Transport et AME : Pécresse attaque encore

Publié par jfl-seronet le 19.07.2018
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Malgré deux désaveux judiciaires, la présidente Les républicains de la région Île-de-France, Valérie Pécresse, s’obstine à remettre en cause le titre solidarité transport pour les personnes bénéficiaires de l'AME (aide médicale d’État). Le conseil d'administration d'IDF-mobilités qui gère les transports franciliens a adopté, 11 juillet, une nouvelle délibération restrictive et Valérie Pécresse fait un lobbying forcené au Sénat et à l’Assemblée nationale pour modifier la loi et obtenir gain de cause dans le traitement discriminatoire qu’elle entend appliquer aux personnes en situation irrégulière.

La Cour administrative d'appel de Paris a confirmé tout récemment que le retrait de la carte solidarité transport aux personnes bénéficiaires de l'AME dans la région Île-de-France était illégal et que cette mesure, adoptée le 17 février 2016 par le conseil d’administration d’Île-de-France Mobilités, devrait être rétablie. La mesure, qui faisait partie du programme de Valérie Pécresse lors de la campagne des régionales (et dans le programme du FN d’ailleurs), visait à exclure les bénéficiaires de l’AME de la réduction solidarité transport, en totale contradiction avec la loi et de manière discriminatoire. Elle avait été attaquée devant le tribunal administratif qui avait conclu à une "erreur de droit". La présidente de la région avait décidé de ne pas rétablir la mesure, malgré la condamnation et fait appel devant la cour administrative d’appel. Cela fait désormais depuis plus de deux ans que les personnes bénéficiaires de l’AME sont illégalement privées de la réduction tarifaire pour les transports franciliens.

Réuni le 11 juillet dernier, le conseil d'administration d'IDF-mobilités, dont la composition permet à la présidente Les républicains, Valérie Pécresse, de mener le jeu comme elle l’entend, n'avait pas d'autres choix que de revenir sur sa décision et de rentrer dans la légalité, après deux désaveux judiciaires : tribunal administratif donc, puis jugement défavorable de la cour administrative d’appel qui confirme l’"erreur de droit" (7 juillet denier).

C'était sans compter sur l'acharnement de la présidente de la région Île-de-France qui entend, coûte que coûte, faire passer cette mesure. Elle a ainsi fait voter à nouveau une délibération restrictive obligeant les personnes sans-papiers — l’AME ne concerne que les personnes en situation irrégulière — a prouvé leurs ressources uniquement avec un avis d'imposition pour prétendre bénéficier de cette réduction de 75 %. L'attestation AME ne serait plus admise ! Par ailleurs, les personnes sans-papiers devraient prouver qu'elles vivent en Île-de-France — ce qui est clairement illégale — et ne bénéficieraient d'une réduction que de 50 % — c’est le minimum prévu par la loi SRU —, là où les autres personnes en situation de précarité ont droit à 75 % de réduction sur les transports franciliens. Outre cette nouvelle délibération, la présidente de la région a profité du passage de la loi "Asile-Immigration" en première lecture au Sénat pour faire adopter un amendement par ses collègues Les républicains (le sénateur Roger Karoutchi, la sénatrice Laure Darcos) lui permettant d’arriver à ses fins en essayant de graver dans une nouvelle loi ce que la loi actuelle lui interdit. Elle est également passée à l’offensive auprès des députés-es pour qu’ils-elles conservent, lors du passage en deuxième lecture à l’Assemblée nationale, cet article. La majorité LREM ne devrait pas suivre et l’article passé à la trappe. On peut l’espérer, même si le partie majoritaire n’a fait aucune déclaration en ce sens.

Dans un communiqué (16 juillet), AIDES et de nombreuses associations et structures partenaires (1) dénoncent le fait que Valérie Pécresse, le conseil d’administration d’IDF Mobilités et la région Île-de-France soient "encore et toujours dans l’illégalité !" En effet, malgré deux décisions de justice, qui sont d’exécution immédiate, "Valérie Pécresse et le conseil d’administration d’IDF Mobilités ont décidé [11 juillet] de rester hors-la-loi, en laissant à l'écart les personnes sans papiers qui devraient bénéficier de ce tarif solidaire". Comme on a vu, une nouvelle délibération a été adoptée dans l’objectif évident d’introduire un traitement différencié, pénalisant et discriminatoire des personnes bénéficiaires de l’AME. "Ainsi, obsédée par sa politique de lutte contre les personnes sans-papiers, la présidente de la Région continue sa stratégie de contournement des décisions de justice et s’obstine à ne pas respecter les textes", dénonce un communiqué de presse de plusieurs associations et structures. Les organisations rappellent que "Si produire un avis d’imposition est l’un des moyens qui permet de justifier que la condition de ressources est remplie, la preuve peut être apportée par tout autre moyen, par exemple, par la production de l’attestation d’AME (comme c’était le cas jusqu’en 2016, cela permet d'attester de ressources inférieures au plafond d’attribution de la réduction tarifaire prévue par la loi)." Elles pointent également que : "La condition de résidence limitée à la région Île-de-France est contraire à l'article L. 1113-1 du Code des transports qui dispose que "la réduction s'applique quel que soit le lieu de résidence de l'usager".

Enfin, expliquent-elles : "Le fait de prévoir une réduction de seulement 50 % en faveur des personnes qui sont en séjour irrégulier contre 75 % pour les autres usagers défavorisés constitue une mesure discriminatoire. Cette rupture d'égalité n'est pas justifiée par une nécessité d'intérêt général et crée une inégalité d’accès au service public"
Les organisations appellent Valérie Pécresse et IDF-Mobilités à "respecter la loi et les décisions de justice en mettant fin à ces mesures illégales et en rétablissant sans aucune discrimination et sans délai, la réduction tarifaire pour les personnes bénéficiant de l’AME".

(1) : Act-Up, AIDES, ACSC Association des Cités du Secours-Catholique, CGT 75, CGT 78, Centre Primo Lévi, Comité des familles, Coordination 93 de lutte pour les sans-papiers, Dom ’Asile, Droits Devant !!, Fasti, Gisti, la Cimade Ile-de-France, Secours Catholique/Caritas France IDF, Union syndicale Solidaires.