Vie avec le VIH : les résultats d’une étude

Publié par jfl-seronet le 11.05.2018
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Chiffres

Comprendre les préoccupations de vie des personnes vivant avec le VIH comme de leurs proches (second volet de l’étude) et répondre à leurs besoins réels, tel était l’objectif de l’enquête internationale "Positive perspectives" initiée par le laboratoire pharmaceutique ViiV Healthcare. L’étude a concerné plus de 1 111 personnes vivant avec le VIH dans neuf pays : Australie, Canada, Etats-Unis, Autriche, France, Allemagne, Italie, Espagne et Royaume-Uni.

Côté méthode, l’enquête s’est appuyée sur un comité de pilotage d’experts-es de toutes disciplines, de différents pays (dont ceux impliqués dans l’étude), incluant des médecins, des personnes vivant avec le VIH et des représentants-es d’associations de personnes. Trois thèmes (assez classiques) ont été abordés : les aspects psychosociaux liées à l’infection par le VIH, la satisfaction des personnes vivant avec le VIH concernant leur traitement anti-VIH, la communication entre le professionnel de santé et la personne vivant avec le VIH (autrement dit, la relation soignant-soigné). Au total, plus de 1 111 personnes vivant avec le VIH ont participé avec de fortes différences d’échantillon selon les pays : 7 personnes en France contre 140 en Allemagne, 160 au Royaume-Uni et 327 personnes aux Etats-Unis. Ce sont à 75 % des hommes qui ont répondu contre 24 % de femmes et 1 % de personnes trans. La tranche d’âges la plus représentée est celle des 35-49 ans (41 %, soit 451 personnes). L’année de diagnostic est antérieure à 2006 pour 49 % des participants-es (549 personnes). Elle se situe entre 2006 et 2014 pour 40 % des personnes interrogées et entre 2015 et 2016 pour 11 % (119 personnes).

Des données sur le diagnostic

Ce ne sera une nouveauté pour personne : Très logiquement, le diagnostic est une première étape que de nombreuses personnes vivant avec le VIH jugent difficile. Les résultats de l’étude "Positive Perspectives" montrent que les personnes diagnostiquées il y a plus de dix ans (549 personnes dans cette étude) disent avoir bénéficié de moins de soutien lors du diagnostic que celles diagnostiquées plus récemment. "Cela souligne probablement l’amélioration de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH et de l'accès aux organismes de soutien", expliquent les auteurs-es. Pour autant, les résultats indiquent que des progrès restent à réaliser. En effet, près d’un quart des personnes diagnostiquées en 2015-2016 n’ont reçu aucun conseil ou soutien psychologique de la part de leur médecin au moment du diagnostic. Par ailleurs, seulement 45 % des personnes vivant avec le VIH se sont tournées vers un proche pour un soutien affectif après le diagnostic.

Le poids toujours fort de la stigmatisation

C’est une confirmation : les stigmatisations associées au VIH persistent. En effet, 82 % des personnes vivant avec le VIH de cette enquête ont connu une forme de stigmatisation liée à leur séropositivité au cours des douze derniers mois.

Il a été demandé aux participants-es si leur vie avait changé de manière positive ou négative au cours des cinq dernières années. De grandes tendances se dégagent des réponses : le VIH continue d’être associé à la discrimination et à la stigmatisation, les personnes concernées craignent de faire état de leur statut sérologique, des personnes ont perdu des amis, des membres de leur famille après avoir dévoilé leur séropositivité.

Autre donnée : seulement trois personnes vivant avec le VIH sur dix se "considèrent ouvertes à propos de leur statut VIH", c’est-à-dire qu’elles n’ont pas de difficultés à parler de leur séropositivité à d’autres personnes.

Traitement : un accès plus facile

On sait sur le plan général que le temps d’initiation du traitement a été réduit sur ces dix dernières années. Les personnes diagnostiquées récemment étaient plus nombreuses à accéder aux traitements dans les six mois suivant le diagnostic que celles diagnostiquées depuis plus de dix ans, respectivement 88 % des personnes contre 41 %. Par ailleurs, 98 % des personnes vivant avec le VIH sont sous traitement anti-VIH. De plus, 87 % des personnes vivant avec le VIH annoncent être très satisfaites ou satisfaites de leur traitement, dont 56 % très satisfaites. Pas de mystère, la principale raison d’un changement de traitement est la réduction de la fréquence ou de la sévérité des effets indésirables pour 42 % des personnes. De plus, 72 % des personnes sous traitements sont préoccupées par les effets à long terme des médicaments anti-VIH. D’ailleurs, 62 % des personnes disent être ouvertes à un allègement ou une simplification de traitement (moins de comprimés) à la condition du maintien d’une charge virale indétectable. Les auteurs-es expliquent que la réduction des effets à long terme et la mise en place de traitements à action prolongée pour réduire la fréquence de prise sont jugés comme les critères les plus importants par les personnes vivant avec le VIH.

Enfin, pas de grandes découvertes dans le domaine des relations soignants/soignés. Les participants-es de l’étude indiquent à 94 % se sentir très ou plutôt en confiance pour aborder les sujets qui les préoccupent avec leur médecin. Il n’en demeure pas moins un net décalage entre ce déclaratif et la pratique. En effet, l’étude indique que si 72 % des personnes sous traitements ARV sont préoccupées par les effets à long terme des traitements anti-VIH, 26 % n’ont pas abordé cette question avec leur médecin.

Comme on le voit, cette enquête confirme beaucoup de choses déjà connues, certaines depuis longtemps. Une nouvelle fois, sont réaffirmés le besoin de progrès nets en matière de lutte contre les discriminations et le besoin d’un accompagnement plus performant à l’annonce du diagnostic. Reste à savoir comment. C’est sans doute une des limites de la synthèse de l’étude de ViiV Healthcare : confirmer avec des données récentes le constat, mais ne pas faire de propositions innovantes.

Plusieurs références scientifiques ont été utilisées par les auteurs-es de l’étude dans l’analyse des résultats. Il s’agit de :
• Marcotullio S, et al. EU Patient Experience & Views on AntiretroviralTreatment− Findingsfromthe Positive Perspectives Survey. Presentedat the 16th EuropeanAIDS Conference(EACS), 25−27 October2017, Milan, Italy. Abstract number#PE25/9. N = 1111.
• MurungiA,et al. Experience of living withHIV : Diagnosis& Disclosure–findingsfromthe Positive Perspectives study. Presentedat the IAS Conferenceon HIV Science (IAS 2017), 23-26 July 2017. Paris, France. Poster : WEPED1423. N = 1085.
• Moskowitz JT, et al. Illness Appraisals and Depression in the First Year after HIV Diagnosis. PLoSONE. 2013;8(10):e78904.
• Young B, et al. Patient Experience & Views on AntiretroviralTreatment–Findingsfromthe Positive Perspective study. Présenté lors de la semaine des maladies infectieuses (conférence ID Week), 4-8 octobre 2017, San Diego, États-Unis. N = 1111.