TDS : Journée mondiale contre les violences

Publié par jfl-seronet le 17.12.2022
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Droit et socialtravail du sexe

Chaque 17 décembre, c’est la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux travailleuses-eurs du sexe (TDS). À cette occasion, Seronet fait le point sur les enjeux sur cette question.

À quoi sert la journée du 17 décembre ?

Cette journée internationale — organisée depuis 2003, à l’initiative d’Annie Sprinkle, artiste, cinéaste et travailleuse du sexe qui milite contre la stigmatisation des femmes qui exercent le travail du sexe — vise à dénoncer les violences putophobes et rendre hommage aux travailleurs-ses du sexe décédés-es et assassinés-es. C'est également une journée de mobilisation pour faire entendre les revendications des TDS pour le respect de leurs droits. On trouvera des informations sur les initiatives proposées en France sur le site du Strass.

Quel est le contexte en France ?

En France, si le travail du sexe n’est pas illégal, les textes juridiques et réglementaires entravant son exercice sont nombreux : loi de pénalisation des clients, délits de proxénétisme, arrêtés municipaux et préfectoraux. L’environnement législatif répressif à l’encontre des travailleuses-eurs du sexe (TDS), leur entourage et leurs clients surexpose ce public aux risques de violences et entrave son accès aux droits et à la santé.

La loi du 13 avril 2016

Dans l’esprit de la loi, les TDS  sont des victimes qu’il convient de protéger de la « prostitution », considérée comme une violence en soi. La pénalisation des clients prévoit une amende de 1 500 euros pour les clients-es des TDS (3 000 en cas de récidive), ainsi qu’un stage de sensibilisation à la lutte contre l’achat d’actes sexuels. En outre, le « parcours de sortie de prostitution » conditionne l’accompagnement social à l’arrêt total du travail du sexe et prévoit une allocation de 343 euros par mois ainsi que l’accès à une autorisation provisoire de séjour pour les personnes privées de l’accès au droit commun, les maintenant dans la précarité. Baisse du nombre de clients-es, précarisation, relégation de l’activité dans des zones isolées, difficultés à imposer le port du préservatif et à refuser des pratiques à risques : les effets sont désastreux en termes d’exposition aux violences et aux contaminations au VIH et aux IST

Le délit de proxénétisme

Défini par les articles 225-5 à 225-12 du Code pénal, il fait encourir à son auteur-rice une peine pouvant aller jusqu’à sept ans de prison et 150 000 euros d’amende. Si l’esprit de la loi est la protection des personnes exerçant le travail du sexe de situations d’exploitation, la définition actuelle du proxénétisme recouvre la simple « aide ou assistance » aux TDS. Ainsi, distribuer des préservatifs à un-e TDS hors cadre associatif ou être tenu au courant de ses rendez-vous pour pouvoir réagir en cas de problème est considéré comme du proxénétisme. Il en est de même pour la mise à disposition ou la location d’un appartement à un-e TDS exerçant à domicile. Un tel risque pénal encourage les propriétaires à refuser de louer leur logement à un-e TDS quand bien même il-elle ne travaillerait pas à domicile. Conséquence ? La quasi-impossibilité pour les personnes concernées de louer un logement en bénéficiant de la protection usuelle des locataires. Ces dispositions induisent ainsi de nombreuses entraves à la solidarité envers et entre les TDS, ainsi qu’à leur accès aux droits et à la sécurité.

Des violences en hausse

Depuis 2021, au moins cinq travailleuses du sexe ont été assassinées. Le nombre de violences visibilisées par le projet Jasmine autant que leur gravité ont presque doublé en un an. Entre novembre 2021 et novembre 2022, on compte 2 243 signalements de faits de violences, dont près de la moitié classifiés « dangereux » (28 %) ou « très dangereux » (19 %).

Quelles sont les revendications ?

  • La décriminalisation du travail du sexe, par l’interdiction des arrêtés entravant son exercice, l’abrogation de la loi du 13 avril 2016 et des délits de proxénétisme ;
  • la fin des discriminations à l’encontre des TDS qui sont aujourd’hui privés-es de leurs droits fondamentaux en raison de leur activité ;
  • la mise en place d’un accompagnement inconditionnel et ambitieux pour les personnes souhaitant arrêter le travail du sexe, offrant de réelles alternatives à cette activité ;
  • la lutte effective contre l’exploitation et le trafic d’êtres humains, dotée des moyens nécessaires à la sortie de la précarité (titre de séjour, droit au travail et accès aux minimas sociaux) et au démantèlement des réseaux de traite.