Comment on fait pour devenir constant? (est-ce vraiment ce que je veux par contre?)

Publié par Achille le 22.12.2008
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Je me rends compte à quel point cela demande de la rigueur et de la constance que de prendre ses médicaments à tous les jours, à peu près aux mêmes heures. Deux qualités qui n'ont jamais été celles qu'on est porté à m'attribuer spontanément.  

Hier, complétement bourré, j'ai mélangé mes doses.  Alors que je préparais ma ration pour apporter le lendemain, j'ai avalé les pilules que j'avais dans la main et j'ai mis celle que je devais prendre dans mon pilulier.  La différence est relativement grande : j'en prends une le soir (qui est peut-être un placebo) et trois le midi (dont un est nécessairement un placebo).  

Point positif : pour une fois, c'est pas comme si j'avais oublié de les prendre.  

Point négatif :  j'ai gaspillé une dose en me faisant vomir pour faire ressortir le tout. 

C'est bête comme erreur de manipulation.  C'est là que j'ai réalisé qu'on me mettait beaucoup de responsabilité entre les mains, le tout concentré dans ce paquet de pilules. 

Pour une fois, j'essayais simplement de faire ce qu'on me disait de faire, ce qu'on attend de moi, que je prenne mes pilules pour ne pas mourir.  C'est la première fois que je me sens obliger de me conformer face à une si intangible conséquence, mais qui pèse avec tant de fatalité. 

J'ai toujours détesté qu'on me dise quoi faire.  Et là, on me fait pendre la possibilité que si je saute une dose, à la longue, je pourrais développer des résistances, ma santé s'affaiblir et tout le tralala.  Et que si je ne deviens pas cette parfaite machine à prendre mon médicament, et bien ce sera ma faute. 

Ça me fait relativement flipper. J'essaie de retourner le tout de manière positive : à la longue, c'est une qualité à développer, la constance.  Je n'en serai que plus fort.  Mais c'est justement le fait que je n'ai pas le temps de développer une certaine maîtrise, tout doit être parfait maintenant, sinon gare à moi, à ces abstraites possibilités que peut-être que quelque chose va arriver ou peut-être pas. 

Au moins, avec l'exercice physique, tout le monde sait bien qu'il faut en faire mais on peut toujours remettre ça un petit peu à demain avant de vraiment s'y mettre. 

J'ai l'impression de subir une pression énorme à la conformité, moi qui n'aie pas l'habitude de me conformer.  Ça m'a déjà fait faire une dépression le printemps dernier, alors que j'essayais de me convaincre qu'il fallait bien que je me case dans une job bien payante avec plein davantages, pour ma propre sécurité et mon bien-être futur.  Un emploi emmerdant qui ne me correspondait pas.  Mais un job, c'est un job et ya la vie après non?  On voit où ça m'a mené, de penser que je pourrais jouer au bourgeois rangé.

Commentaires

Portrait de pete.in.private

Ma réponse ne va pas beaucoup te réconforter. J'ai été contaminé récemment et je n'ai pas encore l'expérience des traitements. Pourtant un jour viendra... Et ma hantise est justement cette exigence de constance et de sérieux que demande la prise des traitements.

C'est pourquoi je me reconnais dans tes propos : je déteste qu'on me dise ce que je dois faire, je suis un grand fétard avec prises de produits psychotropes qui à mon avis ne vont pas s'entendre avec celles des médicaments, la régularité est un problème et elle le deviendra encore plus !

Un jour viendra où on me donnera des coups de batons pour m'obliger à me calmer et je serais contraint de changer ma vie, mes plaisirs, mon rythme... Peut-être que je découvrirais une nouvelle manière de voir les choses, peut-être trouverais-je du plaisir ailleurs, peut-être...

Si il y a des "personnes d'expériences" ou tout du moins des personnes qui se reconnaissent dans nos parcours, qu'elles le fassent savoir !  La vie s'arrête-elle avec la prise des traitements ?

Portrait de romainparis

Prendre un traitement est un choix personnel avant tout. Non, la vie ne s'arrête pas. Cependant, elle peut devenir differente suite aux éventuels Effets Secondaires et du regard de la société. S'il y a certains points communs entre les séropositifs, ils restent néammoins, comme une certaine grippe, atypiques.

Portrait de Ghislain

Alors de l'expérience j'en ai un peu, 7 ans de traitement pour un résultat invisible.

Jamais dans la merde médicalement à cause du VIH (ou du moins c'est pas très clair, parce que c'est toujours difficile d'identifier clairement ce qui vient du VIH ou de ton corps de base), c'est les traitements qui la plupart du temps m'ont rendu sick.

