"VIH, hépatites et vous" : y’a du boulot !

Publié par jfl-seronet le 17.11.2011
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emploi
En octobre 2010, AIDES conduisait l’enquête "VIH, Hépatites et vous". Réalisée tous les deux ans, cette enquête vise à en savoir plus sur les conditions de vie et les besoins des personnes concernées par le VIH et les hépatites virales qui fréquentent l’association. 2 356 personnes y ont participé, dont 1 067 séropositives au VIH. Seronet vous présente les données concernant l’emploi et le VIH. Des données présentées lors d’un récent colloque à Paris en octobre.
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Au fil des données recueillies par l’enquête "VIH, Hépatites et vous", une chose est sûre, il est difficile de différencier les causes des conséquences des difficultés des personnes vivant avec le VIH dans l’emploi. Ce n’est pas spécifique au VIH, c’est même assez partagé avec les autres maladies chroniques, mais être séropositif ne permet pas un même accès au maintien dans l’emploi que pour le reste de la population… Alors que disent les chiffres.

Les personnes séropositives au VIH et l’emploi
Premier enseignement, malgré un âge moyen qui révèle une population globale en âge de travailler, on observe un taux de chômage très élevé dans l’échantillon des personnes qui ont répondu. En effet, moins de la moitié des personnes séropositives au VIH exercent une activité professionnelle (46%). Dans son édition de 2005, les chiffres de la même enquête montraient que seulement 23% des personnes vivant avec le VIH travaillaient. Pour 2010, plus du tiers des personnes a travaillé, mais ne travaille plus pour différentes raisons : certaines sont hors de l’emploi, volontairement ou non, d’autres du fait de leur âge (à la retraite ou en pré retraite : 6%). Une personne sur six est privée d’activité de manière involontaire et est demandeur d’emploi (17,8%) tandis que d’autres, probablement en raison de leur incapacité, du fait de la maladie, à travailler ne recherchent pas d’emploi (13,1%). Le taux d’emploi pour les personnes infectées avant 1997 est beaucoup plus faible que pour les personnes qui se sont contaminées depuis l’arrivée des trithérapies (37% contre 58%) et leur généralisation en 1997.

Avant et après 1997…
Selon que la séropositivité soit ancienne ou récente joue sur l’accès et le maintien dans l’emploi. Les personnes contaminées avant les trithérapies ont plus souvent un contrat à durée indéterminée (73,4%) et beaucoup moins souvent un contrat à durée déterminée (6,4%). Pour les personnes contaminées depuis 1997, ce dernier pourcentage est le double : 12,5%. L’ancienneté dans la maladie n’est sans doute pas la seule explication de cet écart : l’âge peut aussi être un facteur explicatif, du fait, par exemple, de plus d’expérience et de qualification profesionnelle.

Les secteurs de l’emploi

78% des répondants travaillent dans le secteur privé. 25% dans les petites et moyennes entreprises et 15% dans les très petites entreprises. Le secteur public emploie 22% des personnes ayant répondu à l’enquête : 14% pour l’Etat, 5% dans la fonction territoriale et 3% dans la fonction hospitalière.

Le montant et la nature des ressources des personnes

39,5% des personnes qui sont séropositives au VIH et/ou à l’hépatite B ou l’hépatite C ont eu moins de 950 euros par mois en moyenne pendant l’année écoulée. Parmi les personnes coinfectées (VIH/VHC) ce pourcentage augmente et atteint 52,3%. La coinfection est ainsi liée à la réduction de revenus. Dans tous les cas, une part conséquente des personnes est en dessous du seuil de pauvreté (950 euros). Trois personnes sur cinq bénéficient d’un salaire ou d’un revenu en tant que travailleur indépendant (parfois le salaire peut faire référence au salaire du conjoint, de la conjointe ou autres). 6% déclarent toucher une retraite. Une personne sur sept bénéficie d’une pension d’invalidité (ce qui suppose une durée minimale d’activité professionnelle antérieure). Il est à noter que 3% des personnes séropositives ayant répondu à l’enquête touchent le RSA (revenu de solidarité active). Ce chiffre met en évidence d’une part, les difficultés d’accès à l’AAH (allocation aux adultes handicapés) et d’autre part, l’augmentation de la capacité de travail des personnes vivant avec le VIH, du fait notamment des progrès médicaux, ce qui les exclut des dispositifs liés au handicap. La proportion des personnes en situation de très forte précarité financière est importante. Lorsqu’on compte le nombre de personnes qui perçoivent le RSA, celles qui vivent grâce aux aides des proches et celles confrontées à une absence totale de ressources, près de 10% des répondants sont concernés.

Emploi et conditions de travail : quelles répercussions de la maladie ?
Pour celles qui travaillent, près d’une personne sur deux déclare avoir des difficultés à gérer son emploi en même temps que sa santé. Concernant les arrêts maladies au cours des 12 derniers mois pour une durée de plus de trois mois, les résultats montrent que 7% des personnes vivant avec le VIH sont dans cette situation contre 1% des personnes séronégatives. Ces difficultés à concilier emploi et maladie se traduisent, modérément, sur les options d’organisation du temps de travail. Les dispositifs d’aide de maintien dans l’emploi ne concernent qu’une personne sur sept. Une personne sur trois bénéficie de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH). Le temps partiel thérapeutique concerne une personne sur dix tandis que le temps partiel est subi pour une personne sur trois.

La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé

Si 46% des personnes contaminées avant les trithérapies ont une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, elles ne sont que 26% pour les personnes contaminées depuis l’arrivée généralisée des trithérapies en 1997. Ce différentiel, expliquent les auteurs de l’enquête, est à rapprocher de l’âge des intéressés : l’ancienneté dans la maladie et le défaut de prise en charge peuvent inciter à demander la RQTH (reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé). Seules 22% des personnes ayant un emploi (qu’il soit déclaré ou non) ont la reconnaissance de travailleur handicapé. Plus d’un tiers des personnes ayant la RQTH occupe un emploi, un quart a travaillé et recherche un emploi et une sur cinq a travaillé et ne recherche pas d’emploi. Près d’une personne sur deux déclare avoir des difficultés pour se maintenir dans l’emploi au sein des entreprises (privées et publiques confondues). Cette difficulté concerne particulièrement les personnes travaillant dans de très petites entreprises.


L’enquête "VIH, Hépatites et vous", met en évidence trois points principaux concernant les personnes séropositives au VIH ayant répondu à cette enquête. Celles-ci connaissent un faible taux d’emploi, une forte précarité et ont de faibles ressources financières. D’autre part, elles subissent des difficultés dans l’emploi qu’elles aient recours ou pas aux dispositifs d‘accès ou de maintien dans l’emploi. Dernier point, on peut nettement distinguer des différences concernant d’une part les personnes qui sont anciennement contaminées et celles qui l’ont été après 1997. Autrement dit, les personnes selon qu’elles ont été infectées avant ou après la généralisation des trithérapies ont vécu des histoires différentes et ont, potentiellement, des besoins différents en matière d’emploi, accès comme maintien. Comme le résument les auteurs de l’étude, la "question de la personne malade reste un problème majeur à résoudre dans le cadre des politiques de l’emploi".

Cette enquête a été réalisée par AIDES et plus particulièrement par l’équipe de la Mission Innovation Recherche Evaluation (MIRE) que nous remercions pour leur travail de présentation et d’analyse des données qui compose l’essentiel de cet article.