TTF : la France montre-t-elle le mauvais exemple ?

Publié par jfl-seronet le 25.07.2012
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ConférencesAIDS 2012taxe sur les transactions financièresTTFTaxe Robin

Les annonces à géométrie variable de François Hollande et de Laurent Fabius sur la taxe sur les transactions financières ont suscité intérêt, léger espoir et finalement une grosse déception. La lutte contre le sida aura sans doute la portion congrue de cette TTF à la française. Un mauvais signal alors que les besoins financiers pour la lutte contre le sida, sont, certes importants, mais réalisables. Une fois de plus, la volonté politique n’est pas à la hauteur.

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Un exemple. Voilà ce que la France entendait faire de l’annonce par le président de la République François Hollande, le 23 juillet lors de la Conférence de Washington, de l’entrée en vigueur en août prochain de la taxe sur les transactions financières (TTF). Il s’agissait d’abord de rappeler une volonté : celle  de "créer des financements innovants, supplémentaires". En route donc pour la TTF à la française, une première étape que François Hollande, suivant en cela son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, entend lancer seul, avant de convaincre d’autres pays d'élargir cette taxe à l'échelle de l'Europe et du monde ; "de façon à ce que nous puissions verser des sommes nouvelles à la lutte contre le sida", indiquait le chef de l’Etat dans son message vidéo adressé aux participants de la conférence. Dans cette courte intervention, François Hollande se gardait bien de donner le moindre chiffre du montant du produit de cette taxe qui sera reversé à la lutte contre les grandes épidémies dont le VIH/sida. Et pourtant ce n’est pas faute d’avoir été questionné sur le sujet lors de la campagne présidentielle d’abord, puis après son élection. Comme l’avait entretenu Nicolas Sarkozy avant lui, le flou règne. Les ministres du précédent gouvernement, Henri de Raincourt notamment, bottaient aussi en touche lorsqu’on leur posait la question : quel montant pour lutter contre le VIH ? Les ministres actuels ne font pas mieux, tel Pascal Canfin, ministre délégué au Développement, qui éludait les questions précises de Mediapart, il y a quelques jours (16 juillet).
 
Changement d’équipe certes, mais flou persistant. Il faut attendre le 24 juillet pour que l’on apprenne enfin un chiffre : 10 % de la taxe sur les transactions financières irait au développement. C’est Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, qui l’explique lors d'une audition devant la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale. "Pour la taxe sur les transactions financières, il est envisagé (...) qu'un pourcentage, on a parlé de 10 %, soit attribué au développement", explique le ministre. "Je pense que ce serait quelque chose d'important où la France montrerait l'exemple. C'est dans cet esprit-là que nous travaillons", précise-t-il. Mais quel exemple ? Si on voit les choses positivement : on peut être satisfait que l’engagement de créer la TTF soit tenu et qu’une partie des recettes qu’elle va procurer soit affectée au développement. Si on est plus prudent et, disons-le, moins enthousiaste, on trouve que l’exemple français n’est pas le bon. 10 %, c’est un taux très bas, bien éloigné des objectifs initiaux de la Taxe robin des Bois et surtout pas du tout à la hauteur des enjeux du développement, et plus particulièrement des besoins financiers en matière de lutte contre le VIH/sida. Il n’est pas bon parce qu’il montre, en creux, que la TTF doit d’abord servir à combler les déficits budgétaires et pas au développement… ou alors de façon très (trop) marginale. On espérait la révolution par des financements sans précédents, on risque de devoir se contenter d’une aumône.
 
