histoire 1

Publié par seanaque le 07.11.2008
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Ce qui séduit d'emblée, c'est l'ambition du projet.

 

Il s'agit de publier, pour la première fois en français, l'intégralité des manuscrits de Qumrân - ensemble unique sur les origines du christianisme - avec en vis-à-vis le texte original en hébreu, araméen ou grec. Cette démarche se situe dans le droit fil de la publication par les éditions du Cerf de la Bible de Jérusalem ou de celle d'Alexandrie.

 

Depuis leur découverte entre 1948 et 1950, à Qumrân, en Israël, ces manuscrits de la mer Morte "qui représentent sans doute le plus grand événement archéologique du XXe siècle" ont fait couler beaucoup d'encre mais "réclamaient d'être sérieusement révisées", estime le bibliste et historien du judaïsme ancien André Paul, concepteur et codirecteur de la publication.

Le chantier, baptisé La Bibliothèque de Qumrân, comprendra neuf volumes. Vient de paraître aux éditions du Cerf le premier, intitulé Torah/Genèse (640 p., 89 €). Suivront les huit autres au rythme d'un par an. Pour mener à bien ce projet, André Paul a eu recours à toute une nouvelle génération de jeunes chercheurs francophones, dont Thierry Legrand et Katell Berthelot, qui codirigent l'édition. Sur la vingtaine d'érudits mobilisés, sept d'entre eux sont âgés de moins de 35 ans.

 

DANS LES ONZE GROTTES

L'originalité du travail réside aussi dans le classement des textes. A la différence des publications anglo-saxonnes, l'ordre suivi n'est pas celui des manuscrits tels qu'ils ont été trouvés dans les onze grottes qui les contenaient. Mais c'est un classement raisonné qui suit les grands thèmes de la Bible hébraïque. Ainsi, dans ce premier recueil sont rassemblés tous les fragments qui ont trait aux héros de la Genèse, à la création du monde, au Déluge et à l'histoire des Patriarches.

Au fur et à mesure, une autre vision historique de la société judaïque et des communautés chrétiennes en gestation se dégage à la relecture des rouleaux anciens. Selon André Paul, "des brèches sont ouvertes dans la théorie dite "essénienne", énoncée et promue voilà presque soixante ans par Roland de Vaux et André Dupont-Sommer" qui jusqu'à présent faisait autorité. Les liens établis entre la communauté des Esséniens, à qui on attribuait la rédaction des manuscrits, et les habitants de Qumrân se trouvent réduits à néant, comme l'avait déjà écrit le grand historien paléographe américain Norman Golb.

Alain Beuve-Méry

Article paru dans l'édition du 06.11.08.