Trans, Intersexes : une loi, des droits, la proposition écologiste en question

Publié par jfl-seronet le 19.05.2014
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Droit et socialtransintersexe

La sénatrice écologiste Esther Benbassa a déposé une proposition de loi visant à "protéger l’identité de genre" et encadrer le changement de la mention du sexe à l’état civil. Plusieurs associations, notamment réunies au sein du collectif Existrans, ont publié un communiqué dans lequel elles parlent d’une "initiative attendue", mais qui serait "gâchée par l’absence de concertation avec les personnes trans et intersexes". Explications.

A la suite d’une réunion (26 avril) du Collectif Existrans, les personnes et organisations trans et intersexes présentes ont souhaité exprimer une position commune sur la proposition de loi déposée par la sénatrice (EELV) Esther Benbassa et le groupe écologiste au Sénat. "Nous tenons tout d’abord à remercier le groupe EELV au Sénat pour cette initiative traduisant l’intérêt manifeste porté aux conditions de vie des personnes trans et intersexes, et aux difficultés causées par l’archaïsme des lois françaises sur ce sujet, en matière d’état civil et de droit pénal. Nous approuvons aussi la proposition du critère de l'identité de genre pour protéger au mieux la population trans et intersexe contre les discriminations", expliquent les signataires.

Des discriminations imputables aux choix de l’Etat

"Il nous faut le rappeler sans cesse : l’indignité, l’insécurité et l’exclusion sociale dans lesquelles sont maintenues les personnes trans et Intersexes en France sont causées en priorité par l’Etat et l’absence d’une loi véritablement protectrice qui leur permette de faire valoir leurs droits les plus élémentaires. Et si les vies de nombreuses personnes trans et intersexes sont condamnées à la précarité, au sida, au suicide, à la prostitution non choisie, c’est notamment parce que les conditions de rectification de la mention du sexe à l’état civil et sur les papiers d’identité sont contraires aux droits humains et en empêchent l’accès à toutes les personnes concernées (expertises psychiatriques et médicales dégradantes, obligation de traitements, et attestation du "caractère irréversible de la transformation de l'apparence" arbitrairement interprété comme une stérilisation obligatoire, etc.)", explique le communiqué.

Proposition de loi… pas que du bien !

Reste que les associations ont été déçues de ne pas être entendues, ni consultées sur cette proposition. Elles estiment, au final, que certaines mesures posent problème. "Malheureusement, après une étude attentive, des réserves sérieuses ont été partagées unanimement au sein du collectif sur la solution juridique apportée par cette proposition de Loi : durée trop longue de la procédure, risques importants de contestation par des tiers, mauvaise protection de la vie privée, etc.", indiquent-elles.

"C’est pourquoi nous appelons les sénatrices et sénateurs signataires de cette PPL à nous recevoir rapidement, et à rouvrir un dialogue indispensable en organisant bien avant leur défense du texte sur les bancs du Sénat, un colloque auquel seront invités nos porte-paroles, les experts qui nous suivent dans leur pratique juridique, et nos appuis de référence en matière de lutte pour les droits humains, qui sont désormais nombreux", demande le communiqué de presse.

Un colloque pour une remise à plat

"A l’issue de ce colloque, nous espérons que pourront être élaborés des amendements permettant de remettre cette PPL sur de bonnes bases, afin d’assurer réellement la procédure de changement d’état civil que nous attendons : simple, rapide, à moindre coût, sans conditions médicales ou psychiatriques, et ainsi accessible à toute personne dès le moment où elle en exprime le besoin, sans risque de contestation abusive", avancent les signataires. "Plus largement nous appelons, à cette occasion, à ce que les parlementaires des deux chambres de tous bords politiques, intéressés à la question, viennent participer à cet échange et s’associent pour constituer dès lors un groupe de travail de commission coordonné, à l’instar de ce qui s’était fait en juin/juillet 2012 à propos de la loi sur le harcèlement sexuel. Nous attendons de notre représentation nationale qu’elle prenne ses responsabilités en traitant enfin ce problème de l’accès au changement d’état civil comme un sujet urgent et important de lutte pour les droits humains, et en prenant en compte l’expertise de nos associations trans et intersexes pour élaborer des solutions à la hauteur des enjeux. Les personnes trans et intersexes n’ont pas vocation à subir en permanence ces violences médicales, psychiatriques, administratives, judiciaires et sociales, qui les blessent, les stigmatisent et les précarisent. Elles ont droit aussi à la citoyenneté, à la dignité, à la sécurité et à la considération".