Trans et VIH : ce que AIDES dit au gouvernement

Publié par jfl-seronet le 04.12.2012
8 612 lectures
Notez l'article : 
0
 
Initiativetrans

En octobre dernier, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a lancé un grand travail de réflexion visant à établir un ambitieux "programme d’action gouvernemental contre les violences et les discriminations commises à raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre". Ce travail s’est déroulé en ateliers : l’un concernait le Parcours des personnes trans. AIDES y a fait une contribution sur trans et VIH. La voici.

transgenre.jpg

Un contexte épidémiologique méconnu
En France, aucune donnée argumentée n’existe sur la prévalence au transsexualisme, il n’existe pas non plus de données fiables sur la prévalence au VIH au sein des communautés trans tenant compte de ces diversités. Les données indiquent une épidémiologie très élevée (du moins chez les femmes trans en situation de prostitution et migrantes) même si d’autres facteurs doivent être pris en compte pour nuancer ce constat.
Le bulletin épidémiologique hebdomadaire n°42 (novembre 2011) indique, en effet, une prévalence au VIH de 17,2 % pour les MtF [hommes vers femmes] ayant déjà été en situation de prostitution, en précisant que les 20,6 % des MtF ayant participé à l’enquête indiquent avoir été en situation de prostitution au moins une fois dans leur vie (12,5 % pour les FtM [femmes vers hommes]).  10.9% des MtF interrogés dans l’enquête du BEH nées à l’étranger sont séropositives. La prévalence du VIH parmi les MtF nées à l’étranger et ayant eu recours au travail du sexe est de 36.4%.  L’on peut également considérer d’autres facteurs aggravants tels que les relations HSH, Hommes trans et hommes HSH non trans exposant particulièrement les FtM aux mêmes problématiques face à une prévalence très élevée. A quoi, il convient d’ajouter le déficit de communications adaptées à toutes ces formes de situation.
 
Des difficultés d’accès aux soins
Aujourd’hui, la prise en charge médicale des trans est un échec et représente à elle seule une discrimination majeure et une inégalité flagrante. Le taux de dépistage au VIH est relativement élevé au sein de la population trans : encore d’après l’étude du BEH, 82,5 % des MtF et 63,3 % des FtM ont déclaré avoir fait le test au moins une fois dans leur vie, 32,3 % des FtM et 39,2% des MtF déclarent l’avoir fait sur les 12 derniers mois.  En dépit de ces taux élevés de dépistage, on note une inégalité de fait dans l’accès aux soins des personnes trans, cette inégalité a plusieurs causes : stigmatisations, stigmatisations dans les soins, précarité sociale et financière, encadrement de certaines procédures médicales par l’état et dans un cadre psychiatrisé, humiliation des personnes par l’administration sourde à la parole des personnes…  Ses freins à la santé se conjuguent avec des méconnaissances graves sur les interactions entre hormonothérapies et traitements Antirétroviraux (ARV). Cette situation est d’autant plus néfaste que dans le cadre des difficultés et contraintes liées aux "passing", beaucoup de trans ont recours à des auto-hormonothérapies non cadrées et donc plus difficiles à contrôler par rapport aux traitements ARV mais aussi par rapport à la santé globale.
 
Vers une prise en charge globale de la santé trans
AIDES rejoint les revendications des associations identitaires partenaires dont Chrysalide et Outrans et demande que les questions trans soient abordées dans leur globalité afin d’améliorer la situation sanitaire catastrophique de ces communautés :
- amélioration, simplification du changement d’état civil
- campagnes de sensibilisation à la transphobie
- modification des parcours de santé et de soin

Sur les questions de santé, face aux manques d’informations scientifiques sur les interactions entre ARV et hormonothérapies, mais aussi sur l’épidémiologie, il est urgent de financer des études en directions des populations trans afin d’avoir des connaissances renforcées et permettre des réponses plus adaptées aux besoins des personnes et à la lutte contre le VIH ou les Hépatites. Ces études doivent être financées en parallèles d’actions spécifiques trans, à l’image de ce qui est proposé dans le plan national de lutte contre le VIH et les Hépatites 2010-2014.

AIDES demande aussi que le groupe de travail sur la prise en charge médicale des trans interrompu de manière arbitraire par le précédent Ministre de le Santé soit réactivé et que la Direction Générale de l’Offre de Soins (DGOS) pilote cette réflexion "at large".
 Enfin, dans le cadre d’actions communautaires, des dispositifs de promotion de la santé et de la santé sexuelle chez les trans pourraient être proposés au sein de centres de santé communautaires qui pourraient intégrer dans leurs missions des actions spécifiques et adaptées aux besoins d’informations, de prévention, de dépistage de traitements.