officiel qui rappelle au passage qu’il s’est "investi des années durant contre la criminalisation des personnes séropositives".

En Suisse, les personnes séropositives font l’objet de poursuites pénales depuis le début des années 90 en cas de rapports sexuels non protégés. "Dans la plupart des cas, on leur reproche de ne pas avoir informé leur partenaire de leur infection à VIH, rappelle l’Aide Suisse contre le Sida. Deux éléments constitutifs de l’infraction sont alors généralement évoqués : les lésions corporelles graves (art. 122 du code pénal) et la propagation d’une maladie de l’homme dangereuse (art. 231 du code pénal). Hormis les cas où il y a eu effectivement transmission du virus, plus de la moitié des inculpés ont été punis pour simple tentative de transmission".


Depuis longtemps, l’ASS rejette la criminalisation des contacts sexuels non protégés parce qu’elle est d’avis que les partenaires sont tous deux responsables du respect des règles du sexe à moindre risque. Elle défend en cela une position conforme à celle de l’ONUSIDA. L’organisme appelle "les juges d’instruction, procureurs et tribunaux à tenir compte des nouvelles connaissances médicales et à renoncer en toute cohérence à poursuivre pénalement les personnes séropositives lorsque celles-ci suivent un traitement efficace, que leur charge virale est au-dessous du seuil de détection et qu’elles ne peuvent donc contaminer personne".

HIV Law, le nouveau site consacré à la jurisprudence en matière de discrimination
L'Aide Suisse contre le Sida a mis sur pied, en collaboration avec Kurt Pärli, spécialiste des questions de discrimination, et avec la Haute école spécialisée du Nord-Ouest de la Suisse, le site HIV Law qui, pour la première fois, recense de manière systématique la jurisprudence en relation avec divers thèmes : pénalisation de la transmission du VIH, protection contre la discrimination, ou encore migration, asile et VIH. Avec ce projet unique en son genre, né de l'étroite collaboration entre la science et la pratique, les initiateurs entendent donner aux experts un aperçu de la situation en Suisse et influencer la jurisprudence en lien avec le VIH. Le site n'est pour l'instant disponible qu'en allemand.