Traité à l'époque du traiter vite, traiter fort, y a eu comme qui dirait un avant et un après traitement et crois-moi si tu veux, j'ai vécu deux fois plus après, en emmerdant ces putains de prises à heures fixes, tout en me conformant bon an mal an aux prescriptions.

Je crois que je suis pas très clair là. Je précise donc.

Etre séropo (et probablement que prendre un traitement très tôt me l'a fait sentir très vite) m'a donné envie de vivre plus vite, plus fort, et finalement a contrebalancé les contraintes médicamenteuses.

 OK je devais me réveiller la nuit pour prendre les cachetons, mais finalement si je ne me couchais pas c'était plus simple! J'ai toujours trouvé des arrangements entre les médocs et la vie et finalement je suis pas trop mal en point.

3 ans aujourd'hi que j'ai tout laché parce que je n'étais plus capable de les prendre correctement (ras le bol, dégoût, gavage, manque de sens...? je ne sais toujours pas trois ans après), et je sais qu'il va falloir que je reprenne. Là je flippe grave, mais je sais que je vais reprendre le combat contre les pilules qui m'emmerdent et que je vais continuer à gagner contre elles en continuant de faire ce que je veux, tout en gardant un niveau d'observance qui pour moi est acceptable.

Et paradoxe... j'ai hâte de reprendre parce que vivre sans parachute me flippe aussi, je retarde chaque fois un peu plus les bilans sanguins et j'ai toujours peur de contaminer un mec qui n'a rien demandé.

Les merdes que j'avalais m'empoisonner la vie et le corps, et me rendais plus serein aussi.

A cette heure je pense bien que mes réflexions sont nébuleuses, j'espère néanmoins qu'elles sont suffisament claires pour qu'elles soient un soutien et une manière de mieux me connaitre.

Bien à toi

Portrait de frabro

Bonjour

Bon, je dois etre une "personne d'expérience", avec douze ans de trithérapie derrière moi ! Avant celà j'ai connu la période ou on prescrivait l'AZT à doses massives, et j'avais après avoir été déglingué pendat une semaine refusé de continuer. J'allais bien, je ne voyais pas la nécessité de prendre des médicaments qui m'empechaient de vivre alors que je savais qu'ils ne me soigneraient pas vraiment.

 Mais voilà, le VIH a continué son chemin et j'ai du m'adapter, vivre au ralenti, arreter de travailler, vivre au jour le jour et avec des bouts de ficelles pour joindre les deux bouts !

Alors quand les trithérapies sont arrivées, et que les premiers résultats ont été spectaculaire, j'ai demandé à reprendre. C'était en 95, et si je ne l'avais pas fait je ne serais plus là.

Il a fallut des années avant qu'un mélange marche vraiment. Des années d'essais. Avec les pilules de l'époque, jusqu'à une trentaine de gélule, aevec les effets secondaires croisés. Alors j'ai à nouveau arreté tout pendant un an : mi-temps thérapeutique, fatigue permanente, surveillance rapprochée T4 et CV, energie en baisse mais corps qui se reconstitue.

Quand on est arrivé au seuil le plus bas que nous nous étions fixés (le medecin et moi), le kaletra venait d'arriver. Je m'y suis remis, encore quelques tatonnements sur les autres produtis, puis le traitement qui marche dans la durée.

Personne ne m'a jamais obligé ou contraint. J'ai choisi, à certaines époque, les contraintes du traitement ou celles de la maladie.  Tu as aussi ce choix.

Aujourd'hui, je prends mes six gélules par jour en deux prises, c'est aussi naturel pour moi que de prendre ma douche, de mettre mes lunettes ou de boire mon café le matin. je te souhaite, le moment du choix venu, d'arriver à intégrer celà dans ton quotidien sans que ça te paraisse comme une dictature. 

Portrait de altelia

je suis sous tri-th. depuis 95, et je suis le contraire de l'observance! mais la chance, c'est que je dois avoir un virus encore pas trop virulent, je me suis fait "engueuler" (les guillemets c'est parce que ils disaient ça de façon diplomatique) par les toubibs pendant... très longtemps; j'ai essayé plein de trucs, notamment une montre avec réveils (je mets plus de montre, ça me gonfle), et je dérapais constamment; mais comme charge indétectable, t4 bonne route, j'ai fini par être pas trop alarmée; et puis le médecin a fini par me dire tant pis pour l'heure, mais PRENEZ LES, BON SANG! je suis devenue moins terrorisée, et finalement, petit à petit, je suis presque bonne observante; et je crois que ce qui a aussi limité les dégâts, c'est que j'ai toujours pris des compléments, comme une grande sans rien dire aux médecins! et quand bien même c'est pas ceux là qui me sauvent, ben ils m'aident je pense!

voilà, ma p'tite expérience ,bien que je crois que c'est le temps qui permet de trouver son propre chemin d'observance, peut-être à force d'observation, non?