TasP : les Britanniques reconnaissent son intérêt, y compris chez les gays

Publié par Traduit par Grace Cunnane le 29.01.2013
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SexualitéTasPtraitement comme prévention

Cinq ans après la Commission fédérale suisse sur le sida, c’est au tour de la British HIV Association (BHIVA) et du Groupe consultatif d'experts sur le sida (EAGA) d’émettre un avis sur le traitement comme prévention (TasP). Validé par le Département de la santé britannique, il reconnait l’efficacité du traitement comme prévention chez les gays et recommande que les professionnels de la santé en discutent avec toutes les personnes séropositives. En voici une traduction.

Avis sur l'utilisation du traitement antirétroviral pour réduire la transmission du VIH. Janvier 2013. British HIV Association (BHIVA) et Groupe consultatif d'experts sur le sida (EAGA).

1. Définition : Cette déclaration se réfère à l'utilisation du traitement antirétroviral par les personnes séropositives afin de réduire le risque de transmission du VIH.

2. Il y a désormais des preuves concluantes à partir d’essais cliniques randomisés sur des couples hétérosexuels sérodifférents que si le partenaire séropositif est sous traitement efficace, la transmission du VIH par voie sexuelle vaginale est considérablement réduite (de 96 %) [1]. La réduction observée de la transmission du VIH dans le contexte d’un essai clinique démontre que la bonne utilisation du traitement antirétroviral par la personne séropositive est aussi efficace que l'utilisation systématique du préservatif pour limiter la transmission du virus.

3. Le risque qu’une personne séropositive, prenant un traitement efficace, transmette le VIH à ses partenaires sexuels à travers la pénétration vaginale est extrêmement faible, si les conditions suivantes sont respectés :
- Il n'y a pas d'autres infections sexuellement transmissibles (IST) chez aucun des deux partenaires* ;
- La personne séropositive a une charge virale plasmatique [dans le sang, ndlr] en dessous de 50 copies/ml d’ARN du VIH depuis plus de 6 mois et la charge virale est inférieure à 50 copies/ml lors du dernier bilan ;
- Les examens de charge virale doivent être effectués régulièrement (tous les 3 à 4 mois) pour une utilisation stratégique du traitement antirétroviral comme outil de prévention.

4. Les données publiées viennent en grande partie d’études sur des couples hétérosexuels et sont insuffisantes pour conclure qu’un traitement efficace peut avoir un niveau de protection similaire quand il s’agit d'autres pratiques sexuelles, par exemple les relations sexuelles anales non protégées entre hommes ou entre hommes et femmes. Cependant, d'après les experts, il existe un risque extrêmement faible de transmission lors de ces pratiques si les conditions indiquées ci-dessus sont remplies [voir point 3].

5. A partir des éléments de preuve disponibles, il est recommandé que les professionnels de la santé discutent avec toutes les personnes séropositives de l'impact du traitement antirétroviral sur le risque de transmission à leurs partenaires sexuels. Pour ceux qui ne prennent pas encore de traitement et veulent réduire le risque de transmission, la possibilité de démarrer le traitement antirétroviral à cet effet doit être discutée. Une telle discussion doit établir qu'il n'y a aucune coercition et que la personne séropositive est pleinement informée de la nécessité de s'engager dans une observance du traitement à long terme, de pratiquer des dépistages fréquentes des IST (tous les 3 à 6 mois selon le risque)*, de contrôler régulièrement la charge virale, et doit être consciente des effets indésirables potentiels du traitement.

Il faut noter qu’il n’existe pas de méthode de prévention unique qui peut empêcher complètement la transmission du VIH. Le traitement antirétroviral réduit le risque de transmission du VIH seulement. Indépendamment du traitement antirétroviral, le préservatif reste le moyen le plus efficace de prévenir la transmission d'autres infections sexuellement transmissibles.

Notes :
* La présence d’infections sexuellement transmissibles (IST) au sein d'un couple ne peut être exclue de manière fiable que si :
- Les deux partenaires ont eu un dépistage des ITS complet et que tous les résultats sont négatifs ;
- Aucun des deux partenaires n’a eu des rapports sexuels avec quelqu'un d'autre depuis ce dépistage ;
- Le dépistage est refait après chaque exposition sexuelle avec un nouveau partenaire et qu’un résultat négatif est obtenu dans la période de latence sérologique pour chaque IST avant que le couple ait à nouveau des rapports.

Ces conditions ne peuvent s'appliquer que s'il y a transparence totale au sein du couple sur les relations sexuelles en dehors du couple.

Il est possible que les IST accroissent le risque de contracter le VIH et augmentent la charge virale du VIH dans le tractus génital [les voies génitales] même si la personne avait une charge virale jusque-là indétectable, ce qui pourrait conduire à une augmentation du risque de transmission du VIH. Une charge virale indétectable dans le sang ne signifie pas toujours qu'il y a une charge virale indétectable dans les voies génitales. Si on n’exclut pas l’éventuelle présence d'une IST, le fait d’être sous traitement antirétroviral peut encore avoir des bienfaits sur la transmission et la santé publique mais en vertu de ces circonstances, il n'est pas conseillé de s'appuyer sur le traitement seul pour prévenir la transmission du VIH et les préservatifs sont toujours recommandés.

Si le traitement antirétroviral est utilisé comme une stratégie visant à réduire le risque de transmission, il est nécessaire de faire contrôler la charge virale plus fréquemment que ce qui est actuellement recommandé pour les soins cliniques standards.

[1]. Cohen MS, Chen YQ, McCauley M et al. Prevention of HIV-1 infection with early antiretroviral therapy. N Engl J Med 2011; 365: 493–505.

Membres du groupe de rédaction :
S Fidler (1), J Anderson (2), Y Azad (3), V Delpech (4), C Evans (5), M Fisher (6), B Gazzard (5), N Gill (4), L Lazarus (4), R Lowbury (7) , K Orton (8) , B Osoro (9) , K Radcliffe (10), B Smith (11) , D Churchill (6) , K Rogstad (12)  and G Cairns (13) 1 Imperial College London, 2 Homerton University Hospital, London, 3 National AIDS Trust, 4 Health Protection Agency, 5 Chelsea and Westminster Hospital, London, 6 Royal Sussex  County Hospital, Brighton, 7 MEDFASH (Medical Foundation for HIV & Sexual Health), 8 Department of Health, 9 Positively UK, 10 University Hospital Birmingham Foundation NHS  Trust,  11 Terrence Higgins Trust, 12 Royal Hallamshire Hospital, Sheffield, 13 NAM Publications/Aidsmap.com