Support Don’t Punish : le 10 octobre en ligne de mire !

Publié par jfl-seronet le 25.06.2019
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Chaque année, comme d’autres acteurs-rices nationaux-ales et internationaux-ales de la réduction des risques et des dommages, AIDES se mobilise pour la journée Support Don’t Punish, le 26 juin. Cette année avec d’autres ONG, l’association met l’accent sur la conférence de reconstitution du Fonds mondial contre le sida… qui fait énormément pour la réduction des risques et des dommages.

Cette journée permet de promouvoir et de revendiquer de meilleures politiques de drogues, mettant la priorité sur la santé publique et les droits humains. La campagne Support Don’t Punish (Soutenez, ne punissez pas) a été lancée en 2013 par IDPC (International Drug Policy Consortium), dont AIDES est membre. Cette campagne de mobilisation communautaire vise à soutenir la réduction des risques et les politiques en matière de drogues qui mettent en avant la santé publique et les droits humains. La campagne souhaite inscrire la réduction des risques à l’agenda politique en renforçant la capacité de mobilisation des communautés touchées et de leurs alliés-es, en ouvrant le dialogue avec les décideurs-euses et en sensibilisant les médias et le public. Le point culminant annuel de la campagne est la Journée mondiale d’action, qui se déroulera, cette année, le 26 juin (ou autour du 26 juin, officiellement « Journée internationale contre l’abus et le trafic de drogues »). Historiquement, les gouvernements ont utilisé cette date pour mettre en avant les « progrès » réalisés en matière de contrôle des drogues avec une perspective extrêmement répressive voire punitive. Cette Journée mondiale d’action vise à « récupérer » et à transformer le discours relatif à cette journée en une mobilisation forte sur les enjeux de réduction des risques et des dommages. Chaque année, vers le 26 juin, un nombre croissant d’activistes dans des villes du monde entier se joignent à cette démonstration de force unique et variée, en faveur de réformes et de réduction des risques. Les revendications portées par cette campagne sont : le système de contrôle des drogues ne fonctionne plus et doit être réformé ; les personnes usagères de drogues ne doivent plus être criminalisées ; les personnes impliquées dans le commerce de drogues à un niveau limité, en particulier pour des raisons de subsistance ou par contrainte, ne doivent pas faire face à des peines sévères ou disproportionnées ; la peine capitale ne doit jamais être imposée pour des infractions relatives aux drogues ; les politiques des drogues devraient mettre l’emphase sur la santé, le bien-être et la réduction des risques ; les budgets des politiques des drogues doivent être rééquilibrés afin de garantir le financement adéquat des ripostes basées sur la santé et la réduction des risques. Ces revendications rejoignent celles exprimées par AIDES depuis de nombreuses années, orientations réaffirmées par son conseil d’administration en janvier 2018.

Cette année, lors de la Commission des stupéfiants de l’Onu à Vienne en mars dernier, IDPC et des ONG ont décidé de mettre l’accent sur le financement des programmes de réduction des risques dans le monde, et donc sur la Conférence de reconstitution du Fonds Mondial (CRFM) qui se déroulera en octobre prochain en France. Le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme est, en effet, le principal financeur des programmes de réduction des risques liés aux usages de drogues dans les pays à revenu faible et intermédiaire. « Sans lui, il est impossible de prétendre à un accès suffisant aux programmes d’échange de seringues, au matériel stérile, aux traitements de substitution aux opiacés (TSO) ou à une quelconque diminution de l’impact des épidémies sur la vie des personnes consommatrices », expliquent d’ailleurs IDPC et ces ONG (AIDES, Action Santé Mondiale, Coalition PLUS, Fédération Addiction, Médecins du Monde, Sidaction, Les Amis du Fonds mondial) dans un communiqué commun (24 juin).

En 2016, 80,8 millions de dollars provenaient du Fonds mondial sur 188 millions disponibles, dont 121 provenant de donateurs internationaux – soit 67 % des dons et 43 % de l’ensemble des fonds disponibles. Mais ces financements ne couvrent aujourd’hui que 7 % des besoins et ils sont globalement en baisse (-24 % de dons internationaux depuis 2007), alors même que les contaminations à VIH parmi les personnes usagères de drogues augmentent fortement (+33 % en cinq ans). Il est donc nécessaire à la fois d’augmenter les financements internationaux, mais aussi de faire contribuer les États, qui rechignent à développer les programmes de réduction des risques.

Pourquoi de telles revendications ? On trouvera la réponse dans ce que nous apprend l’épidémiologie. Les personnes injectrices de drogues sont particulièrement exposées au VIH (22 fois plus que la population générale), ainsi qu’aux hépatites. En Russie, par exemple, où la guerre aux drogues fait rage, une personne usagère de drogue par injection sur quatre vit avec le VIH. Elles représentent 39 % des nouvelles infections à VIH. Lutter contre la vulnérabilité des personnes injectrices, c’est donc lutter contre l’épidémie. Le Fonds mondial l’a bien compris en finançant l’accès aux dispositifs de réduction des risques, non sans difficultés face à certains gouvernements qui préfèrent sacrifier une population jugée indésirable, rappelle le communiqué des ONG.

Les programmes d’échange de seringues sont ainsi développés au Népal ou en Afrique du Sud pour faciliter l’accès à du matériel propre et stérile et empêcher ainsi la transmission du virus par partage de matériel. Pour rappel, la mise en place de ce dispositif en France en 1987 a eu un impact significatif sur la baisse des infections à VIH sur cette population : alors qu’elles représentaient une part très importante des contaminations, elles représentent aujourd’hui moins de 2 %. Le Fonds mondial permet également de financer des traitements de substitution aux opiacées, mais aussi de proposer des dépistages et, le cas échéant, des traitements antirétroviraux. Alors même que les contaminations à VIH explosent parmi les personnes usagères de drogues (+33 % en cinq ans – elles représentent désormais en moyenne 10 % des contaminations au niveau mondial en 2018), les besoins en matériel stérile et programmes spécifiques ne sont couverts qu’à hauteur de 7%, et les financements sont sans cesse remis en cause. « Il est donc urgent d’intensifier globalement les efforts de prévention auprès de cette population particulièrement vulnérable. Or, pour intensifier les efforts, il faut davantage de moyens et donc une hausse des financements. A contrario, une baisse de financements serait catastrophique pour les usagers-es de drogues : population la plus laissée pour compte de toutes, il est certain qu’ils seraient les premiers à pâtir des coupes budgétaires », concluent les ONG.