interview luc montagnier 310708 Recherche vaccin part 2

Publié par maya le 31.07.2008
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 Les chercheurs ont déjà éprouvé trois manières de réaliser un tel vaccin: en injectant des fragments de l'ADN du VIH, qui produisent des protéines cibles pour les lymphocytes, en utilisant des vecteurs viraux comme «transporteurs» pour les bribes du VIH, ou en liant celles-ci à des protéines appelées lipopeptides...
- Mais aucune de ces tentatives n'a jusque-là été couronnée de succès.
- Est-on donc dans l'impasse? Vous avez déclaré que, pour surmonter leurs difficultés, les «scientifiques devaient être plus novateurs»...
- C'était aussi une autocritique... Non, il y a des solutions. On n'aboutit pas encore parce que tout est question de moyens et de volonté conceptuelle. Actuellement, la pharma-industrie s'oriente encore vers les traitements chimiques plutôt que vers les vaccins thérapeutiques. Concernant ces derniers, la pierre d'achoppement souvent évoquée est qu'il faut identifier des parties spécifiques du VIH qui ne mutent pas et puissent être exposées au système immunitaire. Mais elles existent! On sait que certaines personnes, appelées «contrôleurs d'élites», bien qu'infectées par le VIH, ne développent pas la maladie, précisément grâce à l'action de leur système immunitaire. Le problème, c'est que les parties non mutantes du VIH sont souvent cachées. Il suffirait dès lors de les modifier pour qu'elles deviennent exposées. Nous travaillons dans ce sens, mais je ne peux vous en dire davantage pour l'instant.
- Tout semble si simple...
- Je ne veux pas trop simplifier non plus, car le propre de la recherche est de ne pas connaître à l'avance les résultats. Et il faut rester humble devant la complexité des mécanismes biologiques. Mais on pourrait avoir des résultats d'ici trois à quatre ans. Nous avons voulu mettre nos idées à l'épreuve il y a quelques années. Mais nos projets ont été refusés sous prétexte qu'arrêter temporairement les trithérapies chez les patients, comme on le voulait pour mener à bien nos essais, n'était pas éthique, car potentiellement dommageable. Or, on sait aujourd'hui que ce n'est pas le cas.
- Vous êtes donc optimiste pour ces vingt-cinq prochaines années?
- J'espère que dans un quart de siècle on aura éradiqué l'épidémie, mais pas forcément le virus. Car en fait, ce virus est sorti d'une boîte de Pandore. Et il faut qu'il y retourne. L'Histoire montre toutefois que les épidémies du passé se sont arrêtées presque d'elles-mêmes alors que l'homme avait peu de moyens pour agir sur elles. Mais ceci ne doit pas nous empêcher de tout faire pour arrêter celle du sida avant qu'elle n'ait tué encore des millions de personnes.


SOURCE : le temps.ch

http://www.letemps.ch/template/print.asp?article=236888