faudra si habituer ... au vivre ensemble !

Publié par jl06 le 06.03.2018
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"Des mecs comme vous, on les égorge" : un couple d'homosexuels menacé de mort dans un supermarché un couple d'homosexuels menacé de mort dans un supermarchéPhoto d'illustration. (JOEL SAGET / AFP)Au-delà de la violence des mots, c'est l'absence de réaction des témoins et le comportement des employés du magasin qui ont choqué le couple.

Par L'Obs

Publié le 06 mars 2018 à 13h12 

"Sales pédés, tarlouzes, pédales, des mecs comme vous, en Algérie, on les égorge…" Un véritable déferlement de haine. Un couple d'hommes a été insulté et menacé de mort samedi dernier à la caisse d'un supermarché Carrefour Market à Rueil-Malmaison dans les Hauts-de-Seine.

L'une des victimes, Laurent, 55 ans, a raconté la scène au micro de France Bleu Paris.

"Ce qui m'est arrivé a été violent. […] Une jeune femme de 25-30 ans nous a bousculés. Elle a commencé à nous insulter de pédé, etc. 'C'est une honte pour la France, ils méritent de mourir' : voilà ce qu'elle nous a sorti. […] On était sidérés d'entendre ce genre de propos."

Et puis "elle a pris son portable en appelant quelqu'un de son entourage" pour lui dire "qu'il y avait deux clients pédés qui ne méritaient pas de vivre et qu'il fallait les buter", a également raconté Laurent dans un message posté sur Facebook et relayé par l'association Stop homophobie.

 "Personne dans le magasin n'a bougé"

Au-delà de la violence des mots de la jeune femme, accompagnée de sa fille de 4 ans, c'est l'absence de réaction des témoins qui a choqué le quinquagénaire :

"Personne dans le magasin n'a bougé. Je trouve ça inadmissible en France que personne ne bouge. […] J'en ai marre de me faire insulter, menacer, sans que personne ne bouge ! Il faut bouger. Cela peut arriver à tout le monde, les agressions dans le métro ou ailleurs. Il faut que les gens se bougent un peu en France !"

"Même la caissière a baissé la tête, en souriant", précise Stop Homophobie dans son communiqué. "Et lorsqu'un vigile s'est enfin manifesté, c'est pour prendre des nouvelles de la cliente, ignorant totalement les requêtes du couple, l'exhortant à calmer la jeune femme."

Une plainte et "un courrier salé"

Selon l'association, c'est même aux deux hommes que le vigile a demandé de payer et repartir "sans faire d'émeute" : "On est resté bouche bée. Au final on s'est fait insulter et menacer de mort sans que le personnel de Carrefour n'intervienne", confie Laurent.

Le groupe Carrefour a rapidement réagi, condamnant très fermement des faits "contraires aux valeurs de l'entreprise".

"Nous regrettons l'incident qui s'est déroulé samedi dernier et avons reçu le client pour lui présenter nos excuses. Nous condamnons très fermement ces faits qui sont contraires aux valeurs de notre entreprise. Une enquête est en cours."

Cela n'empêchera pas le couple de porter plainte et d'envoyer "un courrier salé au siège de Carrefour".

"Le vigile qui tout de même représente une enseigne de renom a tout bonnement cautionné les propos homophobes et les menaces de mort. On ne peut pas tenir ce genre de propos et menaces devant témoins, impunément. C'est intolérable. Personne n'a bougé, sinon baisser la tête..."

R.F.

L'Obs

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Portrait de jl06

En 2017, 71 gays condamnés à de la prison ferme

Il ne fait pas bon être homo ou lesbienne en Tunisie. On risque trois ans de prison plus un « test anal » – une pénétration infligée à l'aide d'un objet par un médecin – censé prouver votre homosexualité. Les vies de jeunes hommes ont été brisées par cette loi. En 2015, le président de la République Béji Caïd Essebsi avait réitéré sa volonté de ne pas modifier l'article 230 du code pénal, qui criminalise la sexualité des LGBT. Il se trouvait alors en Égypte, en visite d'État auprès du maréchal Sissi, autre figure du monde arabe qui met un point d'honneur à embastiller les homosexuels. L'association Shams, qui lutte pour la dépénalisation de l'homosexualité, a publié les chiffres de la répression pour 2017 : 71 condamnations. Entre trois mois et trois ans ferme. Les représentants de Shams sont très souvent menacés et certains ont dû quitter la Tunisie pour trouver refuge en Europe. On pourrait croire que cet état de fait est religieux, lié uniquement aux islamistes d'Ennahdha. La situation est beaucoup plus complexe. Rached Ghannouchi, le leader historique des islamistes tunisiens, a été le premier à se prononcer publiquement en faveur de la liberté pour les homosexuels. Ce qui rejoint une des caractéristiques de ce mouvement qui tient particulièrement aux libertés individuelles dans les espaces privés. Le conservatisme, appelons ça ainsi, touche toutes les couches de la société. De l'extrême gauche à Nidaa Tounes (le parti de BCE et de Youssef Chahed, qui dirigent le pays depuis début 2015). 

La société civile, unique parti progressiste

Que Call me by your name soit banni des écrans tunisiens (une petite quinzaine pour onze millions d'habitants), soit. Les ventes en DVD (deux dinars l'unité, soit 70 cents d'euro) seront dix fois supérieures à ce qu'elles auraient dû être. La décision du ministère ira à l'inverse de l'objectif affiché. Ce qui met en évidence la schizophrénie de cette société. N'allez pas voir ce film au cinéma, ce serait une atteinte aux bonnes mœurs. Mais, chez vous, à l'abri des rideaux tirés, n'hésitez pas. La vendeuse d'une boutique de DVD dupliquait une cinquantaine de copies samedi. « Depuis l'interdiction du film, tout le monde veut le voir », ironisait-elle. À 27 ans, elle se demandait si « l'État n'a pas plus urgent à faire que d'interdire un film que personne n'est obligé d'aller voir… » Poser la question, c'est y répondre. Seule la société civile se bat pour modifier les consciences et les comportements homophobes. À deux mois des municipales, les partis politiques ne veulent surtout pas réagir sur un pareil sujet. De peur de se mettre à dos une partie de l'électorat conservateur. Cette décision n'est pas bonne pour « l'image de la Tunisie » selon l'expression en vogue ici. Il suffisait de ne pas la prendre. « On a un don pour se créer des faux problèmes », vitupérait ce week-end un trentenaire.