VIH : la Chine reconnaît une affaire de discrimination

Publié par Emy-seronet le 17.02.2013
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Mondesérophobiediscrimination

Un Chinois qui s'était vu refuser un poste d'enseignant en raison de sa séropositivité au VIH a remporté son procès et 45 000 yuans d'indemnisation le 22 janvier 2013. Surnommé Xiao Qi par la presse locale, il est le premier séropositif du pays à obtenir gain de cause dans une affaire de discrimination liée au VIH/sida (sérophobie).

Xiao Qi (pseudonyme) s'est dit soulagé après l'annonce du verdict et la condamnation du bureau de l'éducation qui lui avait refusé un poste d'enseignant l'année dernière, en raison de sa séropositivité et malgré ses très bonnes notes aux examens écrits et oraux. L'examen médical est obligatoire pour toutes les personnes qui postulent à un poste d'enseignant en Chine, et cet examen comporte un test de dépistage du VIH. "J'étais indigné quand j'ai appris que j'avais perdu ma chance de devenir enseignant, mais l'indemnisation que j'ai obtenue (…) illustre le fait que la loi peut protéger [les droits des personnes atteintes du sida]", a-t-il déclaré au "Frenchpeopledaily" peu après le verdict. Xiao Qi a déposé plainte en novembre 2012. Le mois suivant, il est parvenu à un accord avec le bureau de l'éducation qui l'avait refusé, dans la province du Jiangxi (Est), et s'est vu proposé une indemnisation de 45 000 yuans soit 13 fois le salaire moyen chinois.

"C'est la première fois qu'un patient atteint du sida est indemnisé pour discrimination à l'emploi en Chine. Cette affaire est très importante", a indiqué Cheng Yuan, directeur de Tianxiagong ("Justice pour tous"), association qui lutte contre les discriminations dont sont victimes les personnes handicapées, vivant avec le VIH ou une hépatite virale. "Il est extrêmement difficile pour les patients atteints du sida d'obtenir une aide juridique en Chine. Cette affaire est un événement marquant dans la lutte contre la discrimination envers les malades du VIH/sida", a continué Liu Wei, avocat défendant les intérêts publics. Cette décision est donc une première. Les discriminations sérophobes sont fréquentes dans ce pays qui compterait, selon les estimations officielles, 780 000 personnes vivant avec le VIH. Les associations déclarent que les affaires de discrimination à l'embauche de ce type sont nombreuses, tout comme les refus de soins qui peuvent entraîner de graves conséquences. En automne dernier toujours, un homme séropositif a fait scandale dans la presse locale, expliquant qu'il avait été obligé de mentir et de falsifier ses dossiers médicaux avec l'aide d'une association pour bénéficier d'une opération chirurgicale, ce qui a permis de mettre en lumière ce problème tabou. Le "Frenchdailypeople" s'est penché sur la question, passant en revue plusieurs affaires récentes de discriminations similaires. Les associations du pays ont rappelé que des "Règlements sur la prévention et le traitement du VIH/sida" ont été publiés en 2006 pour protéger les droits des malades et de leurs proches, dont le droit au mariage, à l'emploi, aux soins et à l'éducation. Ces "Règlements" sont encore trop souvent ignorés.

Début janvier 2013, les autorités de Guangdong, une autre province chinoise, ont publié un projet de loi stipulant que les personnes vivant avec le VIH/sida ne pourraient plus y enseigner. Invités à se prononcer sur cette mesure très débattue, plus de 300 internautes ont répondu à un sondage en ligne : la moitié s'est déclarée favorable à une telle interdiction, considérant les enseignants séropositifs potentiellement "dangereux" pour les enfants. "Cette attitude est la preuve que les informations concernant la prévention du sida ne sont pas suffisamment répandues", avait alors déploré Yu Fangqiang, coordinateur en chef de l'association chinoise de santé publique Beijing Yirenping Center, dans un autre journal. Ces dernières années, Yu Fangqiang a accompagné quatre personnes vivant avec le VIH dans leur procès contre le ministère chinois de l'Education pour discrimination à l'embauche et en a perdu trois. Le verdict reconnaissant le préjudice subi par Xiao Qi a peut-être ouvert la voie vers une meilleure prise en compte de la stigmatisation dont sont victimes les séropositifs du pays.