10 %. Ce montant est sévèrement jugé par AIDES. "Nous sommes très loin du compte", déclare Bruno Spire, président de AIDES. "Hollande semblait vouloir se donner les moyens de mettre fin à l'épidémie, mais Fabius est venu doucher les espoirs des malades", regrette-t-il. Sans doute faut-il y voir un des effets de ce qu’est la communication politique aujourd’hui à l’œuvre. Quel accueil aurait eu le message présidentiel à Washington si François Hollande avait mentionné ce montant si dérisoire ? C’est plus "facile" pour Laurent Fabius de le dire devant des députés français. Le gouvernement aurait pu faire un autre choix, il ne l’a pas fait. 10 % de cette taxe, ce sont à peine 100 millions pour les urgences mondiales. Soit 1 % de l'aide française annuelle au développement. Autrement dit, pas grand-chose. "Ce n'est pas avec 1 % d'augmentation que nous parviendrons à en finir avec le sida. On attendait des actes forts après les déclarations volontaristes de François Hollande, et c'est un pourboire que Laurent Fabius propose de laisser aux malades", constate Stéphane Simonpietri, directeur des programmes internationaux.
 
Dans son communiqué (25 juillet), AIDES appelle le gouvernement à aller au delà du symbole, en faisant de cette taxe une véritable arme au service de la lutte contre le sida et des grandes urgences mondiales. "On ne vaincra pas le sida avec un pistolet à bouchon", ironise Bruno Spire. "Plus de 7 millions de personnes ont un besoin urgent de traitement pour survivre. C'est d'abord à cela que la taxe doit servir". C’est bien là qu’est le problème, les gouvernements ne semblent pas partager cette vision. Si les Etats n’ont pas encore adopté cette taxe, il y a fort à parier que la dégradation de la situation économique s’accentuant, ils s’y rallient. Mais alors, celle-ci servira prioritairement à éponger les dettes… Des miettes seraient alors affectées à l'aide au développement.
 
Il existe bien un projet de taxe de la Commission européenne qui a prévu un taux de 0,1 % pour les actions et les obligations et de 0,01 % sur les autres produits financiers. Elle pourrait générer jusqu'à 57 milliards d'euros, si elle était appliquée dans toute l'Union européenne. Mais on ne sait rien de la part qui pourrait être attribuée au développement dont la lutte contre les grandes épidémies. Ce choix, a minima, du gouvernement français est donc un mauvais signe, et même un mauvais exemple. Il frappe d’autant plus qu’il est en décalage avec les cris d’alerte lancés par des personnalités engagées dans la lutte contre le sida. Le 10 juillet, plusieurs personnalités, dont Philippe Douste-Blazy, conseiller spécial du Secrétaire général des Nations Unies, président de UNITAID, avaient réclamé que la France consacre "au moins 50 %" du produit de la nouvelle taxe "au financement du développement, à la lutte contre les grandes pandémies, à l'accès à l'eau potable et la lutte contre la faim par le développement de l'agriculture". Le 23 juillet, c’est Bill Gates, dans un discours à la conférence,  qui expliquait : "Il est clair que même si on optimise au mieux la façon de faire ce travail, les fonds ne seront pas suffisants pour traiter toutes les personnes qui auront besoin de traitement (…) Nous vivons actuellement dans une période d'une incroyable incertitude quant au fait de savoir comment maintenir de solides financements".
 
10 %. Ce choix tranche également avec les déclarations "volontaristes" de François Hollande. Dans un contexte "difficile" sur les plans économique et financier, "l'engagement des Etats et des donateurs est indispensable", expliquait le président de la République (...). Il dépend désormais de nous d'arrêter l'épidémie du Sida, si nous le décidons, nous le pouvons". 10 %... est-ce le bon exemple ?

Commentaires

Portrait de joseph

je suis choqué par le contenu de ce document concernant le manque de serieux de francois hollande... je suis décu et je regrette de devoir constater que mr Hollande fait la sourde oreille..et ne fait pas plus une priorité de la maladie. C'est triste et je j'ai honte pour lui.... je voulais exprimer mon désarroi sur ce président que nous avons élue en qui nous avons mis tous nos espoirs...j'espere que des militants PS regarderons les reactions ici ou là des français et que le président prendra des décisions humanitaires.justes comme il le dit si bien .. PS REVEILLEZ VOUS!!!