Vie avec le VIH et les hépatites, HSH : quels vaccins ont un intérêt ?

Publié par Franck Barbier et Etienne Fouquay le 14.05.2015
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Fin avril, s’est tenue la Semaine européenne de la vaccination, un événement à l’initiative de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Cette manifestation annuelle a pour objectif d’aider la population à mieux comprendre les bénéfices, aussi bien individuels que collectifs, de la vaccination et à faire connaître les maladies contre lesquelles elle protège. C’est aussi l’occasion pour chacun de faire le point sur ses propres vaccins, notamment lorsqu’on vit avec le VIH et/ou une hépatite. Explications.

La vaccination est, avec le dépistage, un des principaux gestes de prévention, et un des grands succès des politiques de santé publique que ce soit sur le plan individuel que dans l’intérêt collectif. Pour Aides, les vaccinations sont même un sujet d’intérêt majeur. D’abord parce que certains pathogènes touchent plus souvent ou plus gravement certaines populations : personnes vivant avec le VIH, le VHB ou le VHC, hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes, personnes migrantes en provenance de zones où certaines maladies sont endémiques, personnes usagères de drogues par voie intraveineuse… Ensuite, parce que la protection simple et efficace contre divers pathogènes quand on est séropositif ou immunodéprimé est une des premières choses à faire ; par exemple avec les virus de la grippe amenant des symptômes plus gênants, voire plus graves, et aussi contre le pneumocoque. Intérêt aussi vis-à-vis de l’hépatite B — une maladie qui touche plus de 250 000 personnes en France dont la moitié l’ignore —, car le vaccin est le moyen le plus simple pour se protéger de cette infection pouvant amener au cancer du foie ou à des hépatites fulminantes (destruction rapide du foie). Enfin, parce que la recherche sur les vaccins est essentielle et doit continuer à être financée, notamment celle menée pour amener un jour à un vaccin préventif contre le VIH ou le VHC.

Le rapport bénéfices /risques et les recommandations d’experts

Si l’adhésion à la vaccination est à la hausse : 79 % des personnes entre 18-75 ans (contre 61 % en 2010), il y a parfois une défiance vis-à-vis des vaccins dans la population générale, notamment du fait de leurs effets indésirables potentiels ou démontrés. Des polémiques perdurent parfois depuis longtemps, comme avec la vaccination de l’hépatite B durant les années 90, et certains médecins expriment encore des doutes sur l’utilité ou les risques des vaccins (1). Au-delà d’un risque zéro qui, d’ailleurs, n’existe avec aucun produit de santé — on l’a vu récemment avec des médicaments aussi répandus que le paracétamol ou l’ibuprofène —, le plus important à considérer est la notion de rapport bénéfice/risque. Si pour une population, une communauté, ou un individu, les bénéfices espérés de la vaccination excèdent suffisamment les risques possibles, alors il vaut mieux se vacciner, pour soi et pour les autres.

Il faut aujourd’hui promouvoir davantage l’existant. Il en va ainsi de la vaccination contre le virus de l’hépatite B (VHB), notamment chez les homosexuels, les personnes usagères de drogue, les personnes issues de zones et de pays où le virus est plus répandu (ainsi que chez l’entourage). Aujourd’hui, entrent dans la sexualité les générations de ceux qui n’ont pas toujours bénéficié de la vaccination contre le VHB. Le Rapport Dhumeaux insiste d’ailleurs sur la vaccination des adolescents. On peut craindre, faute d’une politique de vaccination efficace, un plus grand nombre d’infections par le VHB, qui se transmet très facilement. Une note d’espoir cependant : En 2014, pour la première fois, plus de 90 % des bébés de 6 mois ont été vaccinés contre l’hépatite B avec au moins une dose de vaccin. De plus, d'après une enquête Inpes (Institut national de prévention et d’éducation à la santé) en 2011, seuls 9 % des Français étaient défavorables à la vaccination contre l’hépatite B (VHB).

Il faut aussi promouvoir la vaccination recommandée contre le méningocoque C chez les homosexuels. Cette année en effet, le Haut conseil de santé publique (HCSP) recommande la vaccination contre les "infections à méningocoque C conjugué" pour les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) et les autres personnes qui fréquentent les lieux de convivialité ou de rencontre gays ou qui souhaitent se rendre à un rassemblement gay (ex : marches des fiertés, soirées, etc.).

Il faudrait enfin élargir la vaccination contre le Papillomavirus humain (HPV), actuellement recommandé chez les jeunes filles, mais pas chez les garçons. Or, nous savons que ce virus est un des plus mortels, causant 5 % des cancers dans le monde dont des centaines de milliers de cancers de l’utérus mais aussi des cancers du pénis, de la gorge et de l’anus. Il est donc urgent de pouvoir protéger aussi les garçons car l’infection à HPV est très présente chez les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) et en particulier chez les HSH séropositifs pour le VIH. Aides a organisé, à ce sujet, une journée scientifique, le 7 avril 2014 et pris position publiquement pour une extension de l’accès au vaccin anti-HPV aux garçons (2). Enfin, au-delà de la simple recommandation il importe aussi de promouvoir ces vaccins. On constate en effet que moins de 20 % des jeunes filles qui ont eu 15 ans en 2014 se sont fait vacciner contre les papillomavirus.

Le vaccin contre la grippe n’a pas non plus séduit cet hiver : moins de 50 % des personnes à risque (personnes âgées et personnes souffrant de certaines maladies chroniques-dont le VIH) se sont fait vacciner contre la grippe cet hiver.

La question du remboursement et de l’accessibilité

Les recommandations et la promotion sont une chose, la disponibilité effective en est une autre. Ainsi en va-t-il des freins à l’accès par une mise à disposition ou des remboursements insuffisants. L’hépatite A, une pathologie assez rare, généralement bénigne, mais qui peut amener des cas graves,  peut être évitée par un vaccin. Il est recommandé pour les homosexuels masculins mais n’est pas remboursé dans ce cas. Il faudrait que les vaccins recommandés, pour lesquels un bénéfice de la vaccination est clairement attendu, soient remboursés, tant pour la santé individuelle, que dans une optique de santé publique (réduction des transmissions).

Pour aller plus loin...
Le calendrier vaccinal (incluant les dispositions pour les personnes vivant avec le VIH et immunodéprimées) actualisé en mars 2015.
Le vaccin et la vaccination par l'Inpes.